Want to make creations as awesome as this one?

More creations to inspire you

LIZZO

Horizontal infographics

BEYONCÉ

Horizontal infographics

ONE MINUTE ON THE INTERNET

Horizontal infographics

SITTING BULL

Horizontal infographics

RUGBY WORLD CUP 2019

Horizontal infographics

GRETA THUNBERG

Horizontal infographics

Transcript

21 villes : portrait d'une France urbaine

Observatoire de l'Habitat dans les Villes

UNE politique nationale du logement,DES politiques de l'habitat ...... décryptées par des données, des sémaires (webs-débats) et des monographies.

Cliquer sur les villes pour les découvrir à travers le regard de l'OHV !

RENNES

BEAUVAIS

MEAUX

Les Sables d'Olonne

AUCH

MILLAU

MONTPELLIER

SAINT-ETIENNE

NEVERS

CAMBRAI

LYON

SAINT-DIZIER

SAINT-DIE-DES-VOSGES

CHERBOURG-EN-COTENTIN

LIBOURNE

Dunkerque

DRAGUIGNAN

BASTIA

PONTARLIER

Crédits : sanctuaire de Lisieux LISIEUX

ANNEMASSE

ANNEMASSE

... et en données

Quelques données Informations générales : Maire : Christian Dupessey (PS) EPCI : Annemasse – Les Voirons Agglomération Siège de l’intercommunalité, présidée par Gabriel Doublet (UDI). PLH approuvé en 2012 (3e PLH approuvé) en cours de révision PLUi : aucun – Plan « Action cœur de ville » : non Délégation des aides à la pierre : aucune 5 principaux organismes de logements sociaux OPH (de Haute-Savoie), ESH (Erilia, SA Mont-Blanc, ICF Habitat), Action Logement (Alliade), SEM (SEMCODA)

Annemasse dans l'OHV Replay du web-débat du 3 mars 2023

Logement abordable : à quel prix ? - L'OHV - IDHEAL - 3 mars 2023

Home

L'habitat à Annemasse en quelques mots ...

L'habitat à Annemasse en quelques mots Pour l’INSEE, Annemasse est la ville centre d’un territoire qui, banlieue et couronne périurbaines comprises, accueille 325 000 habitants. C’est un trompe-l’œil statistique car les trois typologies d’espace forment la banlieue et la couronne périurbaine de Genève. Ceci explique les spécificités de cet espace — le Genevois français. Annemasse n’est pas une ville centre, c’est la banlieue populaire de Genève — fonction lisible dans la distribution des catégories sociales (domination des employés), le taux de logements sociaux et celui de pauvreté, qui contrastent avec la « banlieue » et même la couronne périurbaine ; de l’autre côté du lac de Genève les communes du pays de Gex forment la banlieue « chic » de Genève. Ceci explique la disproportion entre Annemasse et son environnement français : 35 000 habitants à Annemasse et…290 000 entre la « banlieue » et la « couronne périurbaine ». Cependant, Annemasse est la seule commune de plus de 30 000 habitants dans le Genevois Français, d’où ceci que, sans être la ville-centre de l’agglomération, elle en est une des polarités importantes. Pourtant, la situation particulière ne permet pas de raisonner comme on le fait habituellement en cercles concentriques et en effets de débordement et d’interactions sur le marché du logement entre la ville centre et ses périphéries. Le marché du logement est commandé par la structure transfrontalière de l’agglomération qui se caractérise par plus de 50 000 frontaliers qui, habitant en France, travaillent chaque jour dans le canton de Genève et par un marché du logement particulièrement sélectif à Genève. Cette situation produit deux effets : considérant le rapport entre les prix du m² et des loyers à Genève, il est préférable d’y travailler tout en habitant en « France voisine » ; et ce qui est vrai pour les Français l’est aussi pour les nationaux suisses qui sont chaque jour plus nombreux à faire le choix d’un domicile en France. Il existe un système de reversement de l’impôt sur le revenu de la Suisse vers la France, mais est-il suffisant pour assurer les charges engendrées par ce flux de population ? Il n’est pas facile de réguler un marché du logement dans ces conditions. Annemasse agglomération en est à son troisième PLH (le dernier date de 2012), mais se trouve prise entre un puissant moteur —Genève— et un espace environnant qui ne demande qu’à accueillir des ménages qui disposent d’un pouvoir d’achat élevé. La création récente d’un pôle métropolitain du Genevois français regroupant l’ensemble de la couronne genevoise (comprenant Annemasse) pourrait permettre d’aborder ce marché à la bonne échelle.

Article à partir du web-débat : Le logement abordable, à quel prix ? Philippe Estèbe - Acadie

Les séminaires de l'OHV Le logement abordable, à quel prix ? Avec les contributions de Maud Gallet, directrice de l’habitat d’Annemasse-Agglomération, Ludovic Derome, responsable de l’unité habitat-logement de Cherbourg-en-Cotentin et Camille Régnier, maîtresse de conférences en économie à l’Université de Paris-Est-Créteil, coordinatrice de l’équipe « Marchés du logement : dynamique d’usage des sols, dynamique des richesses, dynamique des prix » du programme de recherche Les défis économiques d’un foncier et d’un logement abordables (2022-2025). Selon Camille Régnier, maîtresse de conférences à l’université de Paris-Est Créteil, « il est généralement considéré dans la littérature internationale que le logement est un bien abordable dès lors que le taux d’effort des occupants ‑ locataires ou accédant à la propriété ‑ ne dépasse pas 30% ». Lorsqu’on l’on ne tient compte que des dépenses effectives[1], le taux d’effort moyen en France s’établissait, en 2015, à 19% du revenu des ménages : le logement y apparaît donc particulièrement abordable. Les comparaisons européennes conduisent même à classer la France parmi les bons élèves, au moins de ce point de vue[2]. Cependant, comme toute moyenne, celle-ci est trompeuse, en ce sens qu’elle masque trois paramètres qui font considérablement varier ce taux d’effort. Ainsi, le taux d’effort moyen d’un propriétaire qui n’a pas de remboursement d’emprunt en cours s’établit en moyenne à 10% de son revenu, alors que les locataires du marché libre doivent consacrer, en moyenne 30% de leur revenu au logement. Ce chiffre monte encore pour les plus modestes des locataires. Le fait que ces propriétaires dits non-accédants représentent environ 40% des ménages du pays tire fortement la moyenne vers le bas. Le deuxième paramètre de variation provient, selon Camille Régnier, de ce que le logement est un « bien non homothétique », autrement dit que son coût relatif varie en sens inverse du revenu : net des aides publiques, ce coût peut atteindre 40% du revenu des ménages les plus modestes (premier quartile de revenu) logés dans le parc privé ; alors qu’il n’est que de 9% pour les propriétaires non-accédants les plus aisés, c’est-à-dire le dernier quartile de revenu[3]. C’est chez les accédants modestes que le taux d’effort est le plus élevé. Ces deux points mettent en évidence les inégalités sociales et/ou générationnelles dans l’accès à un logement abordable. Mais ce ne sont pas les seules inégalités qui frappent les ménages en quête d’un logement. Le taux d’effort est en effet également étroitement dépendant du marché local du logement, on touche ici à des inégalités géographiques. Maud Gallet, directrice de l’habitat à Annemasse agglomération explique que la proximité de Genève, où le salaire minimum est trois fois supérieur au SMIC, fait fortement monter les prix du logement dans la partie française de l’agglomération transfrontalière. Ce phénomène conduit non seulement à limiter les possibilités de production de logement social (du fait du coût des terrains), mais aussi à exclure tendanciellement les ménages aux revenus moyens (déciles 4 à 8) du logement locatif et plus encore de l’accession à la propriété. Cette sélectivité limite les possibilités d’accès au logement notamment pour les « travailleurs essentiels » (par exemple, les personnels soignants), dont on sait combien ils sont nécessaires au bon fonctionnement de la ville. Symétriquement, Ludovic Derome, responsable de l’unité habitat/logement à la communauté d’agglomération du Cotentin, explique que le problème n’est pas tant le coût du logement à Cherbourg-en-Cotentin que celui de l’existence d’une offre correspondant aux attentes des familles, ces ménages de travailleurs qualifiés et de professions intermédiaires attirés par une activité économique en plein essor (énergie, construction navale et agroalimentaire). Pour ces différentes raisons, les deux villes ont décidé qu’il relevait de leur responsabilité d’intervenir dans la régulation du marché du logement de façon à produire une offre dite abordable. La notion de logement « abordable » revêt, dans chacun des contextes, une signification différente. Mais elle suppose dans les deux cas une intervention publique soutenue aux côtés d’opérateurs privés ou publics, hors du cadre balisé du logement social. Pourquoi pas des logements sociaux ?Plutôt que chercher à produire du logement abordable, intermédiaire entre le logement social et le logement libre, ne serait-il pas judicieux de construire plus de logements locatifs sociaux ? Le logement locatif social, propriété de bailleurs sociaux, n’est par nature pas spéculatif comme l’explique Maud Gallet, ce qui n’est pas le cas de beaucoup de logements en accession à la propriété, rendus plus abordables par une aide publique. Pourtant, à moyen terme et lors de la revente, les propriétaires peuvent bénéficier d’une plus-value importante quand bien même ils avaient bénéficié d’un prix décoté. Pour autant, le logement social ne résout pas tout. D’une part, il faut tout simplement pouvoir en construire, ce qui est difficile à Annemasse en raison du prix des terrains. D’autre part, les locataires du secteur HLM ont tendance à y rester le plus longtemps possible. Sauf s’ils trouvent un travail en Suisse, ils savent qu’ils ne pourront pas se reloger dans d’autres segments du marché. En conséquence, le taux de rotation dans le logement social est très bas et la place manque pour accueillir les travailleurs clés. Par ailleurs, le logement social a ses contraintes que tous les ménages n’acceptent pas : il faut s’inscrire sur une liste d’attente et on ne choisit pas vraiment son logement. Autre type d'écueil à Cherbourg-en-Cotentin, les montages ne sont pas toujours adaptés aux besoins ou souhaits des ménages. Les logements bénéficiant d’un prêt social location-accession (PSLA) et qui permettent à des locataires du parc social d’acquérir leur logement au bout de quelques années, souvent proche de la ville-centre, ne trouvent pas bien leur place. Malgré la décote, ils sont concurrencés par le marché de la construction et de l’accession de maisons individuelles en périphérie. Les politiques publiques peinent à remplir leur ambitieux objectif de développer une offre permettant aux classes moyennes d’accéder à la propriété avec un taux d’effort réduit, tout en préservant le sentiment d’une certaine liberté de choix résidentiel et en offrant un environnement urbain attractif. Un segment du marché régulé par la puissance publiqueCe segment « abordable » n’apparaît pas spontanément dans un marché fortement polarisé entre parc privé et parc social. Il faut donc le créer. A Annemasse, cette cible se précise au fil des différents programmes locaux de l’habitat, dont le quatrième est en cours. Toutes les opérations neuves se répartissent désormais en trois tiers : logement social, logement libre et logement abordable. Pour produire ce troisième segment du marché, les acteurs publics locaux utilisent une grande diversité de dispositifs réglementaires et/ou législatifs définis à l’échelle nationale pas tous toujours bien adaptés au contexte local. La palette est variée et s’enrichit : prêt social location-accession, accession sociale, TVA réduite en quartier politique de la ville et plus récemment, bail réel solidaire[4] (BRS) et même investissement des ménages avec le Pinel. A Cherbourg, on tente aussi des opérations de rénovation des immeubles vétustes ou insalubres, mais cette solution onéreuse, ne permet de produire des logements qu’en petite quantité. A Annemasse, la combinaison des différents dispositifs permet d’offrir des logements neufs « abordables » au prix de 3300euros/m² (contre un prix moyen dans l’ancien de 3000euros du m2 et des prix du neuf supérieurs à 4000euros). Mais pour parvenir à ce prix, il faut dépasser la définition nationale des produits proposés. Pour ce faire, la communauté d’agglomération minore, à sa charge, le prix des charges foncières des terrains destinés à la production de logements abordables dans la principale ZAC de l’agglomération (Annemasse Etoile, 1200 logements d’ici 2031). La question est moins prégnante à Cherbourg-en-Cotentin, en raison de prix du foncier moindres, mais elle se pose et va se poser de plus en plus pour répondre aux exigences de sobriété foncière. Dans le Cotentin, c’est la maison individuelle qui a, jusqu’ici, fait office de logement abordable ; désormais il va falloir répondre aux exigences de sobriété en refaisant la ville sur la ville, sans plus s’étaler. Il est vraisemblable que ce marché « régulé », entre le logement social et le marché libre, va jouer un rôle croissant dans un contexte prévisible, de hausse des prix des terrains, des matériaux, de l’énergie et des taux d’intérêt. Dans cette optique, les deux villes plébiscitent la formule du BRS, qui réduit le coût du foncier, en limite l’augmentation et, surtout, empêche la spéculation. A condition de pouvoir disposer des moyens de maîtrise des sols, c’est un instrument d’avenir, évidemment dans les marchés tendus et, à terme, dans un nombre croissant d’agglomérations. Philippe Estèbe - Acadie [1] Les dépenses effectives pour les locataires comprennent le loyer et les charges ; pour les propriétaires les remboursements d’emprunt, les charges de copropriété et les taxes foncières ; pour tous les ménages les dépenses d’eau et d’énergie affectées au logement. Un autre indicateur permet d’évaluer le coût de l’usage du bien par son propriétaire comme l’équivalent du loyer auquel il renonce pour occuper son logement. [2] « Taux d’effort en logement : en prenant en compte le coût du service du logement, les propriétaires français sont bien placés en Europe », INSEE Analyses, n°39, 18/07/2018. [3] Ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chiffre clés du logement 2022. [4] Le bail réel solidaire (BRS) créé par la loi du 6/08/2015 est un dispositif fondé sur la dissociation de la propriété du sol et de celle du bâti. Les ménages achètent un logement et louent le terrain à un organisme foncier solidaire, dans le cadre d’un bail de 18 à 99 ans. Cette dissociation permet de réduire le coût d’acquisition de 20 à 40%. Les ménages éligibles doivent se situer en dessous d’un plafond de ressources, variable selon le territoire et la composition de la famille. Le prix de revente est limité au prix d’achat actualisé.

AUCH

... et en données

Quelques données Informations générales : Maire : Christian Laprébende (PS) EPCI : Grand Auch Cœur de Gascogne Auch est le siège de l’intercommunalité, présidée par Pascal Mercier (PS). PLH approuvé en 2016 (1er PLH approuvé) PLUi : aucun - Plan « Action cœur de ville » : oui Délégation des aides à la pierre : aucune 4 principaux organismes de logements sociaux OPH (du Gers), ESH (Alteal, Erilia et Toit de Gascogne)

Auch dans l'OHV Replay du web-débat du 17 janvier 2023

Y a-t-il des investisseurs dans les villes moyennes ? 17 janvier 2023

L'habitat à Auch en quelques mots ...

L'habitat à Auch en quelques mots Petite ville moyenne de 20 000 habitants, dans une aire urbaine de 60 000 habitants, Auch fait partie d’une communauté d’agglomération de près de 39 000 habitants (soit les deux tiers de l’aire urbaine). La variation de population est légèrement positive (+0,17% par an au cours de la période 2013-2018), due en totalité au solde migratoire, le solde naturel étant négatif. En 2016, le PLH avait estimé les besoins autour de 190 logements produits par an (neuf et rénovation), dont 1/3 en logement social, au-dessus de la production annuelle effective (150 logements par an en moyenne de 2009 à 2018). Ces besoins sont liés au solde migratoire, mais surtout à la diminution de la taille des ménages (2,1 personnes par ménage), plus rapide qu’à l’échelle nationale ; l’augmentation des ménages d’une personne est une des conséquences du la croissance du nombre de personnes âgées dans la communauté. Cependant, le PLH de 2016, en révision, attendait une croissance démographique supérieure à celle qui s’est réellement produite. Malgré la proximité de la métropole toulousaine, particulièrement dynamique, Auch et son territoire ne sont pas encore intégrés dans le système toulousain, notamment parce que les liaisons routières et ferroviaires ne sont pas performantes (1h30 en train et 1h15 en voiture). Le marché du logement est cependant détendu : l’accession à la propriété dans le parc ancien est relativement aisée (accessible à un revenu situé entre le 1er et le 2ème décile) et la part des logements inoccupés (vacants et résidences secondaires) élevée dans la ville centre. C’était d’ailleurs une des orientations prioritaires du PLH de 2016 qui souhaitait une régulation géographique de l’offre d’habitat, pour redonner de la vigueur et de l’attractivité à la ville centre et aux deux pôles secondaires de l’agglomération (Pavie et Preignan), et affichait la volonté de maîtriser la croissance dans les villages. Ce n’est manifestement pas ce qui s’est produit. Entre 2013 et 2018, les tendances que le PLH souhaitait infléchir se sont poursuivies : faiblesse de la production de logements dans la ville centre (65 logements par an contre 110 prévus par le PLH), et dans les pôles secondaires (15 logements par an contre 20 pour le PLH) ; poursuite de la production résidentielle en deuxième couronne (20 logements prévus et 67 réalisés chaque année en moyenne). L’une des principales difficultés qui explique ce décalage est sans doute la remise sur le marché de logements anciens dans la ville centre. C’était la priorité du PLH et son instrument privilégié, qui, à l’usage —à la fois pour des raisons liées à la demande mais aussi sans doute à la capacité et la motivation des propriétaires— s’est révélé décevant. Le PLH est en révision, il lui faudra prendre acte de ces décalages et trouver de nouveaux modes d’intervention, si les autorités locales souhaitent réaffirmer les orientations de 2016.

Home

Article à partir du web-débat : Y-at-il des investisseurs dans les villes moyennes ? Xavier Desjardins - Acadie

Les séminaires de l'OHV Y-a-t-il des investisseurs dans les villes moyennes ? Avec les contributions de Pauline Amiable, responsable de la planification stratégique de la communauté d’agglomération Saint-Dizier Der et Blaise, Sébastien Blanc, directeur général des services de la communauté d’agglomération du Grand Auch, Stéphanie Magnier, chargée de mission habitat et foncier de la communauté d'agglomération de Cambrai. Des investisseurs dans les villes moyennes ? Il y en a beaucoup ! Loin de l’idée répandue d’une absence ou d’un manque de ce type d’acteurs immobiliers, les représentants d’Auch, Saint-Dizier et Cambrai ont, au contraire, insisté sur la diversité de leurs profils dans ces villes. Pour autant, ces investissements sont souvent inférieurs aux attentes locales et ils ne sont que rarement en phase avec les stratégies territoriales, notamment pour la revitalisation des centres anciens. Orienter les investisseurs ou susciter une demande nouvelle ?Sébastien Blanc, directeur général des services de la communauté d’agglomération du Grand Auch ; confesse un certain « aveu d’impuissance » et s’interroge sur l’effet réel des politiques locales. La capacité d’attirer les investisseurs est très liée à l’attractivité résidentielle. Or, celle-ci est très contrastée entre les trois villes. Elle est assez forte et en progression à Auch, située à environ une heure de route de Toulouse. En témoignent les sommes perçues via les droits de mutation à titre onéreux (DMTO) qui ont doublé en quatre ans mais qui s’expliquent par la hausse du rythme des mutations, plus que par une forte augmentation des prix. L’attractivité résidentielle est modérée à Cambrai, qui a longtemps bénéficié d’un effet de desserrement résidentiel de l’aire métropolitaine de Lille. Elle est très faible à Saint-Dizier. La ville-centre est passée de 40 000 habitants en 1980 à 23 000 habitants aujourd’hui. Face à ces effets macro-économiques contre lesquels il est difficile – à l’échelle des institutions municipales ou intercommunales, tout au moins – de réellement lutter, il existe toutefois des marges de manœuvre pour les politiques locales qui permettent d'orienter les investissements, par quartier ou par type de logements. Même à Auch où la demande est forte, le marché est déséquilibré : le centre ancien attire peu car, comme partout, les caractéristiques des logements plaisent moins. Le stationnement est délicat, les logements n’ont souvent ni balcon ni terrasse, ne correspondent plus aux attentes des habitats, ni en surface, ni en confort, etc. La croissance périurbaine a tendance à se concentrer le long des axes routiers les plus fréquentés (en l’occurrence, à Auch, en direction de Toulouse). L’art des politiques locales de l’habitat consiste justement à tenter de remettre des logements sur le marché et de donner envie à des ménages de les habiter. Partons à Saint-Dizier, Pauline Amiable présente dans cette ville de Haute-Marne une stratégie de développement local volontairement contracyclique. La communauté d’agglomération développe des projets d’envergure pour se singulariser et tenter de se rendre attractive : elle met en œuvre un projet de reconfiguration de l’espace public pour faciliter les mobilités actives, en lien avec les Jeux Olympiques de 2024, elle développe un lieu culturel en partenariat le Grand Palais de Paris, etc. Saint-Dizier voit grand malgré sa taille modeste. La ville a initié un « laboratoire de la ville de demain », pour présenter des projets urbains et architecturaux, un peu à la manière des Internationale Bauausstellung (IBA), ces événements organisés chaque année dans une ville allemande différente, pour mettre en valeur des projets architecturaux et urbains et parfois les politiques urbaines qui leur ont permis d’exister. Dans ce cadre, l’agence d’architectes-urbanistes Devillers et associés a reçu une double mission : l’élaboration d’un plan-guide de transformation urbaine et la création de partenariats entre différents investisseurs et gestionnaires d’ensembles immobiliers. On devine toute la complexité d’une telle démarche à Saint-Dizier où les acteurs locaux sont d’une part stimulés par une envie de développement portée par le maire, Quentin Brière, dynamique et très bien connecté aux milieux économiques, d’autre part bien conscients que le parc de logements doit diminuer, au risque de se vider en partie. De grandes opérations de rénovation urbaine ont été entreprises (notamment dans le quartier Vert Bois), pour aller dans ce sens. Il faut donc appuyer simultanément sur le frein et l’accélérateur, c'est-à-dire tenir compte des dynamiques de marché sans s’y soumettre ! Enfin, dans les trois villes, nos interlocuteurs nous ont rappelé que même dans un marché globalement détendu voire atone, il pouvait y avoir des tensions sur certains segments du parc, notamment les logements individuels de qualité ou les logements collectifs bien conçus. A titre d’exemple, les logements locatifs privés de qualité se louent environ 11 ou 12 euros par m² à Saint-Dizier, ce qui offre des rendements locatifs tout à fait satisfaisants, compte tenu du niveau des prix d’achat. Même dans une ville moyenne, même en décroissance, il existe « des » marchés du logement. Qui sont les investisseurs présents dans ces villes ?Deux types sont bien connus par les trois protagonistes représentés : les investisseurs publics, soit directement soit via des aides publiques, et les absents ! Ils sont faciles à identifier : la plupart des investisseurs institutionnels, assureurs, banques et autres fonds d’investissement. Parmi les acteurs de l’immobilier, les promoteurs sont également absents de ces trois villes. Les autres investisseurs privés sont moins bien connus. Pourtant, ils constituent l’essentiel de l’investissement immobilier dans ces villes et au minimum 80% des sommes investies. Quand le marché est stable et relativement porteur, les collectivités locales ne s’attardent pas trop sur leur profil et ne cherchent pas à savoir qui ils sont dès lors que le marché est alimenté. A Cambrai, Stéphanie Magnier a bien expliqué comment, pendant de nombreuses années, la demande locale, le desserrement lillois et un parc relativement peu onéreux pour le département du Nord ont globalement suffit aux édiles locaux. Depuis 2012, la fermeture de la base aérienne 103 a complètement changé la donne du marché immobilier : la ville souffre du départ d’un millier de militaires. Depuis lors, il convient de trouver des stratagèmes pour attirer de nouveaux ménages, issus de l’agglomération ou d’ailleurs. De grands projets économiques sont en cours, avec la création d’un port sur le canal Seine-Nord-Europe et le projet, à Cambrai, d’une grande base logistique dont on attend environ 1300 emplois. Les résidences militaires forment de grands ensembles immobiliers qui sont restés longtemps en friche. En 2020, un premier site a été vendu à un investisseur cambrésien pour y construire des logements moyens et hauts de gamme. Ici, le salut vient d’abord des investisseurs locaux. Qui sont ces investisseurs locaux ? Ce sont des particuliers ou des petits professionnels qui peuvent acheter, puis louer de quelques unités à une trentaine, voire une quarantaine, de logements. Ces multi-propriétaires sont des partenaires incontournables des collectivités. A Auch, la municipalité collabore souvent de manière étroite avec eux pour concevoir des restructurations d'îlots, des opérations tiroir, etc. Il convient aussi de les aider ou de les inciter à entamer des travaux de rénovation ou d’amélioration : à Saint-Dizier, les héritiers de l’industrie de la fonderie restent de grands propriétaires fonciers et immobiliers, qui n’ont pas toujours une gestion très active de leurs biens. Accompagner les investisseursRepérer et discuter avec les gros investisseurs est assez facile, ils sont visibles, à moins d’être dissimulés derrière des sociétés civiles immobilières. Mais comment aider les petits ? Tel est le sujet des démarches de revitalisation des centres-villes, notamment à l’heure d’Action Cœur de Ville, programme national en direction des villes moyennes. A Saint-Dizier, la municipalité et la communauté d’agglomération œuvrent au développement d’un réseau de petits investisseurs, en les aidant à trouver un modèle économique viable. Tout d’abord, il s’agit de se rapprocher des propriétaires tentés par la rétention foncière, c’est-à-dire attendre une valorisation plus importante avant de vendre, ou affichant des prix de vente excessifs. Ensuite, il s’agit d’aider les investisseurs dans le montage financier et juridique des projets. Le projet d’opération programmée de l’habitat de renouvellement urbain (OPAH-RU) permet par exemple cet accompagnement et de concentrer des aides, notamment de l’Agence nationale de l’habitat (Anah) et d’Action Logement. Il faut faire connaître ces dispositifs et parfois apprendre aux propriétaires à jouer avec leurs modalités. Le dispositif fiscal Denormandie qui aide à la rénovation de logements en mauvais état et ou vides est limité à deux investissements par an et par investisseur : pour la réhabilitation d’un petit immeuble, il faut jouer sur les années civiles pour acquérir et rénover quatre logements, par exemple. A proximité du projet d’enfouissement des déchets nucléaires de Bure dans la Meuse, à une quarantaine de kilomètres de Saint-Dizier, les propriétaires peuvent également bénéficier d’aides spécifiques d’EDF. Au-delà de l’aide financière, il faut accompagner les propriétaires dans la définition du projet architectural. Des aides spécifiques existent pour la création d’extérieurs comme des balcons, pour la création d’accès indépendants aux logements situés au-dessus d’un commerce, pour l’installation d’ascenseurs dans les immeubles collectifs, etc. L’appui de la collectivité locale va jusqu’à proposer des services à la rédaction des contrats de location. Des investisseurs partout, mais dépendants de l’accompagnement des collectivités localesCes trois exemples montrent qu’il n’y a pas de territoires sans investisseurs ! Ils ne sont parfois pas nombreux, poursuivent des objectifs et des stratégies quelquefois peu en phase avec celles des collectivités, mais ils sont là. Par ailleurs, partout, sur certains segments du marché locatif, il est possible d’obtenir de bons rendements locatifs, grâce à une connaissance précise et presque intime des situations locales. La deuxième conclusion est que les mécanismes purement fiscaux ou financiers sont insuffisants pour réorienter la demande. L’accompagnement des investisseurs, sur le plan architectural, financier ou encore juridique est un élément-clé pour favoriser les projets. Cet accompagnement dépend directement de la bonne volonté et des compétences des acteurs publics locaux. Une interrogation persistante porte sur les effets potentiels du zéro artificialisation nette : le resserrement des droits à s’étaler va-t-il réorienter la demande vers les centres ? Probablement selon Sébastien Blanc, par effet mécanique de déplacement de la demande. Sans véritable certitude du côté de Saint-Dizier car la rétention foncière reste importante et les effets sur les prix seront certainement très lents. Une autre question porte sur le profil des investisseurs petits et moyens. Dans chacune des villes, ils sont individuellement connus. Mais finalement, quels sont leurs profils en termes d’âge, de trajectoires individuelles, de motivation, de patrimoine, etc. ? Ce type d’acteurs immobiliers reste assez mal appréhendé alors que certains financeurs des opérations disposent de riches données les concernant (Anah et Action Logement entre autres). Les échanges de ce séminaire ont montré qu’ils sont pourtant des acteurs-clés dans les villes moyennes. Xavier Desjardins - Acadie

BASTIA

... et en données

Quelques données Informations générales : Maire : Pierre Savelli (FaC) EPCI : Communauté d’agglomération de Bastia Siège de l’intercommunalité, présidée par Louis Pozzo di Borgo (FaC) PLH en cours d’élaboration depuis 2018 (aucun PLH précédent) PLUi : aucun - Plan « Action cœur de ville » : oui Délégation des aides à la pierre : aucune 6 principaux organismes de logements sociaux OPH (de Haute-Corse), SEM Bastia Aménagement, ESH (ERILIA, LOGIREM, Sud Habitat, ALIS)

L'habitat à Bastia en quelques mots ...

L'habitat à Bastia en quelques mots Bastia est l’une des villes de taille moyenne de l’échantillon les plus chères malgré un profil socioéconomique plutôt marqué par la présence d’employés et d’artisans et commerçants, avec un taux de pauvreté assez élevé. La ville centre connaît une croissance démographique forte sous l’effet d’un solde migratoire très fortement positif. Cette attractivité génère une tension importante sur le logement social, assez abondant dans la ville-centre, mais nettement moins dans sa périphérie. L’unité urbaine de Bastia est l’une de celles où la durée d’attente moyenne est la plus élevée : près de huit ans. La part des demandeurs de logement social pour motif de mal-logement se situe dans la moyenne de l’échantillon, alors que le pourcentage de logements en suroccupation est particulièrement élevé (plus du double du taux médian de l’échantillon). Cette tension se reflète également dans un taux de logements inoccupés (vacants et résidences secondaires) très faible. La construction neuve est dynamique, notamment dans la ville-centre et, dans une moindre mesure, dans la banlieue de l’agglomération y générant des taux d’artificialisation assez élevés. La communauté d’agglomération de Bastia, qui ne comporte que cinq communes, est relativement novice en matière de politique de l’habitat. Un PLH est en cours d’approbation en 2021 pour la période 2020-2032, mais l’EPCI a fait le choix, à ce jour, de ne pas se doter de la délégation des aides à la pierre ou d’un PLU intercommunal.

Home

BEAUVAIS

... et en données

Quelques données Informations générales Maire : Caroline Cayeux (DVD) EPCI : Communauté d’agglomération de Beauvais Siège de l’intercommunalité, présidée par Caroline Cayeux (DVD) PLH approuvé en 2016 (2e PLH approuvé) PLUi : aucun - Plan « Action cœur de ville » : oui Délégation des aides à la pierre : collectivité en délégation de type 2 4 principaux organismes de logements sociaux OPH (de l'Oise), ESH (SA HLM du Beauvaisis, SA HLM du département de l'Oise), Action Logement (Picardie Habitat)

L'habitat à Beauvais en quelques mots ...

L'habitat à Beauvais en quelques mots L’aire urbaine de Beauvais (130 000 habitants) illustre une situation « péri-métropolitaine ». A 60 km de Paris-Notre-Dame, la ville accueille des ménages pauvres (25% de taux de pauvreté), avec un parc de logements sociaux important (34% de logements sociaux) et un marché privé accessible à partir du deuxième et troisième décile de revenu. Au-delà de la ville-centre, deux phénomènes se conjuguent : le desserrement de la ville-centre engendre une banlieue de maisons individuelles (12% de logements collectifs), où dominent les propriétaires (68% des ménages). Le deuxième phénomène correspond à l’intégration de l’Oise dans l’espace péri-métropolitain de la région parisienne qui ne dépend pas du marché du logement local, mais s’inscrit dans la vaste centrifugation métropolitaine. La couronne périurbaine de Beauvais est plus directement branchée sur l’Île-de-France : elle se distingue nettement de la banlieue de Beauvais par sa densité —37% de logements collectifs— la part du logement social (20% des résidences principales). La communauté d’agglomération regroupe 53 communes pour 100 000 habitants ; elle est délégataire des aides à la pierre et a élaboré son deuxième PLH en 2016. Malgré ces outils, le marché du logement dans la ville centre montre des signes préoccupants. Le parc social est important mais, le temps d’attente moyen est relativement long (4,2 ans soit légèrement au-dessus de la moyenne de l’échantillon) et surtout c’est la ville centre où la part des demandes pour mal logement est la plus élevée (24% des demandes de logement social). A l’échelle intercommunale, la part des ménages considérés comme étant en précarité énergétique est l’une des plus élevée de l’échantillon (16,4% des logements). Ceci s’explique en partie par l’importance des ménages en situation de pauvreté : le taux de pauvreté est l’un des plus élevés de l’échantillon et la médiane du revenu l’une des plus basses. Caroline Cayeux, maire de Beauvais, est préside le conseil d’administration de l’ANCT et Villes de France (association des villes moyennes). La ville dont elle est maire illustre la relation complexe des villes moyennes aux métropoles : trop loin, leur marché du logement est atone et produit un jeu à somme nulle entre la ville-centre et la périphérie — c’est le cas de Nevers. Trop proches (60 km, c’est proche de Paris) il devient difficile de maîtriser le marché du logement : le flot d’attractivité est continu, éprouvant rudement les capacités de régulation des acteurs publics.

Home

CAMBRAI

... et en données

Quelques données Informations générales : Maire : François-Xavier Villain (UDI) EPCI : Communauté d’agglomération de Cambrai Siège de l’intercommunalité, présidée François-Xavier Villain (UDI). PLH approuvé en 2018 (3e PLH approuvé) PLUi : aucun - Plan « Action cœur de ville » : oui Délégation des aides à la pierre : aucune 6 principaux organismes de logements sociaux OPH (du Nord), Action Logement (Clésence), ESH (Habitat Hauts de France, Norévie, SIGH), Bailleurs privés (SIA Habitat)

Cambrai dans l'OHV Replay du web-débat du 17 janvier 2023

Y a-t-il des investisseurs dans les villes moyennes ? - L'OHV - IDHEAL - 17 janvier 2023

L'habitat à Cambrai en quelques mots ...

L'habitat à Cambrai en quelques mots L’aire urbaine de Cambrai frôle les 100 000 habitants ; un tiers vit dans la ville centre. L’ensemble connaît une lente érosion démographique, qui s’accompagne d’un étalement de la couronne périurbaine qui continue à gagner des habitants. La population est l’une des plus modestes de l’échantillon : le revenu médian est le plus bas de l’échantillon (18 400€ par unité de consommation), le taux de pauvreté l’un des plus élevés (20% des ménages), et 20% des ménages de la communauté d’agglomération sont considérés en situation de précarité énergétique, soit l’une des proportions les plus élevées de l’échantillon. Peu de logements sociaux au regard des caractéristiques socio-économiques des ménages (16,4%), ce qui s’explique par une très bonne accessibilité du parc privé dès le premier décile de revenu. Cependant, une part importante du parc est vétuste, voire, selon le PLH approuvé en 2018, indécent. D’où la priorité accordée à la requalification du parc existant par la politique communautaire de l’habitat. Cette orientation est aussi jugée nécessaire en raison de l’image négative que la vétusté du parc peut donner, particulièrement de la ville centre. Simultanément, le nombre de personnes âgées augmente, d’où la nécessité de soutenir l’évolution de l’offre de produits adaptés aux revenus et aux besoins de ces ménages. Enfin, le logement social est quantitativement insuffisant et qualitativement inadapté à la demande, particulièrement celle des jeunes actifs. Le PLH juge nécessaire de diversifier l’offre de logements sociaux en mettant sur le marché des T1 et des T2, accessibles à des débutants accompagnés des dispositifs de sécurisation bailleurs et des parcours des locataires, de façon à permettre aux jeunes actifs d’amorcer leur vie professionnelle et autonome sur place. Le PLH stipule que 20% des nouveaux logements doivent être des logements aidés (30% de logements intermédiaires et 30% de logements très sociaux). Dans le souci de « fixer » les ménages de jeunes actifs, une part importante est accordée à l’accession sociale à la propriété. Cambrai et son agglomération se trouvent dans une des situations sociales et démographiques les plus délicates de l’échantillon. Il s’y pose la difficile question de la stratégie à adopter dans un territoire qui « rétrécit », perdant régulièrement des emplois et des habitants.

Home

Article à partir du web-débat : Y-at-il des investisseurs dans les villes moyennes ? Xavier Desjardins - Acadie

Les séminaires de l'OHV Y-a-t-il des investisseurs dans les villes moyennes ? Avec les contributions de Pauline Amiable, responsable de la planification stratégique de la communauté d’agglomération Saint-Dizier Der et Blaise, Sébastien Blanc, directeur général des services de la communauté d’agglomération du Grand Auch, Stéphanie Magnier, chargée de mission habitat et foncier de la communauté d'agglomération de Cambrai. Des investisseurs dans les villes moyennes ? Il y en a beaucoup ! Loin de l’idée répandue d’une absence ou d’un manque de ce type d’acteurs immobiliers, les représentants d’Auch, Saint-Dizier et Cambrai ont, au contraire, insisté sur la diversité de leurs profils dans ces villes. Pour autant, ces investissements sont souvent inférieurs aux attentes locales et ils ne sont que rarement en phase avec les stratégies territoriales, notamment pour la revitalisation des centres anciens. Orienter les investisseurs ou susciter une demande nouvelle ?Sébastien Blanc, directeur général des services de la communauté d’agglomération du Grand Auch ; confesse un certain « aveu d’impuissance » et s’interroge sur l’effet réel des politiques locales. La capacité d’attirer les investisseurs est très liée à l’attractivité résidentielle. Or, celle-ci est très contrastée entre les trois villes. Elle est assez forte et en progression à Auch, située à environ une heure de route de Toulouse. En témoignent les sommes perçues via les droits de mutation à titre onéreux (DMTO) qui ont doublé en quatre ans mais qui s’expliquent par la hausse du rythme des mutations, plus que par une forte augmentation des prix. L’attractivité résidentielle est modérée à Cambrai, qui a longtemps bénéficié d’un effet de desserrement résidentiel de l’aire métropolitaine de Lille. Elle est très faible à Saint-Dizier. La ville-centre est passée de 40 000 habitants en 1980 à 23 000 habitants aujourd’hui. Face à ces effets macro-économiques contre lesquels il est difficile – à l’échelle des institutions municipales ou intercommunales, tout au moins – de réellement lutter, il existe toutefois des marges de manœuvre pour les politiques locales qui permettent d'orienter les investissements, par quartier ou par type de logements. Même à Auch où la demande est forte, le marché est déséquilibré : le centre ancien attire peu car, comme partout, les caractéristiques des logements plaisent moins. Le stationnement est délicat, les logements n’ont souvent ni balcon ni terrasse, ne correspondent plus aux attentes des habitats, ni en surface, ni en confort, etc. La croissance périurbaine a tendance à se concentrer le long des axes routiers les plus fréquentés (en l’occurrence, à Auch, en direction de Toulouse). L’art des politiques locales de l’habitat consiste justement à tenter de remettre des logements sur le marché et de donner envie à des ménages de les habiter. Partons à Saint-Dizier, Pauline Amiable présente dans cette ville de Haute-Marne une stratégie de développement local volontairement contracyclique. La communauté d’agglomération développe des projets d’envergure pour se singulariser et tenter de se rendre attractive : elle met en œuvre un projet de reconfiguration de l’espace public pour faciliter les mobilités actives, en lien avec les Jeux Olympiques de 2024, elle développe un lieu culturel en partenariat le Grand Palais de Paris, etc. Saint-Dizier voit grand malgré sa taille modeste. La ville a initié un « laboratoire de la ville de demain », pour présenter des projets urbains et architecturaux, un peu à la manière des Internationale Bauausstellung (IBA), ces événements organisés chaque année dans une ville allemande différente, pour mettre en valeur des projets architecturaux et urbains et parfois les politiques urbaines qui leur ont permis d’exister. Dans ce cadre, l’agence d’architectes-urbanistes Devillers et associés a reçu une double mission : l’élaboration d’un plan-guide de transformation urbaine et la création de partenariats entre différents investisseurs et gestionnaires d’ensembles immobiliers. On devine toute la complexité d’une telle démarche à Saint-Dizier où les acteurs locaux sont d’une part stimulés par une envie de développement portée par le maire, Quentin Brière, dynamique et très bien connecté aux milieux économiques, d’autre part bien conscients que le parc de logements doit diminuer, au risque de se vider en partie. De grandes opérations de rénovation urbaine ont été entreprises (notamment dans le quartier Vert Bois), pour aller dans ce sens. Il faut donc appuyer simultanément sur le frein et l’accélérateur, c'est-à-dire tenir compte des dynamiques de marché sans s’y soumettre ! Enfin, dans les trois villes, nos interlocuteurs nous ont rappelé que même dans un marché globalement détendu voire atone, il pouvait y avoir des tensions sur certains segments du parc, notamment les logements individuels de qualité ou les logements collectifs bien conçus. A titre d’exemple, les logements locatifs privés de qualité se louent environ 11 ou 12 euros par m² à Saint-Dizier, ce qui offre des rendements locatifs tout à fait satisfaisants, compte tenu du niveau des prix d’achat. Même dans une ville moyenne, même en décroissance, il existe « des » marchés du logement. Qui sont les investisseurs présents dans ces villes ?Deux types sont bien connus par les trois protagonistes représentés : les investisseurs publics, soit directement soit via des aides publiques, et les absents ! Ils sont faciles à identifier : la plupart des investisseurs institutionnels, assureurs, banques et autres fonds d’investissement. Parmi les acteurs de l’immobilier, les promoteurs sont également absents de ces trois villes. Les autres investisseurs privés sont moins bien connus. Pourtant, ils constituent l’essentiel de l’investissement immobilier dans ces villes et au minimum 80% des sommes investies. Quand le marché est stable et relativement porteur, les collectivités locales ne s’attardent pas trop sur leur profil et ne cherchent pas à savoir qui ils sont dès lors que le marché est alimenté. A Cambrai, Stéphanie Magnier a bien expliqué comment, pendant de nombreuses années, la demande locale, le desserrement lillois et un parc relativement peu onéreux pour le département du Nord ont globalement suffit aux édiles locaux. Depuis 2012, la fermeture de la base aérienne 103 a complètement changé la donne du marché immobilier : la ville souffre du départ d’un millier de militaires. Depuis lors, il convient de trouver des stratagèmes pour attirer de nouveaux ménages, issus de l’agglomération ou d’ailleurs. De grands projets économiques sont en cours, avec la création d’un port sur le canal Seine-Nord-Europe et le projet, à Cambrai, d’une grande base logistique dont on attend environ 1300 emplois. Les résidences militaires forment de grands ensembles immobiliers qui sont restés longtemps en friche. En 2020, un premier site a été vendu à un investisseur cambrésien pour y construire des logements moyens et hauts de gamme. Ici, le salut vient d’abord des investisseurs locaux. Qui sont ces investisseurs locaux ? Ce sont des particuliers ou des petits professionnels qui peuvent acheter, puis louer de quelques unités à une trentaine, voire une quarantaine, de logements. Ces multi-propriétaires sont des partenaires incontournables des collectivités. A Auch, la municipalité collabore souvent de manière étroite avec eux pour concevoir des restructurations d'îlots, des opérations tiroir, etc. Il convient aussi de les aider ou de les inciter à entamer des travaux de rénovation ou d’amélioration : à Saint-Dizier, les héritiers de l’industrie de la fonderie restent de grands propriétaires fonciers et immobiliers, qui n’ont pas toujours une gestion très active de leurs biens. Accompagner les investisseursRepérer et discuter avec les gros investisseurs est assez facile, ils sont visibles, à moins d’être dissimulés derrière des sociétés civiles immobilières. Mais comment aider les petits ? Tel est le sujet des démarches de revitalisation des centres-villes, notamment à l’heure d’Action Cœur de Ville, programme national en direction des villes moyennes. A Saint-Dizier, la municipalité et la communauté d’agglomération œuvrent au développement d’un réseau de petits investisseurs, en les aidant à trouver un modèle économique viable. Tout d’abord, il s’agit de se rapprocher des propriétaires tentés par la rétention foncière, c’est-à-dire attendre une valorisation plus importante avant de vendre, ou affichant des prix de vente excessifs. Ensuite, il s’agit d’aider les investisseurs dans le montage financier et juridique des projets. Le projet d’opération programmée de l’habitat de renouvellement urbain (OPAH-RU) permet par exemple cet accompagnement et de concentrer des aides, notamment de l’Agence nationale de l’habitat (Anah) et d’Action Logement. Il faut faire connaître ces dispositifs et parfois apprendre aux propriétaires à jouer avec leurs modalités. Le dispositif fiscal Denormandie qui aide à la rénovation de logements en mauvais état et ou vides est limité à deux investissements par an et par investisseur : pour la réhabilitation d’un petit immeuble, il faut jouer sur les années civiles pour acquérir et rénover quatre logements, par exemple. A proximité du projet d’enfouissement des déchets nucléaires de Bure dans la Meuse, à une quarantaine de kilomètres de Saint-Dizier, les propriétaires peuvent également bénéficier d’aides spécifiques d’EDF. Au-delà de l’aide financière, il faut accompagner les propriétaires dans la définition du projet architectural. Des aides spécifiques existent pour la création d’extérieurs comme des balcons, pour la création d’accès indépendants aux logements situés au-dessus d’un commerce, pour l’installation d’ascenseurs dans les immeubles collectifs, etc. L’appui de la collectivité locale va jusqu’à proposer des services à la rédaction des contrats de location. Des investisseurs partout, mais dépendants de l’accompagnement des collectivités localesCes trois exemples montrent qu’il n’y a pas de territoires sans investisseurs ! Ils ne sont parfois pas nombreux, poursuivent des objectifs et des stratégies quelquefois peu en phase avec celles des collectivités, mais ils sont là. Par ailleurs, partout, sur certains segments du marché locatif, il est possible d’obtenir de bons rendements locatifs, grâce à une connaissance précise et presque intime des situations locales. La deuxième conclusion est que les mécanismes purement fiscaux ou financiers sont insuffisants pour réorienter la demande. L’accompagnement des investisseurs, sur le plan architectural, financier ou encore juridique est un élément-clé pour favoriser les projets. Cet accompagnement dépend directement de la bonne volonté et des compétences des acteurs publics locaux. Une interrogation persistante porte sur les effets potentiels du zéro artificialisation nette : le resserrement des droits à s’étaler va-t-il réorienter la demande vers les centres ? Probablement selon Sébastien Blanc, par effet mécanique de déplacement de la demande. Sans véritable certitude du côté de Saint-Dizier car la rétention foncière reste importante et les effets sur les prix seront certainement très lents. Une autre question porte sur le profil des investisseurs petits et moyens. Dans chacune des villes, ils sont individuellement connus. Mais finalement, quels sont leurs profils en termes d’âge, de trajectoires individuelles, de motivation, de patrimoine, etc. ? Ce type d’acteurs immobiliers reste assez mal appréhendé alors que certains financeurs des opérations disposent de riches données les concernant (Anah et Action Logement entre autres). Les échanges de ce séminaire ont montré qu’ils sont pourtant des acteurs-clés dans les villes moyennes. Xavier Desjardins - Acadie

CHERBOURG-EN-COTENTIN

... et en données

Quelques données Informations générales Maire : Benoît Arrivé (PS) EPCI : Communauté d’agglomération du Cotentin Siège de l’intercommunalité, présidée par David Margueritte (LR). PLH approuvé en 2019 (3e PLH approuvé) PLUi : en cours d’élaboration – Action cœur de ville : oui Délégation des aides à la pierre : département en délégation de type 3 5 principaux organismes de logements sociaux OPH (de La Manche et de Cherbourg-en-Cotentin), ESH (SA HLM Les Cités cherbourgeoises, SA HLM du Cotentin, SA HLM Coutances Granville)

Cherbourg-en-Cotentin dans l'OHV Replay du web-débat du 3 mars 2023

Logement abordable : à quel prix ? - L'OHV - IDHEAL - 3 mars 2023

L'habitat à Cherbourg-en-Cotentin en quelques mots ...

L'habitat à Cherbourg-en-Cotentin en quelques mots Cherbourg-en-Cotentin est une commune nouvelle, issue de la fusion des communes qui formaient la communauté urbaine de Cherbourg. Elle est la ville principale d’une intercommunalité de grande taille qui rassemble la majeure partie des communes de la presqu’île du Cotentin. La ville-centre a une longue tradition de politique locale de l’habitat, puisqu’elle a déjà connu trois générations de programmes locaux de l’habitat. Par ailleurs, elle est dotée d’un office public de l’habitat, maintenant intercommunal. Grâce à un parc de logements sociaux bien fourni, les temps d’attente sont relativement faibles, et le nombre de logements suroccupés également très faibles. Les dynamiques démographiques sont contrastées avec un centre en légère baisse démographique (- 0,5 % par an entre 2012 et 2017) et une hausse modeste dans la couronne périurbaine (+ 0,2 % par an) et la banlieue (+ 2,7 % par an). Malgré cette dynamique démographique plus favorable, les communes périurbaines ont un taux de logements inoccupés plus élevé, liés au nombre important de résidences secondaires. Les prix des logements sont relativement contenus, avec un prix médian de 1893 €/m² en 2020. Toutefois, cette situation conduit à des difficultés nombreuses, liées au taux élevé de pauvreté (à 14 % en 2018). Ainsi près d’un logement sur cinq est occupé par un ménage en situation de précarité énergétique. La situation du logement dans le Cotentin est également marquée par une réalité qui échappe en grande partie aux indicateurs statistiques habituels avec la présence d’un grand chantier, celui de l’EPR à Flamanville, qui a réuni parfois plus de 4400 travailleurs. Une partie d’entre eux loge uniquement une partie de la semaine à proximité du chantier, dynamisant le marché locatif, sur une durée beaucoup plus importante qu’initialement prévu, en raison des retards d’un peu plus d’une décennie de ce chantier.

Home

Article à partir du web-débat : Le logement abordable, à quel prix ? Philippe Estèbe - Acadie

Les séminaires de l'OHV Le logement abordable, à quel prix ? Avec les contributions de Maud Gallet, directrice de l’habitat d’Annemasse-Agglomération, Ludovic Derome, responsable de l’unité habitat-logement de Cherbourg-en-Cotentin et Camille Régnier, maîtresse de conférences en économie à l’Université de Paris-Est-Créteil, coordinatrice de l’équipe « Marchés du logement : dynamique d’usage des sols, dynamique des richesses, dynamique des prix » du programme de recherche Les défis économiques d’un foncier et d’un logement abordables (2022-2025). Selon Camille Régnier, maîtresse de conférences à l’université de Paris-Est Créteil, « il est généralement considéré dans la littérature internationale que le logement est un bien abordable dès lors que le taux d’effort des occupants ‑ locataires ou accédant à la propriété ‑ ne dépasse pas 30% ». Lorsqu’on l’on ne tient compte que des dépenses effectives[1], le taux d’effort moyen en France s’établissait, en 2015, à 19% du revenu des ménages : le logement y apparaît donc particulièrement abordable. Les comparaisons européennes conduisent même à classer la France parmi les bons élèves, au moins de ce point de vue[2]. Cependant, comme toute moyenne, celle-ci est trompeuse, en ce sens qu’elle masque trois paramètres qui font considérablement varier ce taux d’effort. Ainsi, le taux d’effort moyen d’un propriétaire qui n’a pas de remboursement d’emprunt en cours s’établit en moyenne à 10% de son revenu, alors que les locataires du marché libre doivent consacrer, en moyenne 30% de leur revenu au logement. Ce chiffre monte encore pour les plus modestes des locataires. Le fait que ces propriétaires dits non-accédants représentent environ 40% des ménages du pays tire fortement la moyenne vers le bas. Le deuxième paramètre de variation provient, selon Camille Régnier, de ce que le logement est un « bien non homothétique », autrement dit que son coût relatif varie en sens inverse du revenu : net des aides publiques, ce coût peut atteindre 40% du revenu des ménages les plus modestes (premier quartile de revenu) logés dans le parc privé ; alors qu’il n’est que de 9% pour les propriétaires non-accédants les plus aisés, c’est-à-dire le dernier quartile de revenu[3]. C’est chez les accédants modestes que le taux d’effort est le plus élevé. Ces deux points mettent en évidence les inégalités sociales et/ou générationnelles dans l’accès à un logement abordable. Mais ce ne sont pas les seules inégalités qui frappent les ménages en quête d’un logement. Le taux d’effort est en effet également étroitement dépendant du marché local du logement, on touche ici à des inégalités géographiques. Maud Gallet, directrice de l’habitat à Annemasse agglomération explique que la proximité de Genève, où le salaire minimum est trois fois supérieur au SMIC, fait fortement monter les prix du logement dans la partie française de l’agglomération transfrontalière. Ce phénomène conduit non seulement à limiter les possibilités de production de logement social (du fait du coût des terrains), mais aussi à exclure tendanciellement les ménages aux revenus moyens (déciles 4 à 8) du logement locatif et plus encore de l’accession à la propriété. Cette sélectivité limite les possibilités d’accès au logement notamment pour les « travailleurs essentiels » (par exemple, les personnels soignants), dont on sait combien ils sont nécessaires au bon fonctionnement de la ville. Symétriquement, Ludovic Derome, responsable de l’unité habitat/logement à la communauté d’agglomération du Cotentin, explique que le problème n’est pas tant le coût du logement à Cherbourg-en-Cotentin que celui de l’existence d’une offre correspondant aux attentes des familles, ces ménages de travailleurs qualifiés et de professions intermédiaires attirés par une activité économique en plein essor (énergie, construction navale et agroalimentaire). Pour ces différentes raisons, les deux villes ont décidé qu’il relevait de leur responsabilité d’intervenir dans la régulation du marché du logement de façon à produire une offre dite abordable. La notion de logement « abordable » revêt, dans chacun des contextes, une signification différente. Mais elle suppose dans les deux cas une intervention publique soutenue aux côtés d’opérateurs privés ou publics, hors du cadre balisé du logement social. Pourquoi pas des logements sociaux ?Plutôt que chercher à produire du logement abordable, intermédiaire entre le logement social et le logement libre, ne serait-il pas judicieux de construire plus de logements locatifs sociaux ? Le logement locatif social, propriété de bailleurs sociaux, n’est par nature pas spéculatif comme l’explique Maud Gallet, ce qui n’est pas le cas de beaucoup de logements en accession à la propriété, rendus plus abordables par une aide publique. Pourtant, à moyen terme et lors de la revente, les propriétaires peuvent bénéficier d’une plus-value importante quand bien même ils avaient bénéficié d’un prix décoté. Pour autant, le logement social ne résout pas tout. D’une part, il faut tout simplement pouvoir en construire, ce qui est difficile à Annemasse en raison du prix des terrains. D’autre part, les locataires du secteur HLM ont tendance à y rester le plus longtemps possible. Sauf s’ils trouvent un travail en Suisse, ils savent qu’ils ne pourront pas se reloger dans d’autres segments du marché. En conséquence, le taux de rotation dans le logement social est très bas et la place manque pour accueillir les travailleurs clés. Par ailleurs, le logement social a ses contraintes que tous les ménages n’acceptent pas : il faut s’inscrire sur une liste d’attente et on ne choisit pas vraiment son logement. Autre type d'écueil à Cherbourg-en-Cotentin, les montages ne sont pas toujours adaptés aux besoins ou souhaits des ménages. Les logements bénéficiant d’un prêt social location-accession (PSLA) et qui permettent à des locataires du parc social d’acquérir leur logement au bout de quelques années, souvent proche de la ville-centre, ne trouvent pas bien leur place. Malgré la décote, ils sont concurrencés par le marché de la construction et de l’accession de maisons individuelles en périphérie. Les politiques publiques peinent à remplir leur ambitieux objectif de développer une offre permettant aux classes moyennes d’accéder à la propriété avec un taux d’effort réduit, tout en préservant le sentiment d’une certaine liberté de choix résidentiel et en offrant un environnement urbain attractif. Un segment du marché régulé par la puissance publiqueCe segment « abordable » n’apparaît pas spontanément dans un marché fortement polarisé entre parc privé et parc social. Il faut donc le créer. A Annemasse, cette cible se précise au fil des différents programmes locaux de l’habitat, dont le quatrième est en cours. Toutes les opérations neuves se répartissent désormais en trois tiers : logement social, logement libre et logement abordable. Pour produire ce troisième segment du marché, les acteurs publics locaux utilisent une grande diversité de dispositifs réglementaires et/ou législatifs définis à l’échelle nationale pas tous toujours bien adaptés au contexte local. La palette est variée et s’enrichit : prêt social location-accession, accession sociale, TVA réduite en quartier politique de la ville et plus récemment, bail réel solidaire[4] (BRS) et même investissement des ménages avec le Pinel. A Cherbourg, on tente aussi des opérations de rénovation des immeubles vétustes ou insalubres, mais cette solution onéreuse, ne permet de produire des logements qu’en petite quantité. A Annemasse, la combinaison des différents dispositifs permet d’offrir des logements neufs « abordables » au prix de 3300euros/m² (contre un prix moyen dans l’ancien de 3000euros du m2 et des prix du neuf supérieurs à 4000euros). Mais pour parvenir à ce prix, il faut dépasser la définition nationale des produits proposés. Pour ce faire, la communauté d’agglomération minore, à sa charge, le prix des charges foncières des terrains destinés à la production de logements abordables dans la principale ZAC de l’agglomération (Annemasse Etoile, 1200 logements d’ici 2031). La question est moins prégnante à Cherbourg-en-Cotentin, en raison de prix du foncier moindres, mais elle se pose et va se poser de plus en plus pour répondre aux exigences de sobriété foncière. Dans le Cotentin, c’est la maison individuelle qui a, jusqu’ici, fait office de logement abordable ; désormais il va falloir répondre aux exigences de sobriété en refaisant la ville sur la ville, sans plus s’étaler. Il est vraisemblable que ce marché « régulé », entre le logement social et le marché libre, va jouer un rôle croissant dans un contexte prévisible, de hausse des prix des terrains, des matériaux, de l’énergie et des taux d’intérêt. Dans cette optique, les deux villes plébiscitent la formule du BRS, qui réduit le coût du foncier, en limite l’augmentation et, surtout, empêche la spéculation. A condition de pouvoir disposer des moyens de maîtrise des sols, c’est un instrument d’avenir, évidemment dans les marchés tendus et, à terme, dans un nombre croissant d’agglomérations. Philippe Estèbe - Acadie [1] Les dépenses effectives pour les locataires comprennent le loyer et les charges ; pour les propriétaires les remboursements d’emprunt, les charges de copropriété et les taxes foncières ; pour tous les ménages les dépenses d’eau et d’énergie affectées au logement. Un autre indicateur permet d’évaluer le coût de l’usage du bien par son propriétaire comme l’équivalent du loyer auquel il renonce pour occuper son logement. [2] « Taux d’effort en logement : en prenant en compte le coût du service du logement, les propriétaires français sont bien placés en Europe », INSEE Analyses, n°39, 18/07/2018. [3] Ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chiffre clés du logement 2022. [4] Le bail réel solidaire (BRS) créé par la loi du 6/08/2015 est un dispositif fondé sur la dissociation de la propriété du sol et de celle du bâti. Les ménages achètent un logement et louent le terrain à un organisme foncier solidaire, dans le cadre d’un bail de 18 à 99 ans. Cette dissociation permet de réduire le coût d’acquisition de 20 à 40%. Les ménages éligibles doivent se situer en dessous d’un plafond de ressources, variable selon le territoire et la composition de la famille. Le prix de revente est limité au prix d’achat actualisé.

DRAGUIGNAN

... et en données

Quelques données Informations générales : Maire : Richard Strambio (DVD) EPCI : Dracénie Provence Verdon Agglomération Siège de l’intercommunalité, présidée par Richard Strambio (DVD). PLH approuvé en 2018 (2e PLH approuvé) PLUi : aucun - Plan « Action cœur de ville » : oui Délégation des aides à la pierre : collectivité en délégation de type 3 3 principaux organismes de logements sociaux OPH (du Var), ESH (1001 Vies Habitat Var), SEM (SAIEM Draguignan)

L'habitat à Draguignan en quelques mots ...

L'habitat à Draguignan en quelques mots Une ville attractive ! Entre 2012 et 2017, la ville-centre gagne près de 1800 habitants, presque 1000 pour les six communes qui forment une continuité urbaine avec Draguignan. Résultat surprenant de la statistique : la couronne périurbaine ne comprend ici que trois communes. Mais bien évidemment, cela est davantage les résultat des choix statistiques de l’INSEE que révélateur d’une forme de contingentement des relations domicile-travail dans un espace relativement réduit : Draguignan est inséré dans des flux particulièrement intenses entre l’aire urbaine de Toulon et les Alpes-Maritimes. La ville-centre se densifie assez fortement. Les logements sociaux sont en proportion relativement faibles, alors que le taux de pauvreté est élevé (19 % à Draguignan). Le temps d’attente pour un logement social est très élevé pour une ville de cette taille : plus de 6 ans ! Le prix de vente médian dans l’ancien est relativement élevé également par rapport à cette strate démographique, plus de 2000 euros. Dans ce contexte, la communauté d’agglomération s’est saisie assez précocement pour un territoire de cette strate démographique de nombreux outils des politiques d’habitat. Si la communauté n’a pas réalisé de plan local d’urbanisme intercommunal, elle connaît actuellement un deuxième programme local de l’habitat qui met l’accent sur la hausse du nombre de logements aidés (locatifs sociaux ou accession) et le réinvestissement des quartiers anciens. Malgré une dynamique de densification marquée, l’artificialisation des sols reste importante en raison de la vigueur de l’attractivité démographique. Pour répondre à une diminution de l’artificialisation des sols, ce territoire va-t-il accélérer les dynamiques de densification ou va-t-on connaître un report de la croissance vers le nord, comme on a déjà connu un effet de report de l’attractivité littorale vers les territoires rétro-littoraux comme Draguignan et ses environs ?

Home

DUNKERQUE

... et en données

Quelques données Informations générales : Maire : Patrice Vergriete (SE-DVG) EPCI : Dunkerque Grand Littoral (communauté urbaine) Siège de l’intercommunalité, présidée par Patrice Vergriete (SE-DVG). PLH approuvé en 2013 (2e PLH approuvé) en cours de révision PLUi : en cours d’élaboration - Plan « Action cœur de ville » : oui Délégation des aides à la pierre : collectivité en délégation de type 3. 4 principaux organismes de logements sociaux OPH (du Nord), ESH (Le cottage social des Flandres, SA HLM Habitat du Nord), Action Logement (Flandre Opale Habitat)

Dunkerque dans l'OHV Replay du web-débat du 17 mai 2022

L'habitat dunkerquois en quelques mots ...

L'habitat dunkerquois en quelques mots La trajectoire de Dunkerque (87 000 habitants et 240 000 dans l’aire urbaine) est celle de toutes les villes en décroissance : la ville centre et la banlieue perdent des habitants (plus de 3000 habitants entre 2012 et 2017), quoique de manière moins intense que lors des cinq années précédentes ; une partie des ménages partant se dirige vers la couronne périurbaine. Le revenu médian est un des plus bas de l’échantillon et le taux de pauvreté est l’un des plus élevés. Grâce à une part importante de logements sociaux, le temps d’attente d’une attribution, tout en étant en croissance, reste raisonnable au regard du reste de l’échantillon ; elle est cependant considérée comme insuffisante au regard du profil des ménages et de la croissance de la demande. Le parc ancien privé reste accessible dès le deuxième décile de revenu, mais l’offre de locatif privé est faible. Dans le même temps, aussi bien en banlieue que dans le périurbain, le nombre de ménages continue d’augmenter, ce qui soutient la demande de logements. La production de logements neufs est cependant en baisse tendancielle depuis 2010. Par ailleurs, la communauté urbaine de Dunkerque fait face à des enjeux spécifiques, liés à sa position géographique et son activité portuaire, qui se traduisent par une présence importante de personnes souhaitant gagner l’Angleterre ; l’offre d’hébergement est régulièrement saturée, entraînant une augmentation des nuitées d’hôtel. La communauté urbaine de Dunkerque est un territoire riche, grâce aux activités industrielles et portuaires, ce qui lui permet de mettre en œuvre une politique du logement volontaire. Les pouvoirs publics locaux ne se résolvent pas au déclin démographique, et affichent l’ambition de redresser la courbe. Malgré le déclin démographique, Dunkerque demeure un pôle d’emploi dynamique, d’où l’objectif du programme local de l’habitat de « conquérir » les actifs non-résidents, et de maintenir les seniors et les jeunes. Au total, le PLH de 2013, en révision, prévoyait la production de 600 logements par an dont 40% de logements sociaux. Au vu des données disponibles, la production de logements neuf est restée en deçà de cet objectif, autour de 500 logements par an. Le PLH pointe une des raisons de cette sous-performance relative : le manque de foncier, lié au souci de donner la priorité au renouvellement urbain au cours de la période 2008-2013. C’est pourquoi le PLH de 2013 se proposait d’ouvrir plus de foncier en extension urbaine, de façon à rendre l’offre de l’agglomération dense concurrentielle avec celle de la couronne périurbaine où l’accueil de ménages se fait dans des espaces de très basse densité (12 ménages supplémentaires par km² artificialisé). Pour l’instant, cela n’a, apparemment, pas suffi à hisser la production nouvelle à hauteur des ambitions communautaires.

Home

Article sur le web-débat : Rentrer chez soi, articulation entre les politiques de l'habitat et politiques des mobilités, Xavier Desjardins - Acadie

Les séminaires de l'OHV Rentrer chez soi : habitat et mobilités dans les politiques locales Avec les contributions de Sylvain Simonet, chef de service habitat social à la direction habitat et logement de la Communauté urbaine de Dunkerque, Artur-Jorge Bras, maire-adjoint à l'habitat, à l'urbanisme, au logement, à la rénovation urbaine, à la politique de la ville, à la mobilité et aux transports à la ville de Meaux et Arnaud Passalacqua, professeur à l'Ecole d'Urbanisme de Paris et co-président de l'Observatoire des Villes du Transport Gratuit De la difficulté de parler habitat ET mobilitéEn 2023, seul un tiers environ des habitants de la communauté urbaine de Dunkerque habite à moins de trois cents mètres d’un arrêt d’autobus desservi avec une fréquence inférieure à une dizaine de minutes en heure de pointe. Cette fréquence et cette distance aux arrêts sont considérés comme des critères de définition d’une « bonne desserte ». Depuis quelques années, la communauté urbaine de Dunkerque a ajouté à ces avantages, la gratuité de son réseau. L’objectif est social, pour faciliter la mobilité des plus pauvres. Il est aussi urbain, en ce qu’il vise à renforcer l’attractivité résidentielle de la partie desservie de l’agglomération, notamment vis-à-vis des communes périurbaines. Une telle décision en matière de transport est-elle susceptible de changer les dynamiques résidentielles ? Habitat et mobilité : les deux sujets sont évidemment intimement liés. La qualité d’un logement est souvent évaluée par ses occupants au regard de sa localisation et des accès aux « ressources » du territoire qu’elle permet. Quand on choisit son logement, on évalue la distance à une route rapide, la dangerosité potentielle des axes à emprunter, la présence ou non d’une gare. Bref, les deux composantes sont toujours considérées « ensemble » dans la vie quotidienne. Cette préoccupation apparaît-elle dans les politiques publiques locales ? A la fois oui et non. Oui, parce que les élus locaux ont évidemment conscience de cette dépendance mutuelle entre « ce qui est fixe » et « ce qui bouge » et en débattent, notamment lors de la réalisation des documents d’urbanisme. Mais non, parce que les politiques publiques, même locales, sont tellement technicisées et spécialisées, qu’il est bien difficile de trouver un interlocuteur qui se sente à l’aise pour évoquer avec précision les aspects relatifs à la fois au logement et au transport. Même si nous avions rassuré nos interlocuteurs de l’OHV en soulignant que nous ne voulions pas une approche « technique » de ces sujets, mais débattre des enjeux stratégiques de la mise en regard des politiques de mobilité et d’habitat, la difficulté à trouver des intervenants nous a confirmé, si besoin en était, l’incongruité administrative et technique de leur mise en synergie. Le propos de nos intervenants est donc rare et, de ce fait, particulièrement intéressant. Ils relèvent de trois sphères différentes : un technicien, Sylvain Simonet, chef de service « habitat social » à la direction de l’habitat et du logement de la communauté urbaine de Dunkerque ; un élu, Artur Jorge Bras, maire-adjoint à l'habitat, à l'urbanisme, au logement, à la rénovation urbaine, à la politique de la ville, à la mobilité et aux transports à la Ville de Meaux et un universitaire, Arnaud Passalacqua, historien et professeur à l’école d’urbanisme de Paris. Les deux terrains choisis permettent de questionner deux des projets parmi les plus débattus en France en matière de transport public au cours de la dernière décennie : l’intérêt de la gratuité, après l’exemple de Dunkerque, et l’amélioration du réseau de transport ferroviaire francilien, qui va au-delà du projet de réaliser les 200 kilomètres de ligne nouvelle du Grand Paris Express. Par ailleurs, ces exemples permettent de tester dans des contextes urbains très différents, la manière dont l’habitat et la mobilité sont pensés ensemble. En effet, le nombre de voyages réalisés par habitant et par an en transports collectifs au sein de la communauté urbaine de Dunkerque est de 73 contre près de 380 pour l’ensemble de l’Ile-de-France. Indispensable patience ?En Ile-de-France comme à Dunkerque, les évolutions du marché de l’habitat et les orientations actuelles des politiques de transport suivent parfois des voies divergentes. A Dunkerque, l’attractivité résidentielle résiste dans les communes périurbaines alors que la partie centrale de l’agglomération, pourtant bien desservie par les transports publics, perd des habitants. Entre 2012 et 2017, la commune de Dunkerque a ainsi perdu 0,8% d’habitants par an quand les 46 communes de la couronne périurbaine gagnaient 0,4% d’habitants par an. A Meaux, c’est plutôt le marché de l’emploi, et donc les trajets domicile-travail, qui tend à se dissocier des axes de transport public : les pôles d’emploi de Roissy au nord-ouest surtout, mais aussi de Marne-la-Vallée au sud, attirent de plus en plus d’habitants qui déménagent de cette commune. Or, le réseau de transport public est peu efficace, hormis des lignes d’autobus, pour ces trajets internes à la grande couronne, mais non radiaux. De plus, le développement résidentiel périurbain autour de Meaux est intense, notamment dans des communes non desservies par le train et souvent mal irriguées par les voies de bus. Face à ces tendances lourdes, les collectivités locales ne sont pas inactives. A Meaux, la communauté d’agglomération travaille avec celle de Roissy, à 40 km, pour améliorer les relations. Un groupe d’intérêt public a été créé pour faire dialoguer quatre intercommunalités du nord-est francilien autour du développement économique, de l’habitat et des mobilités. A terme, ces discussions devraient conduire à un schéma de cohérence territoriale partagé. Un objectif majeur est le renforcement des liens, notamment par la création d’un lycée sur les métiers de l’aéroport à Meaux et des liaisons d’autobus entre Meaux et Roissy. Ces politiques sont indispensables, mais on le pressent aisément : elles ne peuvent avoir des résultats que sur le long terme. Difficile d’anticiper des effets, comme de faire évoluer rapidement l’offre, même sur des réseaux existants : Artur-Jorge Bras rappelle qu’il faut près de cinq ans et déployer des heures et des trésors de négociations pour ajouter un train sur un axe aussi emprunté que celui qui part de la gare de l’Est à Paris vers Meaux puis Château-Thierry. Et ce sans compter sur les renvois de responsabilité entre la multitude des intervenants, l’autorité organisatrice des transports Ile-de-France Mobilités, mais également les diverses composantes (Gares et Connexions, Réseau, Transilien) du groupe SNCF. Tactiques pour des résultats de court termeLes rapports entre habitat et transports ne peuvent-ils être pensés que sur des projets de long terme ? Non, fort heureusement. Les participants ont évoqué de nombreuses pistes pour avancer plus vite. A Meaux, une charte avec les promoteurs a été rédigée pour mieux concevoir les espaces pour le stationnement des vélos. Dans le cadre de la rénovation urbaine du quartier de Beauval, dans le centre-ville de Meaux, une ligne en site propre a été mise en place pour relier le quartier à la gare. Un travail avec Transdev et Ile-de-France mobilités est engagé pour la réorganisation des réseaux d’autobus. Un réseau de pistes cyclables est en cours de déploiement, ici « sans prise d’espace public au détriment de la voiture (sauf le stationnement) » : ce choix est justifié par l’importance de l’automobile dans les déplacements locaux. La gratuité n’a pas partout le même prixPar ailleurs, il existe une autre piste pour accorder ensemble mobilité et habitat : la gratuité des transports publics qui inciterait logiquement à aller habiter là où mène cette offre pratique, efficace et indolore pour le budget des ménages. Alors que la question de la gratuité suscite de – légitimes – débats idéologiques, Arnaud Passalacqua a mis ce service ou cette aubaine en perspective : elle n’est gratuite qu’en apparence et ne l’est que pour l’usager, car bien sûr l’utilisation des routes, la fourniture et le fonctionnement des véhicules a un coût. Elle existe déjà dans le domaine des transports, de manière variée : de nombreuses routes sont d’un usage gratuit, certaines villes proposent la gratuité pour la location de vélos, etc. En matière de transport public, l’impact de la gratuité sur les finances publiques est également très contrasté : elle ne coûte qu’une dizaine de millions d’euros dans le « petit » réseau d’autobus dunkerquois, alors que les ventes de billets et d’abonnements à la charge des usagers représentent près d’un quart du financement du réseau de transport public francilien, soit plus de 2,5 milliards d’euros. La gratuité n'a donc pas partout le même prix ! Par ailleurs, l’impact de la gratuité du transport public sur l’usage est variable en fonction d’autres paramètres : non accompagnée d’un renforcement de l’offre, elle pourrait conduire à diminuer la part des déplacements à courte distance effectués à pied… Bref, la gratuité n’a pas de sens en soi : elle doit être pensée dans un ensemble plus vaste de décisions publiques et s’insérer dans un projet urbain global. C’est le cas à Dunkerque où elle est une composante du plan de renforcement de l’attractivité du centre urbain. L’ajustement des temporalitésEn matière de transport, les investissements ne sont pas toujours réalisés pour satisfaire la demande telle qu’elle s’exprime actuellement, mais pour anticiper des besoins et les orienter, lorsqu’ils apparaissent, vers des modes « moins énergivores ». L’ajustement entre les politiques d’habitat et de mobilité est donc complexe à mettre en œuvre en raison de trois temporalités distinctes : la temporalité des modes de vie et des représentations sociales, qui peut avoir de brusques à-coups comme avec la crise sanitaire qui a eu un effet démultiplicateur net sur l’usage du vélo, la temporalité de l’évolution des réseaux, de l’ordre d’une décennie au minimum, enfin, la temporalité de la fabrique urbaine, encore plus lente. Qui gouverne la relation entre mobilité et habitat ?Si habitat et mobilité sont complexes à relier, le séminaire fait apparaître une similitude inattendue entre les deux domaines : la focalisation politique locale se réalise fortement sur un segment minoritaire de l’offre. Le transport public intéresse beaucoup, tout comme le logement social. Ils sont évidemment des composantes majeures de la fabrique urbaine. Mais pour les autres éléments des marchés de la mobilité et du logement, n’observe-t-on pas qu’ils sont « sous » ou « non » gouvernés ? L’automobile, pourtant ultra-dominante dans les parts de déplacement et la vie quotidienne des habitants, apparaît peu régulée par des décisions locales, hormis l’importante question du stationnement. Cela n'apparaît-il pas nettement quand on observe la mise en relation entre habitat et mobilité ? Dans le domaine de l’habitat, plusieurs métropoles se montrent intéressées par le statut d’autorité organisatrice de l’habitat (AOH), une « boite » introduite par la loi 3DS de février 2022 qui reste à remplir de compétences possiblement déléguées par l’Etat. Après Brest, Rennes, Lyon et Nice qui tentent d’en définir les contours, Reims et Chalon-sur-Saône avancent leurs pions. 16 intercommunalités remplissent les prérequis nécessaires à ce jour. A la manière des autorités organisatrices de la mobilité (AOM), il peut être intéressant d’accroître le pouvoir local en matière d’habitat. Sans toutefois se payer de mots : les autorités locales ne sont guère « organisatrices » de la mobilité. Elles sont des composantes importantes du système, mais non l’acteur de son devenir. Elles ne sont pas non plus forcément un modèle pour les AOH, alors même que les réflexions et la volonté de l’Etat se précisent dans le sens d’une décentralisation renforcée de la politique du logement. Xavier Desjardins - Acadie

LES SABLES D'OLONNE

... et en données

Quelques données Informations générales : Maire : Yannick Moreau (LR-SE) EPCI : Les Sables-d’Olonne-Agglomération Siège de l’intercommunalité, présidée par Yannick Moreau (LR-SE). PLH approuvé en 2014 (premier PLH approuvé) en cours de révision PLUi : aucun – Plan « Action cœur de ville » : non Délégation des aides à la pierre : département en délégation de type 2. 2 principaux organismes de logements sociaux OPH (de la Vendée), ESH (Vendée logement)

La vision de l'OHV Monographie des Sables d'Olonne Les Sables d'Olonne : sortir d'un confort touristique trompeur, Philippe Estèbe et Jules Peter-Jan - Acadie

Les Sables-d’Olonne : sortir d’un confort touristique trompeur Le logement aux Sables-d’Olonne est une affaire de vases… qui ne communiquent pas. Selon le maire, Yannick Moreau (divers droite) cité par Ouest France, dans le centre-ville, la part des résidences secondaires est passée, en trente ans, de 25% à 75% des logements. Le prix du m² a crû de 50% en dix ans. Sur le front de mer du Remblai, un studio « idéal pour un investisseur » se négocie à 10 000 euros au m² et en cœur de ville, le m² atteint facilement 5 000 euros. Le reste du marché immobilier s’organise en couronnes dans l’agglomération. Le rendement de la location de courte durée est tel que le processus de développement des résidences secondaires et des locations touristiques devient extrêmement difficile à inverser. Ce phénomène spéculatif entraîne des conséquences en cascade. La concurrence entre marchésLes gestionnaires de copropriétés doivent par exemple redoubler d’attention et de diplomatie pour trouver des points d’accord entre résidents permanents et résidents temporaires, et concilier les intérêts des occupants et des bailleurs : qualité de vie et confort quotidien du côté des propriétaires occupants, haut rendement et faibles charges du côté des bailleurs. Les résidents de l’été n’ont pas la même conception du confort et de l’usage du logement que ceux qui y vivent toute l’année. Ces divergences, courantes dans les copropriétés, s’exacerbent aux Sables-d’Olonne du fait du taux élevé de résidences secondaires et de la vacance que leur occupation temporaire génère pendant une bonne partie de l’année. Les conditions de dégradation et d’entretien du patrimoine bâti peuvent s’en ressentir : la prépondérance de ce statut dans certaines copropriétés rend par exemple impossible le montage de dossiers collectifs pour bénéficier de l’aide « Ma Prime Rénov’ », d’où un retard pris dans la rénovation thermique des immeubles. D’autres conséquences se font durement sentir sur le marché immobilier. Entre la part des propriétaires occupants (66,4% des résidences principales en 2019 dans toute l’agglomération) et celle des locations de courte durée, la location permanente ne trouve plus sa place et n’occupe plus qu’un très mince segment du marché. Tous ceux que les sociologues urbains appellent les travailleurs essentiels (soignants, pompiers, employés des services publics et privés, artisans, commerçants, enseignants) trouvent ainsi difficilement à se loger en dehors du marché de l’accession à la propriété, qui se déporte, plus qu’ailleurs, en grande périphérie. Ces ménages ont d’autant plus tendance à s’éloigner, pour payer moins cher, que le rattrapage du déficit en logements sociaux (7,5% du parc de résidences principales, selon les chiffres du registre permanent du logement social) est très lent. En cause, le prix des terrains mais aussi le manque d’anticipation des municipalités successives. Les saisonniers, dont le nombre peut atteindre 4 000 tout au long de la saison d’été, sont les parents pauvres de ce marché étroit, comme dans toutes les villes touristiques. Globalement, les parcours résidentiels sont très compliqués aux Sables-d’Olonne en raison de cycles d’achat-vente très tendus. Autant pour les jeunes actifs qui souhaitent quitter le logement locatif pour accéder à la propriété que pour les retraités qui vendent leurs grands logements pour accéder à des résidences plus centrales et plus adaptées, qui habite réellement les Sables d’Olonne ? Il n’est enfin pas facile de gouverner une ville dont la population oscille entre 45 000 habitants l’hiver et 250 000 l’été. C’est le sort de toutes les villes touristiques et balnéaires, que la montée en puissance des plateformes de location temporaire est venue exacerber. La vieille question de science politique — qui gouverne ? — est devenue, aux Sables-d’Olonne « qui est gouverné ? ». Pour paraphraser Zygmunt Bauman, les Sables-d’Olonne n’est plus une ville « solide » mais une ville « liquide », caractérisée par une fluidité permanente de ses habitants, de ses logements, de ses usages. Cette situation s’explique en grande partie par l’histoire locale récente, politique et institutionnelle. La commune est le produit d’une fusion qui, en 2019, a regroupé les trois communes des Sables-d’Olonne, d’Olonne-sur-Mer et de Château-d'Olonne. Des trois, de taille comparable (autour de 14 000 habitants) est née une ville de 45 000 habitants (au sens du recensement). Les trois communes au territoire seulement limité par la loi Littoral[1] avaient laissé largement les opérateurs de l’immobilier (ménages, promoteurs, bailleurs privés) opérer à leur guise. Dès lors que la croissance de l’habitat apportait des ressources aux communes, les villes n’accordaient pas grande importance, ni à la régulation en termes d’urbanisme, ni à la concurrence éventuelle entre projets. Le changement d’échelle a apporté à la nouvelle municipalité des capacités à agir, plus de moyens (la communauté de communes devient une communauté d’agglomération) et de nouvelles perspectives stratégiques. Mais il change le point de vue sur la situation du territoire, et… le soumet à l’article 55 de la loi Solidarité et renouvellement urbain (SRU) : compte tenu de sa taille, la nouvelle commune accuse un déficit de 4 100 logements sociaux ! Changer de trajectoire ?La question du logement social n’est pas le seul problème. Le débat politique se cristallise autour du devenir de cette nouvelle commune : va-t-elle conforter sa vocation résidentielle peu ou mal régulée ou bien tenter de tracer un chemin différent ? A travers les documents de programmation, les élus construisent une figure qui s’inscrit à rebours de la tendance constatée ces dernières années. Le virage envisagé est même brutal : alors que l’agglomération suivait une trajectoire démographique dynamique (du moins sur le papier, dès lors que la moitié des résidents ne sont pas permanents), les élus souhaitent désormais la ralentir et mieux répartir la population : le SCoT, dont le PADD a été débattu en conseil communautaire en 2021, prévoit d’accueillir 10 000 habitants supplémentaires et de réduire la production de logements au cours des vingt prochaines années. Alors que les nouveaux arrivants sont essentiellement des retraités, les élus aimeraient loger des actifs. Alors que les résidences secondaires et les locations temporaires phagocytent le marché du logement, les élus souhaitent réduire la part des résidences secondaires et favoriser l’installation d’habitants permanents. Deux contraintes s’ajoutent à ces objectifs politiques : combler le déficit en logements sociaux et entrer dans l’ère de la sobriété foncière. Quels sont les leviers qui permettent à l’institution municipale et communautaire de mettre en œuvre cet objectif ? D’abord, il faut négocier avec les services de l’État pour éviter le classement de la commune en “carencée SRU”. Aujourd’hui, la ville est soumise à une amende de 900 000euros par an pour déficit de logement social. Si l’objectif du PLH de construction de 300 logements par an est respecté, il faudrait pendant 12 ans, ne produire que des logements sociaux pour résorber le déficit et atteindre les 25% définis par la loi ; ce n’est, selon les élus, ni faisable, ni souhaitable, même en utilisant les subtilités d’une définition large du logement social. Un compromis doit être trouvé ; il ne l’est pas encore. Il faut ensuite négocier avec les propriétaires pour les inciter à remettre leurs logements sur le marché du locatif longue durée (« le logement à l’année »), particulièrement avec ceux qui surfent sur le marché juteux de la location temporaire. Le maire brandit, selon ses propres termes, des « carottes » et des « bâtons ». Côté bâton, la Ville et l’Agglomération articulent différentes mesures coercitives. C’est d’abord la mise en place d’un plafonnement du nombre de locations de tourisme pour stopper leur croissance, avec des quotas par secteurs. La Ville et l’Agglomération souhaitent également utiliser la fiscalité locale, avec l’instauration d’une taxe d’habitation sur les logements vacants, qui pourrait s’appliquer également aux résidences secondaires avec une majoration pouvant aller jusqu’à 60%, sous réserve d’une autorisation de l’Etat qui n’est pas encore acquise et dont la discussion a été repoussée au printemps 2023. Côté carotte, la municipalité, sur le modèle de Saint-Malo, met en œuvre un dispositif d’incitation au développement de locations à l’année intitulé « Louez l’année » : de 5 000 à 10 000 euros de bonus pour les propriétaires acceptant de sortir du système de la location temporaire pour une durée d’au moins 3 ans, à quoi s’ajoutent des bonifications de primes pour la rénovation thermique et une possible intervention des aides de l’Anah via l’OPAH. Une centaine de logements sont entrés dans le dispositif à ce jour. La ville pourra-t-elle infléchir une trajectoire incontrôlée jusqu’alors ? Il faut accepter, selon les élus, de sortir d’une économie essentiellement tournée vers le tourisme, les résidences secondaires et l’accueil de retraités souvent aisés. Mais quelles sont les options possibles, dans un territoire contraint par l’océan d’un côté et des zones humides de l’autre ? Première piste à suivre : faire évoluer le modèle de consommation touristique, en privilégiant les hébergements hôteliers et limiter l’usage de la voiture : des investissements sont en cours pour accroître la capacité des parkings en entrée de villes et le nombre de navettes les desservant. Deuxième proposition : améliorer considérablement l’accueil des saisonniers et faciliter leur logement pour à terme en faire des habitants permanents. Un dispositif porté par la SEM Les Sables d'Olonne Développement, « Louez l’été », associe les entreprises et les recruteurs du territoire dans ce sens. Les élus envisagent (comme dans beaucoup de villes moyennes) le développement de l’enseignement supérieur, en partenariat avec Nantes et La Rochelle, ce qui suppose aussi une capacité nouvelle d’hébergement. Les politiques de l’habitat sont au cœur de cette nouvelle donne stratégique pour l’agglomération, et l’enjeu de l’accès au logement devient plus que jamais une donnée clé de l’habitabilité de la ville et du fonctionnement de ses services publics et de son économie. La volonté politique de ralentir la croissance urbaine, pour mieux la maîtriser, se couple à la mise en œuvre de dispositifs incitatifs pour maîtriser le développement de l’habitat temporaire, qui ont pour objectif de faire effet levier. La capacité d’enclenchement par le marché privé et les propriétaires reste un défi pour amplifier ces objectifs. Philippe Estèbe & Jules Peter-Jan - Acadie [1] Loi relative à l’aménagement, la protection et la mise en valeur du littoral, dite loi Littoral, loi n°86-2 du 3 janvier 1989.

L'habitat olonnais en quelques mots ...

L'habitat olonnais en quelques mots Les Sables-d’Olonne, 50 000 habitants dans l’intercommunalité, dont 44 000 dans la ville centre, présentent un profil particulier. 40% des logements de la ville centre sont des résidences secondaires et ne sont occupés qu’une partie de l’année. Le prix du m² dans l’ancien dépasse 3400€. La propriété n’est accessible qu’à la partie la plus aisée de la population. Dans le même temps, le logement social n’existe qu’à l’état de traces (moins de 5% du parc) et près de 70% des ménages sont propriétaires de leur logement. La démographie de la commune et de l’EPCI est dynamique (+1,3% par an, soit près de 600 personnes en plus), grâce au solde migratoire, le solde naturel étant négatif. 44% de la population est âgée de plus de soixante ans, et la médiane du revenu est supérieure à 22 000€ par unité de consommation. Il s’agit donc d’une commune qui s’est spécialisée dans l’accueil, permanent ou saisonnier, de ménages de personnes âgées et de retraités aisés. Et ceci, dans un environnement de qualité : la densité moyenne de la ville centre est de 517 habitants au km², ce qui en fait sans doute l’une des villes les moins denses de sa catégorie. Cette spécialisation s’affirme (du moins s’agissant de la faible densité) : ces dix dernières années, ce sont moins de 30 ménages par hectare qui ont été accueillis dans la ville centre. La densité des nouveaux logements est encore plus basse dans la couronne périurbaine (17 logements à l’hectare). Jusqu’à présent, la ville et la communauté d’agglomération n’ont guère mobilisé les instruments pour réguler le marché du logement et organiser le foncier. Un PLH est en révision et un PLUi est en préparation, qui vise à limiter l’urbanisation. Cet objectif, déjà présent dans le SCoT est légitime et nécessaire, au regard de la qualité environnementale des milieux. Mais il va contribuer à un accroissement des prix du foncier, rendant le logement encore moins accessible. Un effort de densification et de production de logements abordables sera sans doute nécessaire.

Home

LIBOURNE

... et en données

Quelques données Informations générales : Maire : Philippe Buisson (PS) EPCI : Communauté d’agglomération du Libournais Siège de l’intercommunalité, présidée par Philippe Buisson (PS). PLH approuvé en 2018 (2e PLH approuvé) PLUi : aucun - Plan « Action cœur de ville » : oui Délégation des aides à la pierre : département en délégation de type 2. 6 principaux organismes de logements sociaux OPH (de la Gironde), Action Logement (Noalis, Domofrance, Clairsienne), ESH (ICF Habitat, Mesolia)

Libourne dans l'OHV Replay du web-débat du 30 juin 2022

L'habitat libournais en quelques mots ...

L'habitat libournais en quelques mots Libourne est une commune populaire (45% des habitants de la commune font partie de ménages d’ouvriers ou d’employés) dans un environnement d’une grande richesse : le terroir de Saint-Émilion occupe 1/3 de la superficie, un autre 1/3 étant en zone inondable. Les marges de manœuvre de la commune sont faibles, ce qui au regard de sa démographie (1000 habitants de plus en 5 ans) en explique la forte densité en l’absence de report vers des périphéries soumises aux mêmes contraintes. La construction est limitée par les caractéristiques du terroir; elle stagne depuis près de 10 ans autour de 110 logements par an. Dans ce double contexte de contrainte géographique et de commune populaire, le manque de logements sociaux se fait sentir : le temps d’attente moyen d’un HLM est de dix ans, alors que plus de 20% des demandes concernent un problème de mal-logement. Le manque de logements sociaux n’est pas compensé par une accession à la propriété facile : au prix moyen du m² dans l’ancien, celui-ci n’est véritablement accessible qu’à partir du troisième ou quatrième décile de revenu. Ceci explique sans doute un taux de propriétaires relativement bas (42% dans la commune centre). L’intercommunalité n’a pas une grande antériorité dans les politiques de l’habitat (deux PLH successifs) et ne dispose pas de PLUi, alors que, dans un tel contexte, ce serait un instrument nécessaire, d’autant que l’augmentation des prix de l’immobilier dans la métropole bordelaise proche induit des demandes croissantes d’installation qui entraîneront nécessairement des besoins de régulation des prix. Dans ces conditions, l’enjeu du rattrapage en logement social est important, si l’on ne veut pas que l’écart se creuse entre les capacités des ménages et les prix du m² dans l’ancien.

Home

Article à partir du web-débat : Choisir son chez-soi, ZAN et politiques locales de l'habitat, Philippe Estèbe - Acadie

Les séminaires de l'OHV Choisir son chez-soi : ZAN et politiques locales de l'habitat Avec les contributions de Jean Philippe Le Gal, vice-président aux politiques contractuelles, à l’habitat et au logement de la communauté d’agglomération du Libournais (CALI), Anaïs Pitel, directrice du pôle aménagement et prospective territoriale de la Communauté de Lisieux-Normandie et Cécile Féré, alors chargée de mission urbanisme, habitat, logement et aménagement au secrétariat général de la ville de Lyon (désormais chargée de mission SPL à la direction de la maîtrise d’ouvrage urbaine de la Métropole de Lyon). Concevoir et mettre en œuvre une stratégie de l’habitat, permettant à chacun de « choisir son chez soi » est un exercice des plus simples : il suffit de savoir, en même temps, remettre des logements vacants et vétustes sur le marché, produire des logements neufs abordables, tout en limitant la consommation d’espace, conserver ou rendre le plus possible de surfaces à la pleine terre, mettre les logements anciens aux normes thermiques tout en les « décarbonant » ; ah, et l’on oubliait : maîtriser le foncier pour limiter les prix de sortie des opérations neuves et en contrôler les formes urbaines. Un jeu d’enfant. Les trois villes, pour des raisons différentes, disposent des marges de manœuvre foncière très faibles, voire nulles. Lyon, centre d’une métropole millionnaire, est une ville « pleine », où les réserves foncières sont extrêmement limitées, l’immobilier est cher (6000€/m² en moyenne), et les « espaces verts » rares : il faut pourtant produire près de 3000 logements par an, dont 60% de logements dits abordables. Lisieux, ville moyenne isolée, se vide, mais la communauté d’agglomération souhaite maintenir son niveau de population et celui de l’emploi, malgré de lourdes contraintes physiques et écologiques. Libourne, en grande périphérie de Bordeaux, n’affiche pas d’objectif démographique, car sa capacité d’expansion se trouve limitée d’un côté par le domaine viticole et de l’autre par des zones inondables, mais la ville et l’agglomération subissent une pression forte liée à l’attractivité de Bordeaux et au desserrement de ses ménages. Comment, dès lors, dans ces trois situations contrastées, inciter à la production de logement qui permette à chacun de « choisir son chez soi », c’est-à-dire un logement de qualité et compatible avec les revenus du ménage ? Trois villes aux capacités foncières limitéesDans les trois villes, l’espace disponible pour la construction neuve est extrêmement restreint. Libourne jouxte un terroir prestigieux —Saint-Emilion et Pomerol— dont les terres ne sont pas à vendre (en tout cas pour l’urbanisation) ; une autre partie de la commune est en zone inondable ; la ville, par manque d’espace disponible pour la construction, se trouve ainsi protégée de l’extension urbaine non maîtrisée, alors même que le département de la Gironde est très attractif (+ 300 000 habitants environ au cours des vingt dernières années). En revanche, les communes situées à l’ouest de la communauté d’agglomération sont exposées à la dynamique de la métropole bordelaise et soumises à une urbanisation mal maîtrisée. Tout autre est la situation de Lisieux : la population de la ville et de sa jeune communauté d’agglomération stagne voire régresse. C’est peu dire que le marché de l’habitat est détendu : dans la ville centre, la vacance atteint 15% des logements et la communauté d’agglomération n’a pas été approchée par un promoteur depuis près de 10 ans. Autour, les contraintes physiques et humaines sont nombreuses : zones humides, risques d’effondrement et d’inondation mais aussi élevage de chevaux et production de pommes. Tout ceci limite fortement la consommation d’espace. Le sol de la ville de Lyon est presqu’entièrement artificialisé. Avec 10 000 habitants au km², la densité intra-muros avoisine celle de Manhattan (tout en étant deux fois moindre que celle de Paris). La ville ne dispose que de 7,9 m² d’espace vert par habitant et que, réchauffement aidant, Lyon tend vers une température moyenne proche de celle de Madrid aujourd’hui. La stratégie urbaine s’oriente vers la production de sols vivants, en augmentant le coefficient de pleine terre et la présence du végétal dans l’espace urbain. L’objectif n’est plus de tendre vers le zéro artificialisation nette (ZAN), mais vers l’objectif ZIN, zéro imperméabilisation nette. L’équation lyonnaise se formule ainsi : comment continuer à produire à la fois des logements (et les équipements et services qui vont avec) et de la « pleine terre », autant pour respecter l’objectif national que pour accroître la qualité de la ville pour ses habitants ? Transformer l’existant pour produire du logementPour diverses raisons, malgré leur espace fortement (voire totalement) contraint, ces trois villes doivent produire des logements pour faire face à une demande endogène (décohabitation, réduction de la taille des ménages, déménagements…) et pour répondre à une demande exogène, ou pour susciter celle-ci dans le cas de Lisieux. L’agglomération de Libourne se trouve dans l’aire d’influence de la métropole de Bordeaux, à une quarantaine de kilomètres. Celle-ci, très dynamique, « exporte » de nombreux ménages vers l’est de l’aire urbaine, d’où une forte consommation d’espace dans les communes de la communauté d’agglomération située à l’ouest de Libourne. Ce rapport métropole/territoire détermine la géographie des marchés de l’habitat dans nombre d’intercommunalités situées dans une périphérie métropolitaine. En dépit de l’existence d’un inter-SCoT soutenu par le conseil départemental de Gironde, les collectivités territoriales ne se sont pas donné les moyens pour conduire leur politique de l’habitat « à bonne échelle » et demeurent fragmentées et isolées, alors que le système territorial métropolitain fonctionne selon le principe des vases communicants : les restrictions des uns débordent chez les autres. L’habitat devient une patate chaude que les territoires se repassent, sans se donner les moyens de le piloter collectivement. A Lisieux, la ville et l’agglomération ont réduit leurs ambitions démographiques, mais souhaitent néanmoins maintenir la population à son niveau actuel, sans pour autant disposer, on l’a vu, d’espace d’expansion urbaine. Lyon, enfin, doit répondre à des besoins de logements qui ne diminuent pas, de l’ordre de 3000 par an. Dans les trois cas, les collectivités sont contraintes de conduire une politique de « reconstruction de la ville sur la ville », à la fois en mobilisant les rares terrains disponibles et surtout, dans le cas de Lisieux et Libourne, à engager une stratégie de réhabilitation des logements vétustes du cœur de ville. Lyon a la capacité d’imposer un certain nombre de contraintes aux opérateurs du logement. La ville met en œuvre, en s’appuyant sur une charte, un processus de dialogue avec les acteurs de la construction, les riverains et les associations de défense de la nature. Ces négociations permettent de faire évoluer les modes de construction et la morphologie des nouvelles opérations : la prise en compte des vides, la qualité des matériaux et de l’insertion urbaine, le retour de la pleine terre en diminuant l’emprise au sol des bâtiments et des services connexes (construction des parkings en sous-sol par exemple). C’est par le biais de ces nouvelles approches du rapport entre le bâti et les surfaces occupées que la ville retrouve peu à peu des espaces de pleine terre et rétablit les fonctionnalités écologiques des sols (notamment sa perméabilité). A Libourne, la bastide historique se dégrade et se vide. 40% de la population du centre vit sous le seuil de pauvreté, le marché locatif est menacé par les marchands de sommeil. Alors la ville et l’agglomération concentrent leurs efforts sur ce patrimoine menacé. En deux ans, les services du logement ont visité plus de 2000 logements : pour contrôler la prolifération des logements indignes, les permis de louer et de diviser, autorisation préalable pour tout propriétaire d’un immeuble, ont été mis en place afin de garantir une qualité standard. Le tout s’inscrit dans une opération programmée d’amélioration de l’habitat-renouvellement urbain (OPAH-RU). Au sein de l’OPAH, 45 immeubles sont concernés par une opération de restauration immobilière, bien plus coercitive. Dans le cas où les propriétaires refusent d’effectuer les travaux, la ville et l’agglomération trouvent rarement les moyens de mobiliser les fonds publics nécessaires à l’acquisition des immeubles. Si l’on veut produire des logements « abordables » et décents, en dehors de quelques opérations réalisées par des bailleurs sociaux, cela coûte très cher : on n’a pas encore trouvé le modèle économique de la rénovation urbaine. Lisieux bénéficie d’un contrat Action cœur de ville (ACV) qui se traduit aussi par la mise en œuvre d’une OPAH-RU. Moins soumise aux menaces des marchands de sommeil que Libourne, la ville fait face au problème des logements situés au-dessus des commerces ne disposant pas d’un accès séparé. Dans le cadre de l’OPAH, un effort particulier a été porté sur cette question, non sans résultats puisque plus de 80% des objectifs ont été réalisés. Ceci conjugué à un frémissement du marché —induit en partie par la croissance externe de l’agglomération de Caen— laisse espérer une revitalisation du centre-ville. A Lyon, on change d’échelle : au-delà de remise en état des sols, il faut produire des logements et des logements abordables. Un logement social se libère pour 12 demandeurs, ce qui conduit à un temps moyen d’attente de plus de 9 ans. Avec un taux de 16,5% de logements sociaux, la ville doit redoubler d’efforts dans un marché très tendu. D’où des objectifs volontaristes de production de 60% de logements abordables dans les grandes opérations d’aménagement comme Confluence, au sud de la presqu’île (40% de logements sociaux et 20% de logements en bail réel solidaire), et pas moins de 35% de logements sociaux dans les opérations de moindre envergure. Les logements vacants doivent être mobilisés et le plus possible fléchés vers le logement social pérenne ou temporaire pour une durée d’occupation limitée. Pour limiter la spéculation, tout propriétaire ouvrant un meublé de tourisme doit en même temps produire un nouveau logement locatif. Vers une maîtrise publique des sols ?Tous s’accordent pour souligner que le temps est venu d’une plus grande maîtrise publique des sols. Pour plusieurs raisons : réduire le coût de la construction (à Lyon, l’acquisition du foncier coûte plus cher que le bâtiment) pour maîtriser les prix et limiter les effets d’éviction ; contribuer à consolider un modèle économique de la rénovation urbaine ; maîtriser l’usage des sols, la morphologie urbaine et la typologie des logements. Selon les participants au débat, tous les outils existent, encore faut-il disposer de l’ingénierie pour les mobiliser et les combiner judicieusement. Il faut aussi pouvoir mobiliser l’argent public pour investir dans l’achat de terrains : à Libourne, les transactions immobilières représentent environ 100 millions d’euros par an quand la ville et la communauté d’agglomération peuvent mobiliser au mieux 1 million d’euros. Où trouver l’argent ? Une partie dans les établissements publics fonciers locaux avec lesquels travaillent ces villes ; une autre partie peut provenir d’un meilleur partage des rentes foncières, ce qui commence à se faire, notamment avec la mise en œuvre du bail réel solidaire (BRS) qui détache la propriété du sol de son usage, permettant ainsi de réduire le coût du logement d’un tiers environ. Certaines villes moyennes comme Libourne, situées dans les aires d’attraction des métropoles suggèrent que celles-ci participent à leur effort d’accueil par une contribution financière à l’acquisition de terrains et à la rénovation des immeubles. Cette question de la maîtrise publique des sols va prendre une importance croissante avec la mise en œuvre de l’objectif de réduction de la consommation de foncier par deux d’ici à 2030 et plus encore avec l’objectif d’atteindre zéro artificialisation nette en 2050. Elle entre nécessairement dans la logique de planification écologique qui, dit-on, est la priorité du gouvernement. Philippe Estèbe - Acadie

LISIEUX

... et en données

Quelques données Informations générales : Maire : Sébastien Leclerc (LR) EPCI : Communauté d’agglomération Lisieux Normandie Siège de l’intercommunalité, présidée par François Aubey (PS). PLUi-H approuvé en 2016 (1er PLH/PLUi-H approuvé) PLUi : approuvé en 2016 - Plan « Action cœur de ville » : oui Délégation des aides à la pierre : aucune 3 principaux organismes de logements sociaux OPH (du Calvados), ESH (ICF Habitat, SA Partélios Habitat)

Lisieux dans l'OHV Replay du web-débat du 30 juin 2022

L'habitat à Lisieux en quelques mots ...

L'habitat à Lisieux en quelques mots Lisieux est une petite ville en déclin démographique. Le solde migratoire apparent est négatif dans la ville-centre (- 665) et la couronne périurbaine (-339) entre 2012 et 2017. Le solde migratoire positif apparent de la banlieue (+ 51 personnes) ne peut masquer un solde migratoire globalement négatif. La baisse de la population de la ville-centre est presque continue depuis le pic de 1975. La ville est pourtant relativement bien desservie par le rail compte tenu de sa taille. Son déclin s’explique d’abord par les difficultés de ses anciennes bases industrielles (métallurgie et textile). Cette situation se traduit par un nombre élevé de logements vacants dans la ville-centre (12 %), mais également dans la couronne périurbaine (10 %). Elle conduit également à des prix très modérés pour les logements, avec un prix médian du mètre carré à 1333 euros. Le rythme de construction de nouveaux logements est lent, mais significatif. Tout comme la dynamique d’artificialisation, non contenue, ce rythme souligne que le parc vacant ne paraît pas facilement « mobilisable » malgré sa dimension, aussi bien dans la ville-centre que dans la couronne périurbaine. À la différence de nombreuses grandes villes, la ville-centre rassemble une proportion plus élevée d’ouvriers et d’employés que la périphérie. Ces deux catégories forment 65 % des habitants de Lisieux contre près de 55 % dans la couronne périurbaine. Cette géographie sociale s’explique en partie par la concentration des logements sociaux dans Lisieux : ils forment 35 % des logements de la ville-centre, contre 4 % dans les dix communes de banlieue et 23 % dans la couronne périurbaine. L’investissement de la communauté d’agglomération, élargie depuis peu, dans le champ du logement est récent. Le premier PLUi valant PLH date de 2016. Un nouveau plan local d’urbanisme intercommunal est en projet. Nul doute que la question de l’adaptation du parc de logement à la baisse démographique sera un de ses principaux enjeux.

Home

Article à partir du web-débat : Choisir son chez-soi, ZAN et politiques locales de l'habitat, Philippe Estèbe - Acadie

Les séminaires de l'OHV Choisir son chez-soi : ZAN et politiques locales de l'habitat Avec les contributions de Jean Philippe Le Gal, vice-président aux politiques contractuelles, à l’habitat et au logement de la communauté d’agglomération du Libournais (CALI), Anaïs Pitel, directrice du pôle aménagement et prospective territoriale de la Communauté de Lisieux-Normandie et Cécile Féré, alors chargée de mission urbanisme, habitat, logement et aménagement au secrétariat général de la ville de Lyon (désormais chargée de mission SPL à la direction de la maîtrise d’ouvrage urbaine de la Métropole de Lyon). Concevoir et mettre en œuvre une stratégie de l’habitat, permettant à chacun de « choisir son chez soi » est un exercice des plus simples : il suffit de savoir, en même temps, remettre des logements vacants et vétustes sur le marché, produire des logements neufs abordables, tout en limitant la consommation d’espace, conserver ou rendre le plus possible de surfaces à la pleine terre, mettre les logements anciens aux normes thermiques tout en les « décarbonant » ; ah, et l’on oubliait : maîtriser le foncier pour limiter les prix de sortie des opérations neuves et en contrôler les formes urbaines. Un jeu d’enfant. Les trois villes, pour des raisons différentes, disposent des marges de manœuvre foncière très faibles, voire nulles. Lyon, centre d’une métropole millionnaire, est une ville « pleine », où les réserves foncières sont extrêmement limitées, l’immobilier est cher (6000€/m² en moyenne), et les « espaces verts » rares : il faut pourtant produire près de 3000 logements par an, dont 60% de logements dits abordables. Lisieux, ville moyenne isolée, se vide, mais la communauté d’agglomération souhaite maintenir son niveau de population et celui de l’emploi, malgré de lourdes contraintes physiques et écologiques. Libourne, en grande périphérie de Bordeaux, n’affiche pas d’objectif démographique, car sa capacité d’expansion se trouve limitée d’un côté par le domaine viticole et de l’autre par des zones inondables, mais la ville et l’agglomération subissent une pression forte liée à l’attractivité de Bordeaux et au desserrement de ses ménages. Comment, dès lors, dans ces trois situations contrastées, inciter à la production de logement qui permette à chacun de « choisir son chez soi », c’est-à-dire un logement de qualité et compatible avec les revenus du ménage ? Trois villes aux capacités foncières limitéesDans les trois villes, l’espace disponible pour la construction neuve est extrêmement restreint. Libourne jouxte un terroir prestigieux —Saint-Emilion et Pomerol— dont les terres ne sont pas à vendre (en tout cas pour l’urbanisation) ; une autre partie de la commune est en zone inondable ; la ville, par manque d’espace disponible pour la construction, se trouve ainsi protégée de l’extension urbaine non maîtrisée, alors même que le département de la Gironde est très attractif (+ 300 000 habitants environ au cours des vingt dernières années). En revanche, les communes situées à l’ouest de la communauté d’agglomération sont exposées à la dynamique de la métropole bordelaise et soumises à une urbanisation mal maîtrisée. Tout autre est la situation de Lisieux : la population de la ville et de sa jeune communauté d’agglomération stagne voire régresse. C’est peu dire que le marché de l’habitat est détendu : dans la ville centre, la vacance atteint 15% des logements et la communauté d’agglomération n’a pas été approchée par un promoteur depuis près de 10 ans. Autour, les contraintes physiques et humaines sont nombreuses : zones humides, risques d’effondrement et d’inondation mais aussi élevage de chevaux et production de pommes. Tout ceci limite fortement la consommation d’espace. Le sol de la ville de Lyon est presqu’entièrement artificialisé. Avec 10 000 habitants au km², la densité intra-muros avoisine celle de Manhattan (tout en étant deux fois moindre que celle de Paris). La ville ne dispose que de 7,9 m² d’espace vert par habitant et que, réchauffement aidant, Lyon tend vers une température moyenne proche de celle de Madrid aujourd’hui. La stratégie urbaine s’oriente vers la production de sols vivants, en augmentant le coefficient de pleine terre et la présence du végétal dans l’espace urbain. L’objectif n’est plus de tendre vers le zéro artificialisation nette (ZAN), mais vers l’objectif ZIN, zéro imperméabilisation nette. L’équation lyonnaise se formule ainsi : comment continuer à produire à la fois des logements (et les équipements et services qui vont avec) et de la « pleine terre », autant pour respecter l’objectif national que pour accroître la qualité de la ville pour ses habitants ? Transformer l’existant pour produire du logementPour diverses raisons, malgré leur espace fortement (voire totalement) contraint, ces trois villes doivent produire des logements pour faire face à une demande endogène (décohabitation, réduction de la taille des ménages, déménagements…) et pour répondre à une demande exogène, ou pour susciter celle-ci dans le cas de Lisieux. L’agglomération de Libourne se trouve dans l’aire d’influence de la métropole de Bordeaux, à une quarantaine de kilomètres. Celle-ci, très dynamique, « exporte » de nombreux ménages vers l’est de l’aire urbaine, d’où une forte consommation d’espace dans les communes de la communauté d’agglomération située à l’ouest de Libourne. Ce rapport métropole/territoire détermine la géographie des marchés de l’habitat dans nombre d’intercommunalités situées dans une périphérie métropolitaine. En dépit de l’existence d’un inter-SCoT soutenu par le conseil départemental de Gironde, les collectivités territoriales ne se sont pas donné les moyens pour conduire leur politique de l’habitat « à bonne échelle » et demeurent fragmentées et isolées, alors que le système territorial métropolitain fonctionne selon le principe des vases communicants : les restrictions des uns débordent chez les autres. L’habitat devient une patate chaude que les territoires se repassent, sans se donner les moyens de le piloter collectivement. A Lisieux, la ville et l’agglomération ont réduit leurs ambitions démographiques, mais souhaitent néanmoins maintenir la population à son niveau actuel, sans pour autant disposer, on l’a vu, d’espace d’expansion urbaine. Lyon, enfin, doit répondre à des besoins de logements qui ne diminuent pas, de l’ordre de 3000 par an. Dans les trois cas, les collectivités sont contraintes de conduire une politique de « reconstruction de la ville sur la ville », à la fois en mobilisant les rares terrains disponibles et surtout, dans le cas de Lisieux et Libourne, à engager une stratégie de réhabilitation des logements vétustes du cœur de ville. Lyon a la capacité d’imposer un certain nombre de contraintes aux opérateurs du logement. La ville met en œuvre, en s’appuyant sur une charte, un processus de dialogue avec les acteurs de la construction, les riverains et les associations de défense de la nature. Ces négociations permettent de faire évoluer les modes de construction et la morphologie des nouvelles opérations : la prise en compte des vides, la qualité des matériaux et de l’insertion urbaine, le retour de la pleine terre en diminuant l’emprise au sol des bâtiments et des services connexes (construction des parkings en sous-sol par exemple). C’est par le biais de ces nouvelles approches du rapport entre le bâti et les surfaces occupées que la ville retrouve peu à peu des espaces de pleine terre et rétablit les fonctionnalités écologiques des sols (notamment sa perméabilité). A Libourne, la bastide historique se dégrade et se vide. 40% de la population du centre vit sous le seuil de pauvreté, le marché locatif est menacé par les marchands de sommeil. Alors la ville et l’agglomération concentrent leurs efforts sur ce patrimoine menacé. En deux ans, les services du logement ont visité plus de 2000 logements : pour contrôler la prolifération des logements indignes, les permis de louer et de diviser, autorisation préalable pour tout propriétaire d’un immeuble, ont été mis en place afin de garantir une qualité standard. Le tout s’inscrit dans une opération programmée d’amélioration de l’habitat-renouvellement urbain (OPAH-RU). Au sein de l’OPAH, 45 immeubles sont concernés par une opération de restauration immobilière, bien plus coercitive. Dans le cas où les propriétaires refusent d’effectuer les travaux, la ville et l’agglomération trouvent rarement les moyens de mobiliser les fonds publics nécessaires à l’acquisition des immeubles. Si l’on veut produire des logements « abordables » et décents, en dehors de quelques opérations réalisées par des bailleurs sociaux, cela coûte très cher : on n’a pas encore trouvé le modèle économique de la rénovation urbaine. Lisieux bénéficie d’un contrat Action cœur de ville (ACV) qui se traduit aussi par la mise en œuvre d’une OPAH-RU. Moins soumise aux menaces des marchands de sommeil que Libourne, la ville fait face au problème des logements situés au-dessus des commerces ne disposant pas d’un accès séparé. Dans le cadre de l’OPAH, un effort particulier a été porté sur cette question, non sans résultats puisque plus de 80% des objectifs ont été réalisés. Ceci conjugué à un frémissement du marché —induit en partie par la croissance externe de l’agglomération de Caen— laisse espérer une revitalisation du centre-ville. A Lyon, on change d’échelle : au-delà de remise en état des sols, il faut produire des logements et des logements abordables. Un logement social se libère pour 12 demandeurs, ce qui conduit à un temps moyen d’attente de plus de 9 ans. Avec un taux de 16,5% de logements sociaux, la ville doit redoubler d’efforts dans un marché très tendu. D’où des objectifs volontaristes de production de 60% de logements abordables dans les grandes opérations d’aménagement comme Confluence, au sud de la presqu’île (40% de logements sociaux et 20% de logements en bail réel solidaire), et pas moins de 35% de logements sociaux dans les opérations de moindre envergure. Les logements vacants doivent être mobilisés et le plus possible fléchés vers le logement social pérenne ou temporaire pour une durée d’occupation limitée. Pour limiter la spéculation, tout propriétaire ouvrant un meublé de tourisme doit en même temps produire un nouveau logement locatif. Vers une maîtrise publique des sols ?Tous s’accordent pour souligner que le temps est venu d’une plus grande maîtrise publique des sols. Pour plusieurs raisons : réduire le coût de la construction (à Lyon, l’acquisition du foncier coûte plus cher que le bâtiment) pour maîtriser les prix et limiter les effets d’éviction ; contribuer à consolider un modèle économique de la rénovation urbaine ; maîtriser l’usage des sols, la morphologie urbaine et la typologie des logements. Selon les participants au débat, tous les outils existent, encore faut-il disposer de l’ingénierie pour les mobiliser et les combiner judicieusement. Il faut aussi pouvoir mobiliser l’argent public pour investir dans l’achat de terrains : à Libourne, les transactions immobilières représentent environ 100 millions d’euros par an quand la ville et la communauté d’agglomération peuvent mobiliser au mieux 1 million d’euros. Où trouver l’argent ? Une partie dans les établissements publics fonciers locaux avec lesquels travaillent ces villes ; une autre partie peut provenir d’un meilleur partage des rentes foncières, ce qui commence à se faire, notamment avec la mise en œuvre du bail réel solidaire (BRS) qui détache la propriété du sol de son usage, permettant ainsi de réduire le coût du logement d’un tiers environ. Certaines villes moyennes comme Libourne, situées dans les aires d’attraction des métropoles suggèrent que celles-ci participent à leur effort d’accueil par une contribution financière à l’acquisition de terrains et à la rénovation des immeubles. Cette question de la maîtrise publique des sols va prendre une importance croissante avec la mise en œuvre de l’objectif de réduction de la consommation de foncier par deux d’ici à 2030 et plus encore avec l’objectif d’atteindre zéro artificialisation nette en 2050. Elle entre nécessairement dans la logique de planification écologique qui, dit-on, est la priorité du gouvernement. Philippe Estèbe - Acadie

LYON

... et en données

Quelques données Informations générales Maire : Grégory Doucet (EELV) EPCI : Métropole de Lyon Siège de l’intercommunalité, présidée par Bruno Bernard (EELV). PLUi-H approuvé en 2019 (3e PLH/PLUi-H approuvé) PLUi : approuvé en 2019 - Plan « Action cœur de ville » : non Délégation des aides à la pierre : collectivité en délégation de type 2 6 principaux organismes de logements sociaux OPH (du Rhône, Grand Lyon Habitat, Lyon Métropole Habitat et Est Métropole Habitat), ESH (Vilogia); Action Logement (Alliade Habitat)

Lyon dans l'OHV Replay du web-débat du 30 juin 2022

L'habitat lyonnais en quelques mots ...

L'habitat lyonnais en quelques mots Lyon est devenue la ville la plus chère de France après Paris. Seuls les ménages aux revenus les plus élevés sont en mesure d’accéder à la propriété dans la ville centre, même si c’est une des unités urbaines de l’échantillon où le taux de pauvreté est le plus bas. Ces prix élevés génèrent une forte demande de logements locatifs sociaux, six fois et demi plus intense que la capacité d’accueil annuelle du parc. Il en résulte une prégnance des situations de mal-logement : près d’un quart des demandeurs HLM le font pour ce motif et l’unité urbaine est l’une de celles où la proportion de logements suroccupés est la plus élevée. Ces difficultés propres aux grandes villes attractives reflètent une croissance soutenue de la population, alimentée par des soldes naturels très positifs à toutes les échelles et un solde migratoire particulièrement élevé en banlieue et dans la couronne périurbaine. La population étudiante est également importante, notamment dans la ville-centre. Dans ce contexte porteur, la construction neuve s’est maintenue à un rythme élevé au cours des années 2010, autant dans la ville centre (6,2 logements neufs en moyenne annuelle pour 1000 habitants) que dans les communes de la banlieue (7,3 pour 1000 habitants), ce qui indique une maîtrise locale de l’urbanisation concentrée dans de grands projets urbains. Elle génère à la fois une densification des espaces urbains et des niveaux d’artificialisation modérés. Délégataire des aides à la pierre depuis l’origine du dispositif, la Métropole de Lyon est l’une des intercommunalités les plus expérimentées en matière de politique locale de l’habitat. Dotée de longue date d’un PLH et d’un PLUI, elle dispose aussi de trois offices publics de l’habitat puissants.

Home

Article à partir du web-débat : Choisir son chez-soi, ZAN et politiques locales de l'habitat, Philippe Estèbe - Acadie

Les séminaires de l'OHV Choisir son chez-soi : ZAN et politiques locales de l'habitat Avec les contributions de Jean Philippe Le Gal, vice-président aux politiques contractuelles, à l’habitat et au logement de la communauté d’agglomération du Libournais (CALI), Anaïs Pitel, directrice du pôle aménagement et prospective territoriale de la Communauté de Lisieux-Normandie et Cécile Féré, alors chargée de mission urbanisme, habitat, logement et aménagement au secrétariat général de la ville de Lyon (désormais chargée de mission SPL à la direction de la maîtrise d’ouvrage urbaine de la Métropole de Lyon). Concevoir et mettre en œuvre une stratégie de l’habitat, permettant à chacun de « choisir son chez soi » est un exercice des plus simples : il suffit de savoir, en même temps, remettre des logements vacants et vétustes sur le marché, produire des logements neufs abordables, tout en limitant la consommation d’espace, conserver ou rendre le plus possible de surfaces à la pleine terre, mettre les logements anciens aux normes thermiques tout en les « décarbonant » ; ah, et l’on oubliait : maîtriser le foncier pour limiter les prix de sortie des opérations neuves et en contrôler les formes urbaines. Un jeu d’enfant. Les trois villes, pour des raisons différentes, disposent des marges de manœuvre foncière très faibles, voire nulles. Lyon, centre d’une métropole millionnaire, est une ville « pleine », où les réserves foncières sont extrêmement limitées, l’immobilier est cher (6000€/m² en moyenne), et les « espaces verts » rares : il faut pourtant produire près de 3000 logements par an, dont 60% de logements dits abordables. Lisieux, ville moyenne isolée, se vide, mais la communauté d’agglomération souhaite maintenir son niveau de population et celui de l’emploi, malgré de lourdes contraintes physiques et écologiques. Libourne, en grande périphérie de Bordeaux, n’affiche pas d’objectif démographique, car sa capacité d’expansion se trouve limitée d’un côté par le domaine viticole et de l’autre par des zones inondables, mais la ville et l’agglomération subissent une pression forte liée à l’attractivité de Bordeaux et au desserrement de ses ménages. Comment, dès lors, dans ces trois situations contrastées, inciter à la production de logement qui permette à chacun de « choisir son chez soi », c’est-à-dire un logement de qualité et compatible avec les revenus du ménage ? Trois villes aux capacités foncières limitéesDans les trois villes, l’espace disponible pour la construction neuve est extrêmement restreint. Libourne jouxte un terroir prestigieux —Saint-Emilion et Pomerol— dont les terres ne sont pas à vendre (en tout cas pour l’urbanisation) ; une autre partie de la commune est en zone inondable ; la ville, par manque d’espace disponible pour la construction, se trouve ainsi protégée de l’extension urbaine non maîtrisée, alors même que le département de la Gironde est très attractif (+ 300 000 habitants environ au cours des vingt dernières années). En revanche, les communes situées à l’ouest de la communauté d’agglomération sont exposées à la dynamique de la métropole bordelaise et soumises à une urbanisation mal maîtrisée. Tout autre est la situation de Lisieux : la population de la ville et de sa jeune communauté d’agglomération stagne voire régresse. C’est peu dire que le marché de l’habitat est détendu : dans la ville centre, la vacance atteint 15% des logements et la communauté d’agglomération n’a pas été approchée par un promoteur depuis près de 10 ans. Autour, les contraintes physiques et humaines sont nombreuses : zones humides, risques d’effondrement et d’inondation mais aussi élevage de chevaux et production de pommes. Tout ceci limite fortement la consommation d’espace. Le sol de la ville de Lyon est presqu’entièrement artificialisé. Avec 10 000 habitants au km², la densité intra-muros avoisine celle de Manhattan (tout en étant deux fois moindre que celle de Paris). La ville ne dispose que de 7,9 m² d’espace vert par habitant et que, réchauffement aidant, Lyon tend vers une température moyenne proche de celle de Madrid aujourd’hui. La stratégie urbaine s’oriente vers la production de sols vivants, en augmentant le coefficient de pleine terre et la présence du végétal dans l’espace urbain. L’objectif n’est plus de tendre vers le zéro artificialisation nette (ZAN), mais vers l’objectif ZIN, zéro imperméabilisation nette. L’équation lyonnaise se formule ainsi : comment continuer à produire à la fois des logements (et les équipements et services qui vont avec) et de la « pleine terre », autant pour respecter l’objectif national que pour accroître la qualité de la ville pour ses habitants ? Transformer l’existant pour produire du logementPour diverses raisons, malgré leur espace fortement (voire totalement) contraint, ces trois villes doivent produire des logements pour faire face à une demande endogène (décohabitation, réduction de la taille des ménages, déménagements…) et pour répondre à une demande exogène, ou pour susciter celle-ci dans le cas de Lisieux. L’agglomération de Libourne se trouve dans l’aire d’influence de la métropole de Bordeaux, à une quarantaine de kilomètres. Celle-ci, très dynamique, « exporte » de nombreux ménages vers l’est de l’aire urbaine, d’où une forte consommation d’espace dans les communes de la communauté d’agglomération située à l’ouest de Libourne. Ce rapport métropole/territoire détermine la géographie des marchés de l’habitat dans nombre d’intercommunalités situées dans une périphérie métropolitaine. En dépit de l’existence d’un inter-SCoT soutenu par le conseil départemental de Gironde, les collectivités territoriales ne se sont pas donné les moyens pour conduire leur politique de l’habitat « à bonne échelle » et demeurent fragmentées et isolées, alors que le système territorial métropolitain fonctionne selon le principe des vases communicants : les restrictions des uns débordent chez les autres. L’habitat devient une patate chaude que les territoires se repassent, sans se donner les moyens de le piloter collectivement. A Lisieux, la ville et l’agglomération ont réduit leurs ambitions démographiques, mais souhaitent néanmoins maintenir la population à son niveau actuel, sans pour autant disposer, on l’a vu, d’espace d’expansion urbaine. Lyon, enfin, doit répondre à des besoins de logements qui ne diminuent pas, de l’ordre de 3000 par an. Dans les trois cas, les collectivités sont contraintes de conduire une politique de « reconstruction de la ville sur la ville », à la fois en mobilisant les rares terrains disponibles et surtout, dans le cas de Lisieux et Libourne, à engager une stratégie de réhabilitation des logements vétustes du cœur de ville. Lyon a la capacité d’imposer un certain nombre de contraintes aux opérateurs du logement. La ville met en œuvre, en s’appuyant sur une charte, un processus de dialogue avec les acteurs de la construction, les riverains et les associations de défense de la nature. Ces négociations permettent de faire évoluer les modes de construction et la morphologie des nouvelles opérations : la prise en compte des vides, la qualité des matériaux et de l’insertion urbaine, le retour de la pleine terre en diminuant l’emprise au sol des bâtiments et des services connexes (construction des parkings en sous-sol par exemple). C’est par le biais de ces nouvelles approches du rapport entre le bâti et les surfaces occupées que la ville retrouve peu à peu des espaces de pleine terre et rétablit les fonctionnalités écologiques des sols (notamment sa perméabilité). A Libourne, la bastide historique se dégrade et se vide. 40% de la population du centre vit sous le seuil de pauvreté, le marché locatif est menacé par les marchands de sommeil. Alors la ville et l’agglomération concentrent leurs efforts sur ce patrimoine menacé. En deux ans, les services du logement ont visité plus de 2000 logements : pour contrôler la prolifération des logements indignes, les permis de louer et de diviser, autorisation préalable pour tout propriétaire d’un immeuble, ont été mis en place afin de garantir une qualité standard. Le tout s’inscrit dans une opération programmée d’amélioration de l’habitat-renouvellement urbain (OPAH-RU). Au sein de l’OPAH, 45 immeubles sont concernés par une opération de restauration immobilière, bien plus coercitive. Dans le cas où les propriétaires refusent d’effectuer les travaux, la ville et l’agglomération trouvent rarement les moyens de mobiliser les fonds publics nécessaires à l’acquisition des immeubles. Si l’on veut produire des logements « abordables » et décents, en dehors de quelques opérations réalisées par des bailleurs sociaux, cela coûte très cher : on n’a pas encore trouvé le modèle économique de la rénovation urbaine. Lisieux bénéficie d’un contrat Action cœur de ville (ACV) qui se traduit aussi par la mise en œuvre d’une OPAH-RU. Moins soumise aux menaces des marchands de sommeil que Libourne, la ville fait face au problème des logements situés au-dessus des commerces ne disposant pas d’un accès séparé. Dans le cadre de l’OPAH, un effort particulier a été porté sur cette question, non sans résultats puisque plus de 80% des objectifs ont été réalisés. Ceci conjugué à un frémissement du marché —induit en partie par la croissance externe de l’agglomération de Caen— laisse espérer une revitalisation du centre-ville. A Lyon, on change d’échelle : au-delà de remise en état des sols, il faut produire des logements et des logements abordables. Un logement social se libère pour 12 demandeurs, ce qui conduit à un temps moyen d’attente de plus de 9 ans. Avec un taux de 16,5% de logements sociaux, la ville doit redoubler d’efforts dans un marché très tendu. D’où des objectifs volontaristes de production de 60% de logements abordables dans les grandes opérations d’aménagement comme Confluence, au sud de la presqu’île (40% de logements sociaux et 20% de logements en bail réel solidaire), et pas moins de 35% de logements sociaux dans les opérations de moindre envergure. Les logements vacants doivent être mobilisés et le plus possible fléchés vers le logement social pérenne ou temporaire pour une durée d’occupation limitée. Pour limiter la spéculation, tout propriétaire ouvrant un meublé de tourisme doit en même temps produire un nouveau logement locatif. Vers une maîtrise publique des sols ?Tous s’accordent pour souligner que le temps est venu d’une plus grande maîtrise publique des sols. Pour plusieurs raisons : réduire le coût de la construction (à Lyon, l’acquisition du foncier coûte plus cher que le bâtiment) pour maîtriser les prix et limiter les effets d’éviction ; contribuer à consolider un modèle économique de la rénovation urbaine ; maîtriser l’usage des sols, la morphologie urbaine et la typologie des logements. Selon les participants au débat, tous les outils existent, encore faut-il disposer de l’ingénierie pour les mobiliser et les combiner judicieusement. Il faut aussi pouvoir mobiliser l’argent public pour investir dans l’achat de terrains : à Libourne, les transactions immobilières représentent environ 100 millions d’euros par an quand la ville et la communauté d’agglomération peuvent mobiliser au mieux 1 million d’euros. Où trouver l’argent ? Une partie dans les établissements publics fonciers locaux avec lesquels travaillent ces villes ; une autre partie peut provenir d’un meilleur partage des rentes foncières, ce qui commence à se faire, notamment avec la mise en œuvre du bail réel solidaire (BRS) qui détache la propriété du sol de son usage, permettant ainsi de réduire le coût du logement d’un tiers environ. Certaines villes moyennes comme Libourne, situées dans les aires d’attraction des métropoles suggèrent que celles-ci participent à leur effort d’accueil par une contribution financière à l’acquisition de terrains et à la rénovation des immeubles. Cette question de la maîtrise publique des sols va prendre une importance croissante avec la mise en œuvre de l’objectif de réduction de la consommation de foncier par deux d’ici à 2030 et plus encore avec l’objectif d’atteindre zéro artificialisation nette en 2050. Elle entre nécessairement dans la logique de planification écologique qui, dit-on, est la priorité du gouvernement. Philippe Estèbe - Acadie

MEAUX

... et en données

Quelques données Quelques informations : Maire : Jean-François Copé (LR) EPCI : Communauté d’agglomération du Pays de Meaux Siège de l’intercommunalité, présidée par Jean-François Copé (LR). PLH approuvé en 2013 (2e PLH approuvé) PLUi : aucun - Plan « Action cœur de ville » : oui Délégation des aides à la pierre : aucune 3 principaux organismes de logements sociaux OPH (de Seine-et-Marne), SEM (Pays de Meaux Habitat), Action Logement (3F)

Meaux dans l'OHV Replay du web-débat du 17 mai 2022

L'habitat à Meaux en quelques mots ...

L'habitat à Meaux Meaux présente des caractéristiques composites : celle d’une ville moyenne, mais aussi celle d’une ville de banlieue. Comme beaucoup de villes moyennes, Meaux connaît un affaissement de la population de la ville-centre au profit de l’immédiate banlieue. On observe également un taux élevé de logements sociaux dans la ville-centre (plus de 36 %) alors qu’ils ne forment que 12 % des logements des communes qui l’environnent. La dynamique d’artificialisation des sols est plus vive dans la banlieue que dans la ville-centre. Toutefois, Meaux présente aussi les caractéristiques liées à sa position à une quarantaine de kilomètres de Paris. Les prix dans l’ancien sont élevés (près de 2895 €/m² carré). Les délais d’attente pour le logement social sont particulièrement longs : près de 8 ans d’attente en moyenne. Enfin, l’automobile joue une part plus modeste dans la vie quotidienne. La gare de Meaux est très fréquentée, avec près de 23000 usagers par jour en 2019. Dans ce contexte, le pourcentage de logements suroccupés est parmi les plus élevés de notre échantillon avec 13,6 % des résidences principales. L’agglomération a approuvé son second PLH en 2013. L’engagement intercommunal dans les politiques de l’habitat est plutôt tardif et incomplet :aucun plan local d’urbanisme intercommunal n’a été élaboré. On peut s’interroger sur les prises de l’agglomération de Meaux face aux dynamiques immobilières de l’agglomération parisienne.

Home

Article à partir du web-débat : Rentrer chez soi, articulation entre les politiques de l'habitat et politiques des mobilités, Xavier Desjardins - Acadie

Les séminaires de l'OHV Rentrer chez soi : habitat et mobilités dans les politiques locales Avec les contributions de Sylvain Simonet, chef de service habitat social à la direction habitat et logement de la Communauté urbaine de Dunkerque, Artur-Jorge Bras, maire-adjoint à l'habitat, à l'urbanisme, au logement, à la rénovation urbaine, à la politique de la ville, à la mobilité et aux transports à la ville de Meaux et Arnaud Passalacqua, professeur à l'Ecole d'Urbanisme de Paris et co-président de l'Observatoire des Villes du Transport Gratuit De la difficulté de parler habitat ET mobilitéEn 2023, seul un tiers environ des habitants de la communauté urbaine de Dunkerque habite à moins de trois cents mètres d’un arrêt d’autobus desservi avec une fréquence inférieure à une dizaine de minutes en heure de pointe. Cette fréquence et cette distance aux arrêts sont considérés comme des critères de définition d’une « bonne desserte ». Depuis quelques années, la communauté urbaine de Dunkerque a ajouté à ces avantages, la gratuité de son réseau. L’objectif est social, pour faciliter la mobilité des plus pauvres. Il est aussi urbain, en ce qu’il vise à renforcer l’attractivité résidentielle de la partie desservie de l’agglomération, notamment vis-à-vis des communes périurbaines. Une telle décision en matière de transport est-elle susceptible de changer les dynamiques résidentielles ? Habitat et mobilité : les deux sujets sont évidemment intimement liés. La qualité d’un logement est souvent évaluée par ses occupants au regard de sa localisation et des accès aux « ressources » du territoire qu’elle permet. Quand on choisit son logement, on évalue la distance à une route rapide, la dangerosité potentielle des axes à emprunter, la présence ou non d’une gare. Bref, les deux composantes sont toujours considérées « ensemble » dans la vie quotidienne. Cette préoccupation apparaît-elle dans les politiques publiques locales ? A la fois oui et non. Oui, parce que les élus locaux ont évidemment conscience de cette dépendance mutuelle entre « ce qui est fixe » et « ce qui bouge » et en débattent, notamment lors de la réalisation des documents d’urbanisme. Mais non, parce que les politiques publiques, même locales, sont tellement technicisées et spécialisées, qu’il est bien difficile de trouver un interlocuteur qui se sente à l’aise pour évoquer avec précision les aspects relatifs à la fois au logement et au transport. Même si nous avions rassuré nos interlocuteurs de l’OHV en soulignant que nous ne voulions pas une approche « technique » de ces sujets, mais débattre des enjeux stratégiques de la mise en regard des politiques de mobilité et d’habitat, la difficulté à trouver des intervenants nous a confirmé, si besoin en était, l’incongruité administrative et technique de leur mise en synergie. Le propos de nos intervenants est donc rare et, de ce fait, particulièrement intéressant. Ils relèvent de trois sphères différentes : un technicien, Sylvain Simonet, chef de service « habitat social » à la direction de l’habitat et du logement de la communauté urbaine de Dunkerque ; un élu, Artur Jorge Bras, maire-adjoint à l'habitat, à l'urbanisme, au logement, à la rénovation urbaine, à la politique de la ville, à la mobilité et aux transports à la Ville de Meaux et un universitaire, Arnaud Passalacqua, historien et professeur à l’école d’urbanisme de Paris. Les deux terrains choisis permettent de questionner deux des projets parmi les plus débattus en France en matière de transport public au cours de la dernière décennie : l’intérêt de la gratuité, après l’exemple de Dunkerque, et l’amélioration du réseau de transport ferroviaire francilien, qui va au-delà du projet de réaliser les 200 kilomètres de ligne nouvelle du Grand Paris Express. Par ailleurs, ces exemples permettent de tester dans des contextes urbains très différents, la manière dont l’habitat et la mobilité sont pensés ensemble. En effet, le nombre de voyages réalisés par habitant et par an en transports collectifs au sein de la communauté urbaine de Dunkerque est de 73 contre près de 380 pour l’ensemble de l’Ile-de-France. Indispensable patience ?En Ile-de-France comme à Dunkerque, les évolutions du marché de l’habitat et les orientations actuelles des politiques de transport suivent parfois des voies divergentes. A Dunkerque, l’attractivité résidentielle résiste dans les communes périurbaines alors que la partie centrale de l’agglomération, pourtant bien desservie par les transports publics, perd des habitants. Entre 2012 et 2017, la commune de Dunkerque a ainsi perdu 0,8% d’habitants par an quand les 46 communes de la couronne périurbaine gagnaient 0,4% d’habitants par an. A Meaux, c’est plutôt le marché de l’emploi, et donc les trajets domicile-travail, qui tend à se dissocier des axes de transport public : les pôles d’emploi de Roissy au nord-ouest surtout, mais aussi de Marne-la-Vallée au sud, attirent de plus en plus d’habitants qui déménagent de cette commune. Or, le réseau de transport public est peu efficace, hormis des lignes d’autobus, pour ces trajets internes à la grande couronne, mais non radiaux. De plus, le développement résidentiel périurbain autour de Meaux est intense, notamment dans des communes non desservies par le train et souvent mal irriguées par les voies de bus. Face à ces tendances lourdes, les collectivités locales ne sont pas inactives. A Meaux, la communauté d’agglomération travaille avec celle de Roissy, à 40 km, pour améliorer les relations. Un groupe d’intérêt public a été créé pour faire dialoguer quatre intercommunalités du nord-est francilien autour du développement économique, de l’habitat et des mobilités. A terme, ces discussions devraient conduire à un schéma de cohérence territoriale partagé. Un objectif majeur est le renforcement des liens, notamment par la création d’un lycée sur les métiers de l’aéroport à Meaux et des liaisons d’autobus entre Meaux et Roissy. Ces politiques sont indispensables, mais on le pressent aisément : elles ne peuvent avoir des résultats que sur le long terme. Difficile d’anticiper des effets, comme de faire évoluer rapidement l’offre, même sur des réseaux existants : Artur-Jorge Bras rappelle qu’il faut près de cinq ans et déployer des heures et des trésors de négociations pour ajouter un train sur un axe aussi emprunté que celui qui part de la gare de l’Est à Paris vers Meaux puis Château-Thierry. Et ce sans compter sur les renvois de responsabilité entre la multitude des intervenants, l’autorité organisatrice des transports Ile-de-France Mobilités, mais également les diverses composantes (Gares et Connexions, Réseau, Transilien) du groupe SNCF. Tactiques pour des résultats de court termeLes rapports entre habitat et transports ne peuvent-ils être pensés que sur des projets de long terme ? Non, fort heureusement. Les participants ont évoqué de nombreuses pistes pour avancer plus vite. A Meaux, une charte avec les promoteurs a été rédigée pour mieux concevoir les espaces pour le stationnement des vélos. Dans le cadre de la rénovation urbaine du quartier de Beauval, dans le centre-ville de Meaux, une ligne en site propre a été mise en place pour relier le quartier à la gare. Un travail avec Transdev et Ile-de-France mobilités est engagé pour la réorganisation des réseaux d’autobus. Un réseau de pistes cyclables est en cours de déploiement, ici « sans prise d’espace public au détriment de la voiture (sauf le stationnement) » : ce choix est justifié par l’importance de l’automobile dans les déplacements locaux. La gratuité n’a pas partout le même prixPar ailleurs, il existe une autre piste pour accorder ensemble mobilité et habitat : la gratuité des transports publics qui inciterait logiquement à aller habiter là où mène cette offre pratique, efficace et indolore pour le budget des ménages. Alors que la question de la gratuité suscite de – légitimes – débats idéologiques, Arnaud Passalacqua a mis ce service ou cette aubaine en perspective : elle n’est gratuite qu’en apparence et ne l’est que pour l’usager, car bien sûr l’utilisation des routes, la fourniture et le fonctionnement des véhicules a un coût. Elle existe déjà dans le domaine des transports, de manière variée : de nombreuses routes sont d’un usage gratuit, certaines villes proposent la gratuité pour la location de vélos, etc. En matière de transport public, l’impact de la gratuité sur les finances publiques est également très contrasté : elle ne coûte qu’une dizaine de millions d’euros dans le « petit » réseau d’autobus dunkerquois, alors que les ventes de billets et d’abonnements à la charge des usagers représentent près d’un quart du financement du réseau de transport public francilien, soit plus de 2,5 milliards d’euros. La gratuité n'a donc pas partout le même prix ! Par ailleurs, l’impact de la gratuité du transport public sur l’usage est variable en fonction d’autres paramètres : non accompagnée d’un renforcement de l’offre, elle pourrait conduire à diminuer la part des déplacements à courte distance effectués à pied… Bref, la gratuité n’a pas de sens en soi : elle doit être pensée dans un ensemble plus vaste de décisions publiques et s’insérer dans un projet urbain global. C’est le cas à Dunkerque où elle est une composante du plan de renforcement de l’attractivité du centre urbain. L’ajustement des temporalitésEn matière de transport, les investissements ne sont pas toujours réalisés pour satisfaire la demande telle qu’elle s’exprime actuellement, mais pour anticiper des besoins et les orienter, lorsqu’ils apparaissent, vers des modes « moins énergivores ». L’ajustement entre les politiques d’habitat et de mobilité est donc complexe à mettre en œuvre en raison de trois temporalités distinctes : la temporalité des modes de vie et des représentations sociales, qui peut avoir de brusques à-coups comme avec la crise sanitaire qui a eu un effet démultiplicateur net sur l’usage du vélo, la temporalité de l’évolution des réseaux, de l’ordre d’une décennie au minimum, enfin, la temporalité de la fabrique urbaine, encore plus lente. Qui gouverne la relation entre mobilité et habitat ?Si habitat et mobilité sont complexes à relier, le séminaire fait apparaître une similitude inattendue entre les deux domaines : la focalisation politique locale se réalise fortement sur un segment minoritaire de l’offre. Le transport public intéresse beaucoup, tout comme le logement social. Ils sont évidemment des composantes majeures de la fabrique urbaine. Mais pour les autres éléments des marchés de la mobilité et du logement, n’observe-t-on pas qu’ils sont « sous » ou « non » gouvernés ? L’automobile, pourtant ultra-dominante dans les parts de déplacement et la vie quotidienne des habitants, apparaît peu régulée par des décisions locales, hormis l’importante question du stationnement. Cela n'apparaît-il pas nettement quand on observe la mise en relation entre habitat et mobilité ? Dans le domaine de l’habitat, plusieurs métropoles se montrent intéressées par le statut d’autorité organisatrice de l’habitat (AOH), une « boite » introduite par la loi 3DS de février 2022 qui reste à remplir de compétences possiblement déléguées par l’Etat. Après Brest, Rennes, Lyon et Nice qui tentent d’en définir les contours, Reims et Chalon-sur-Saône avancent leurs pions. 16 intercommunalités remplissent les prérequis nécessaires à ce jour. A la manière des autorités organisatrices de la mobilité (AOM), il peut être intéressant d’accroître le pouvoir local en matière d’habitat. Sans toutefois se payer de mots : les autorités locales ne sont guère « organisatrices » de la mobilité. Elles sont des composantes importantes du système, mais non l’acteur de son devenir. Elles ne sont pas non plus forcément un modèle pour les AOH, alors même que les réflexions et la volonté de l’Etat se précisent dans le sens d’une décentralisation renforcée de la politique du logement. Xavier Desjardins - Acadie

MILLAU

... et en données

Quelques données Informations générales : Maire de Millau : Emmanuelle Gazel (PS) EPCI : Communauté de communes de Millau Grands Causses Siège de l’intercommunalité, présidée par Emmanuelle Gazel (PS). PLUi-H approuvé en 2019 (2e PLH/PLUi-H approuvé) PLUi : approuvé en 2015 - Plan « Action cœur de ville » : oui Délégation des aides à la pierre : non 3 principaux organismes de logements sociaux OPH (de l’Aveyron), ESH (ICF Millau), bailleurs privés (SA HLM Sud Massif Central Habitat)

L'habitat à Millau en quelques mots ...

L'habitat à Millau en quelques mots Millau est une commune de 22 000 habitants dans une intercommunalité qui en compte 30 000. La démographie suit un rythme très lent : un solde naturel négatif dans la ville centre, et un solde migratoire positif, mais faible, malgré la bonne desserte autoroutière et le spectaculaire viaduc. Ceci explique une activité de production de logements assez discrète, qui stagne autour de 80 logements par an dans l’EPCI. La faible part de logements sociaux ne semble pas un problème en raison de l’atonie relative du marché du logement et d’un revenu médian proche de la moyenne nationale. Grâce à un prix très bas du m², il n’est pas difficile d’accéder à la propriété à Millau, ni même au logement social. Ceci explique un taux élevé de propriétaires, autour de 60 % des ménages. Le taux de vacance est plus élevé que la moyenne nationale, sans être excessif (11% en 2017). Il n’y a pas, en 2017, de demande de logements sociaux pour cause de mal-logement. La situation de Millau semble plutôt favorable : un revenu médian proche de la moyenne nationale, des logements accessibles (compte-tenu de l’atonie de la demande), un mal-logement qui existe peut-être, mais ne se signale pas. Le calme relatif du marché du logement n’empêche pas les habitants de consommer de l’espace en grande quantité pour se loger. Dans la couronne périurbaine, la moyenne est de 12 logements à l’hectare, ce qui entraîne une croissance de l’artificialisation de 1,6 % par an depuis 2015. On trouve là le paradoxe de certains territoires faiblement attractifs : il ne faudrait pas que la communauté de communes, sous prétexte d’attirer de nouveaux ménages, prenne le risque de gaspiller son espace naturel et agricole, alors que la ville centre peut accepter de nouveaux ménages.

Home

MONTPELLIER

... et en données

Quelques données Informations générales Maire : Michaël Delafosse (PS) Préfecture du département de l’Hérault (34). EPCI : Montpellier Méditerranée Métropole Siège de l’intercommunalité, présidée par Michaël Delafosse (PS). PLH approuvé en 2019 (3e PLH approuvé) PLUi : approuvé en 2019 - Plan « Action cœur de ville » : non Délégation des aides à la pierre : département et collectivité en délégation de type 3 9 principaux organismes de logements sociaux OPH (de l’Hérault et ACM Habitat), Action logement (Unicil, Promologis), ESH (Erilia, ICF, SFHE, FDI Habitat, Un toit pour tous)

La vision de l'OHV Monographie de Montpellier Que peut le volontarisme local en matière d'habitat dans une métropole méditerranéenne en surchauffe ? Xavier Desjardins - Acadie

Que peut le volontarisme local en matière d’habitat dans une métropole méditerranéenne en surchauffe ? Une ville très attractiveMontpellier, la ville comme son agglomération, fait l’objet d’une très forte croissance démographique. 6 000 personnes supplémentaires chaque année : tels sont le chiffre et le défi rappelés par les élus locaux en matière de politique du logement, et plus largement d’urbanisme, d’équipements et d’organisation de la vie sociale. Selon le programme local de l’habitat pour la période 2019-2024, il faut construire 5 000 logements par an au sein de la métropole. Dans les années 1970 et 1980, les élus locaux ont cherché la croissance démographique. Georges Frèche, l’emblématique maire de Montpellier de 1977 à 2010 a tout fait pour hausser au rang de « surdouée » la ville de Montpellier selon un slogan vite devenu célèbre. Cette attractivité ne s’est pas démentie, auprès de cadres de la recherche ou de la santé, d’étudiants, de travailleurs précaires, de retraités, etc. Le marché de l’emploi, la diversité des équipements, la qualité de vie, la proximité de la mer, ces éléments et bien d’autres attirent un public très divers. En 2020, Michaël Delafosse devient maire de Montpellier et président de la Métropole. Après le mandat de Philippe Saurel, de 2014 à 2020, la ville revient au parti socialiste, en alliance notamment avec les écologistes d’Europe Ecologie Les Verts. Les deux adjoints rencontrés, Maryse Faye, maire-adjointe déléguée à l'urbanisme durable et à la maîtrise foncière, et Michel Calvo, maire-adjoint à la ville solidaire et président de l’office public métropolitain d’habitat ACM Habitat, indiquent clairement les deux boussoles de leur action : sur le fond, la politique se présente comme de gauche, notamment par une meilleure maîtrise publique du marché immobilier, sur la forme, la méthode est volontairement en rupture avec les pratiques de la mandature précédente. Comment reprendre le contrôle ?Quelles sont les nouvelles orientations de la politique municipale ? Tout d’abord, mieux maîtriser les prix et l’occupation du parc existant. La ville a instauré une réglementation pour les meublés touristiques (notamment loués via Airbnb et autres plateformes). La Ville identifie près de 6 500 logements différents loués par ce biais chaque année. Cela pèse considérablement sur l’offre, notamment dans le centre-ville. Pour limiter cet impact, la ville interdit de louer plus de 120 jours par an pour les personnes privées. Pour les personnes morales, toute création d’une telle offre doit passer par la création d’un nouveau logement de taille et qualité équivalentes. Pour lutter contre l’habitat insalubre – et donc limiter l’activité des marchands de sommeil – un permis de louer est instauré pour les quartiers les plus concernés, notamment le quartier de Celleneuve. Enfin, la ville expérimente un encadrement des loyers. La ville est la troisième plus chère de France pour les loyers. Comme dans d’autres villes, avec les données de l’agence d’information sur le logement (ADIL), des loyers de références sont repérés qui permettent de fixer les limites admises, puis un contrôle est effectué lorsqu’il y a une plainte. Le deuxième pilier de cette politique concerne la production de logements neufs. Au-delà du nombre, les élus veillent à la qualité de ces logements. La municipalité ne souhaite pas que le centre de l’agglomération se spécialise dans l’accueil des seuls petits ménages, très nombreux en partie du fait des étudiants. Pour conserver des familles, une proportion de grands logements (supérieurs au T3) est imposée, notamment parce que les petits logements sont les supports privilégiés des investisseurs attirés par les dispositifs de défiscalisation de type « Pinel ». Dans les copropriétés composées majoritairement de tels investisseurs individuels, la gestion par les propriétaires est de faible qualité : ils habitent loin (et parfois ne se sont jamais rendus à Montpellier !) et ont une stratégie de « court terme » (pour le secteur de l’immobilier). Ils cèdent souvent leur bien à l’issue de la période d’avantage fiscal, soit neuf ans. Enfin, les élus veillent au prix. Au-delà d’exigences désormais répandues classiques en matière de part des logements sociaux dans les immeubles collectifs (30% pour les immeubles de plus de 800 m² de surface de plancher), une part de logements « abordables » est imposée. Ces logements doivent être cédés à un prix inférieur de 15% au prix du marché, par le biais d’une convention. Les propriétaires s’engagent à garder le bien entre cinq et sept ans minimum, pour ne pas susciter d’effets d’aubaine sur la plus-value. Enfin, la qualité des logements est également surveillée de près. La municipalité a augmenté ses exigences en matière environnementale. 50% des surfaces des parcelles bâties doivent être conservées en pleine terre. La protection des arbres a été considérablement renforcée. Les immeubles doivent se doter de garages à vélo, aisément accessibles et spacieux. De manière générale, la volonté est de mieux contrôler l’activité des promoteurs. Le plan local d’urbanisme de 2006 (en cours de révision) avait assez largement favorisé la densification urbaine. Or, Montpellier n’est pas une ancienne ville industrielle ou militaire dans laquelle les friches sont nombreuses. L’opération de promotion classique consiste donc en un regroupement de deux ou trois parcelles de maisons individuelles pour réaliser des opérations de logements collectifs de 20, voire 30 logements. Une telle densification modifie fortement le paysage, peut entraîner une saturation des écoles, etc. La volonté n’est pas d’arrêter cette densification, mais de la réguler, d’en discuter davantage les modalités avec les habitants, d’être plus exigeants en termes de qualité urbaine. Au cours de la décennie 2010, la densification s’est beaucoup opérée au coup par coup, au gré des opportunités saisies par les promoteurs dans le cadre d’un plan local d’urbanisme qui permettait des niveaux de constructibilité importants en densification. Pour une meilleure intégration de cette densification, des projets urbains partenariaux (PUP) sont imposés à de nombreuses opérations de promotion : cela permet d’inclure ces opérations dans une stratégie de réaménagement plus large de l’environnement (voirie, espaces verts, etc.) en levant des participations financières auprès des promoteurs, sans passer par la maîtrise publique comme dans une zone d’aménagement concerté (ZAC). Pour mettre en avant cette volonté de qualité, la ville relance les dispositifs des « folies », ces opérations exemplaires qui visent à mettre en avant l’audace architecturale qui a conduit à des opérations vite devenues populaires comme L’Arbre blanc sur les bords du Lez. Abandonné en 2014, cette dynamique est relancée. Selon Maryse Faye, ces exigences n’ont pas entrainé une baisse des investissements à Montpellier : le nombre de réponses aux appels à projets démontrent la stabilité de son attractivité (pour les folies, sur les 13 sites lancés depuis 2020, 65 réponses ont été déposées). Repenser les opérateurs publics de la politique locale de l’habitatL’équipe nouvelle souhaite également marquer sa différence sur la méthode. Le regroupement des différents outils de la métropole que sont son aménageur (la SERM) et son office public de logement (ACM) en une seule entité, nommée Altémed, concrétise cette volonté de meilleure coordination de l’action locale. Les liens entre l’office public de l’habitat (ACM) et la métropole s’étaient assez largement distendus entre 2014 et 2020, ce qui avait conduit à l’arrivée d’un grand nombre d’autres bailleurs sociaux : de 5 à 13 en six ans. Résultat des mouvements de fusion des entreprises sociales de l’habitat et de leur forte concurrence, cette situation a entraîné une moindre production par ACM durant cette période. La nouvelle entité, Altémed, dont le siège sera dans le quartier populaire de la Mosson, veut donc marquer les ambitions politiques locales. Entre Métropole et Ville, une forme de partage des rôles semble donc se dessiner. La Métropole pose les cadres généraux, notamment en termes d’orientations en matière de construction et d’équilibre social à atteindre entre les différentes communes. La Ville de Montpellier se concentre davantage sur la concertation locale autour des opérations d’aménagement, les liens entre projets de logement et vie sociale (par exemple en matière d’éducation pour la rénovation urbaine du quartier de la Mosson) ou de règles qui n’ont un intérêt que pour la Ville, notamment sur l’habitat insalubre ou les locations de meublés touristiques. Entre le marché et la société, quelles sont les marges de manœuvre du local ?Quels sont les effets d’une telle politique locale de l’habitat ? Bien évidemment, il est bien trop tôt pour en déterminer avec certitude les effets. Toutefois, on peut d’ores et déjà souligner quelques limites, déjà perçues, de ces politiques. La première est relative au périmètre. La Métropole rassemble 42 communes et près de 470 000 habitants. La plupart des 93 communes de la couronne périurbaine au sens de l’INSEE sont donc en dehors de son périmètre. Le dialogue interterritorial sur les politiques de l’habitat est presque inexistant, avec notamment un schéma de cohérence territoriale dont le périmètre est restreint à la seule Métropole. Au-delà du périmètre, les instruments mobilisés par la Métropole restent mineurs pour modifier les paramètres du marché du logement (hormis quelques segments précis comme l’habitat insalubre ou les meublés touristiques). Cela concerne tant le marché de l’habitat privé que de l’habitat social. En effet, même pour le logement social, Philippe Martin, directeur de FDI Habitat, entreprise sociale pour l’habitat, nous rappelle que l’agglomération est particulièrement contrainte par les mécanismes relatifs à son financement. La part de fonds propres que les bailleurs sociaux doivent consacrer pour créer de nouveaux logements sociaux ne cesse de s’accroître sous l’effet conjugué de la baisse des loyers des organismes (avec le dispositif de réduction des loyers de solidarité, exigé suite à la diminution des aides personnelles au logement décidées par le gouvernement en 2018), de la hausse des coûts du foncier et de la construction et de la hausse du taux du livret A. Ces dynamiques conduisent à accentuer la polarisation sociale dans la ville de Montpellier. Les catégories populaires peuvent s’y loger grâce à la spécialisation de certains quartiers et la politique sociale de l’habitat ambitieuse de la collectivité locale. Les « classes moyennes », notamment les familles avec enfants, ont bien des difficultés à s’y loger, car elles ne souhaitent pas toujours entrer dans le parc de logements aidés et sont exclues par le prix de nombreux logements privés. Jacques Donzelot, il y a une vingtaine d’années, évoquait la « ville à trois vitesses » pour parler de ces dynamiques simultanées de relégation (dans les grands quartiers d’habitat social), de gentrification (dans les centres et quartiers recherchés) et de périurbanisation (principalement pour les classes moyennes). Cette représentation stylisée a fait mouche, non par sa précision sociologique (puisqu’il est bien évident que ces trois mouvements résument mal la dynamique précise des marchés, notamment pour le logement étudiant, les résidences pour personnes âgées, le secteur de l’hébergement, etc.), mais parce qu’elles évoquent des tendances bien visibles. La Métropole de Montpellier, malgré son fort volontarisme, ne semble réussir qu’à atténuer ces dynamiques et à en amoindrir les effets les plus ségrégatifs, plus qu’à réellement les contrecarrer. Cette situation doit-elle conduire à une forme de pessimisme désabusé : le volontarisme local serait-il donc dérisoire face à la puissance des mécanismes économiques et sociaux qui modèlent les territoires ? Non, tout d’abord parce que les actions ne sont pas sans effet : des logements en accession maîtrisée sont produits, une densification plus qualitative se met en place, l’activité des bailleurs sociaux en termes de gestion et de développement est plus intégrée à la politique locale. Par ailleurs, elles doivent surtout interroger l’articulation des politiques publiques de l’habitat. Cette courte monographie montre la trajectoire d’une politique locale de l’habitat et ses bifurcations récentes. Pendant ces bifurcations, les dispositifs d’Etat ont-ils été repensés au sein du territoire métropolitain pour se révéler plus efficace dans leur déploiement en fonction de ce nouveau contexte politique local ? Non, parce qu’ici comme ailleurs, l’Etat intervient surtout de manière aveugle au territoire, par des mécanismes principalement fiscaux et financiers. L’Etat ne pourrait-il pas, lui aussi, avoir une politique d’habitat localisée ? Xavier Desjardins, Louna Villain – Acadie

L'habitat montpellierain en quelques mots ...

L'habitat montpellierain en quelques mots C’est une des communes et des intercommunalités les plus attractives de l’échantillon. En cinq ans (2012-2017), la métropole a gagné près de 30 000 habitants, par le jeu combiné du solde migratoire et du solde naturel. La demande de logement est très forte, ce qui explique une activité soutenue de production de logements (plus de 5000 logements par an entre 2012 et 2017) et un taux de vacance proche de la vacance technique (7% dans la ville centre en 2017). Malgré cette attractivité, ou à cause d’elle, Montpellier accueille un grand nombre de ménages modestes (la médiane du revenu par UC est de 18 480€ en 2017, contre près de 21 000€ à l’échelle nationale), voire pauvres (le taux de pauvreté s’établit à 21% en 2017). La situation est d’autant plus tendue que l’offre de logements locatifs sociaux reste en deçà du seuil fixé par l’article 5 de la loi SRU. Il faut en moyenne 7 ans et demi pour trouver un logement social à Montpellier et le prix moyen dans l’ancien réserve l’accession à la propriété aux ménages les plus aisés (6e et 7e déciles). Ces tensions se traduisent par une suroccupation notable des logements dans la ville centre et par un nombre important de demandes de logement social pour mal-logement. Elles produisent aussi un étalement de l’agglomération : malgré une densité moyenne relativement élevée, la consommation de sols progresse rapidement dans la couronne périurbaine. Les enjeux de régulation sont donc très élevés. Montpellier métropole dispose des instruments (office public, PLH et PLUI) lui permettant de jouer ce rôle. Au-delà d’une politique à l’échelle de la métropole, c’est sans doute une coordination des politiques de l’habitat à l’échelle de la conurbation méditerranéenne qui doit être mise en débat.

Home

NEVERS

... et en données

Quelques données Informations générales : Maire : Denis Thuriot (LREM) EPCI : Communauté d’agglomération de Nevers Siège de l’intercommunalité, présidée par Denis Thuriot (LREM). PLH approuvé en 2020 (2e PLH approuvé) PLUi : aucun - Plan « Action cœur de ville » : oui Délégation des aides à la pierre : aucune 4 principaux organismes de logements sociaux OPH (de la Nièvre), Action Logement (Habellis), ESH (ICF Habitat, 1001 vies Habitat)

La vision de l'OHV Monographie de Nevers Politique de l'habitat à Nevers : organiser le recentrage, Jean-Claude Driant - Ecole d'Urbanisme de Paris

Politique de l’habitat à Nevers : organiser le recentrage Les données de l’observatoire de l’habitat dans les villes montrent que Nevers peut faire figure d’archétype des villes à marché détendu et où l’un des enjeux majeurs est la reconquête d’un centre à haute valeur patrimoniale. Aller à la rencontre des acteurs du territoire permet à la fois de nuancer ce constat et de mettre en relief les orientations des politiques publiques que ce type de situation peut générer. Même si, selon les acteurs locaux, quelques signes de reprise seraient perceptibles dans la ville centre, l’agglomération de Nevers suit une trajectoire de décroissance de population depuis le début des années 1990 et son marché du logement en subit les conséquences. La ville centre, qui se distingue par un important patrimoine historique, connaît des taux de vacances des logements et des commerces à peu près équivalents, autour de 17%. C’est l’une des villes moyennes les plus touchées par ce phénomène et, à ce titre, l’un des lieux pionniers des réflexions nationales et locales qui ont mené à la création du programme Action Cœur de Ville. Dans le centre-ville de Nevers les taux de vacance de l’habitat et du commerce atteignent 28% et tendent à augmenter. Croissance dans la décroissanceLa décroissance ne touche pas que le centre, puisque tous les niveaux géographiques et institutionnels (de la ville à l’EPCI, de l’unité à l’aire urbaine) perdent de la population. Le marché du logement s’en trouve très détendu sur l’ensemble du territoire, avec des prix bas qui se situent entre 1 000 et 1 300 euros par m² selon les communes et quartiers de l’agglomération. Le rythme de construction est très faible au centre et dans la première couronne. Cause ou conséquence, la promotion immobilière privée est quasi absente du paysage. La demande de logements sociaux, faible, émane des ménages les plus pauvres en quête surtout de maisons individuelles. Les enjeux de renouvellement d’un parc HLM très daté et peu attractif sont importants. Ces grandes tendances masquent une dynamique positive de développement résidentiel en périphérie, vers certaines communes plus attractives de l’agglomération et dans les communes rurales environnantes qui offrent un cadre de vie à la fois très valorisé et financièrement abordable. Il en résulte, malgré la perte de population, une poursuite de la consommation foncière et de l’artificialisation des sols. Ces deux dynamiques apparemment contradictoires reflètent la diversité des projets résidentiels des habitants du territoire. « Faire moins, mais mieux »Nevers est donc, de fait, engagée dans une trajectoire de rétractation dont rendent bien compte les principaux documents réglementaires et de planification approuvés ou en voie de l’être. Le schéma de cohérence territoriale (SCoT) du Grand Nevers pointe dans son diagnostic et dans ses orientations le fort enjeu de l’habitat, en considérant qu’il n’y a pas lieu d'accroître le nombre de logements du territoire, mais de considérer la construction dans une logique principale de renouvellement urbain. Le SCoT argumente d’ailleurs sur le fait que « chaque logement neuf apporté génère la vacance d’un à deux logements existants ». L’enjeu est de renforcer l’attractivité du territoire du Grand Nevers pour compenser un solde naturel de plus en plus négatif par un solde migratoire redevenu positif. Cela permettrait, selon le SCoT approuvé en mars 2020, de ramener la perte moyenne annuelle de population de -0,55% au début des années 2010 à -0,20% à l’horizon 2040-2050. De la même façon, le programme local de l’habitat (PLH) de Nevers Agglomération, approuvé également en 2020, affirme « acter que le stock de logements ne doit pas augmenter » et prévoit, pendant les six années de sa validité, la requalification de 780 logements, la démolition de 1 000 logements et la construction de seulement 500 logements neufs, le tout dans une logique qui assume « de faire moins, mais mieux » selon des termes prononcés plusieurs fois par nos interlocuteurs. Quant au plan local d’urbanisme (PLU), celui de la ville de Nevers a été approuvé en 2017 et aucune démarche intercommunale n’est envisagée à ce jour même si la vice-présidente de l’agglomération en charge de l’habitat souhaite montrer à tous qu’un renouveau de l’attractivité de la ville de Nevers aurait nécessairement des conséquence positives sur toutes les communes de l’agglomération. C’est le sens de l’élargissement en 2021 du périmètre de l’opération de revitalisation du territoire[1] (ORT) à quatre communes de la périphérie de Nevers. Une ingénierie sous tensionDans ce contexte, l’agglomération doit fabriquer sa trajectoire de recentrage, en tenant compte de plusieurs contraintes importantes. D’abord de faibles capacités et moyens de mise en œuvre. L’ingénierie locale reste limitée. Le directeur de l’habitat de l’agglomération, parti en 2021, n’a toujours pas été remplacé et le recrutement s’avère difficile[2]. Le programme Action Cœur de Ville apporte des moyens humains et financiers, mais qui s’avèrent insuffisants dans un contexte global où le modèle économique de la rétractation reste à inventer. À cela s’ajoute une faible adhésion de la plupart des élus, notamment hors de la ville-centre, qui n’endossent pas clairement cette stratégie, ni n’engagent les outils et moyens nécessaires. En l’absence d’opérateurs privés, les bailleurs sociaux sont des acteurs majeurs de cette logique de retrait. Nièvre Habitat, l’Office public départemental, est engagé dans le renouvellement de son parc le moins attractif, notamment dans le grand ensemble du Banlay où 419 logements seront démolis et seulement une petite centaine reconstruits, dont la moitié hors du site. On est donc très loin d’une reconstitution totale du parc démoli, ce qui ne fut pas facile à argumenter auprès de l’Anru. De son côté, Habellis, société anonyme du groupe Action Logement, s’engage plutôt dans des opérations de diversification de l’offre en maison individuelle et en accession sociale à la propriété. Outre ICF Habitat qui possède un patrimoine très lié au technicentre SNCF de Varennes-Vauzelles, commune populaire du nord de l’agglomération, il faut souligner la problématique spécifique du patrimoine non démoli, mais en mauvais état, de l’ESH 1001 Vies Habitat qui souhaite se retirer du département et cherche à le céder. Le centre-ville au cœur de la stratégie de reconquêteL’ensemble des acteurs rencontrés considère que la question de l’habitat est au cœur de cette logique globale de rétractation, considérant que ce domaine clé pour l’attractivité différenciée du territoire peut avoir un effet d'entraînement pour la plupart des autres politiques publiques urbaines, de la maîtrise de l’urbanisation au dynamisme commercial, en passant par les mobilités. En revanche, il ne résoudra pas le problème de l’activité économique et de l’emploi qui reste l’un des chantiers les plus difficiles du territoire. Pour tous, la transformation du centre-ville de Nevers est une condition essentielle de la réussite de cette dynamique. Ce constat est confirmé par la stratégie du maire de Nevers qui se veut multifonctionnelle, en agissant sur l’ensemble des sources de flux (travail, loisirs, commerce, tourisme, numérique, etc.). C’est donc dans le centre de Nevers que se concentrent la plupart des dispositifs de l’agglomération et une part significative de l’action des opérateurs locaux du monde du logement. Le cadre ensemblier d’Action Cœur de Ville, joue évidemment un rôle majeur dans le dispositif. D’un point de vue opérationnel, l’intervention se concentre sur les îlots très dégradés et l’association quasi-systématique à l’habitat des enjeux en matière de commerce. Il s’agit de partir d’opérations emblématiques, dans une logique de démonstrateur, sur quelques immeubles (principalement quatre bâtiments sur l’un des axes majeurs du centre) et d’y mener une restructuration globale des surfaces commerciales et une fusion des étages d’habitation pour y créer de nouveaux logements accessibles et attractifs. L’opérateur principal de ces opérations est la foncière Cœur de Nièvre, créée en 2022 avec la SEM Nièvre Aménagement et la Banque des Territoires. Elle porte les immeubles qui seront ensuite cédés en VEFA à Nièvre Habitat. Les élus locaux ont, en revanche, fait le choix de ne pas recourir à l’établissement public foncier régional afin d’éviter ce qu’ils considèrent comme « une gestion à distance ». Les bailleurs sociaux participent à cette démarche de reconquête en engageant des opérations d’acquisition-amélioration. Nièvre Habitat et Habellis en ont quelques-unes en cours, mais s’accordent à dire que ce sont des chantiers à chaque fois très spécifiques (« chaque bâtiment est unique »), très coûteux, et dont l’attractivité finale reste incertaine. Ils soulignent notamment l’ampleur des contraintes liées au caractère patrimonial du centre qui empêche de réaliser du stationnement et de doter les logements ainsi réhabilités de balcons ou de terrasses. Le modèle économique de ces opérations reste donc à trouver et suppose une ingénierie financière et relationnelle importante. Il sera encore plus incertain lorsque les aides exceptionnelles liées à Action Cœur de Ville seront épuisées. Le pari des bailleurs sociaux reste principalement celui de la qualité de leur production pour se différencier d’une offre privée dont les loyers sont équivalents, faute de marché. Plus classiquement, l’opération programmée d’amélioration de l’habitat de renouvellement urbain (OPAH-RU) développe, avec le soutien de l’association Soliha, une démarche incitative à l’égard des propriétaires et des investisseurs pour les accompagner dans la rénovation des logements anciens du centre. De premiers indices laissent penser à une légère reprise du marché avec la venue d’investisseurs qui sont principalement des personnes physiques (sous forme de SCI) d’origine locale ou proche, venant du Cher ou de l’Yonne. Mais, nous dit-on, « il y a des investisseurs qu’il faut suivre de près », notamment ceux qui surestiment la capacité d’absorption par le marché de programmes trop luxueux et risquent de ne jamais trouver de locataire. A l’autre extrémité, la préoccupation pour la persistance d’un parc indigne, voire insalubre, et de marchands de sommeil, incite la municipalité à réfléchir à la mise en place du permis de louer. Trouver des « clients »Trouver des clients, c’est bien de cela qu’il s’agit pour repeupler le centre-ville. Une des pistes consiste à s’appuyer sur un développement de l’enseignement supérieur pour bénéficier d’une dynamique étudiante déjà présente, mais appelée à se développer. L’installation de la maison des étudiants et plusieurs projets de résidences spécialisées vont y contribuer. La ville tente aussi d’accompagner l’arrivée des jeunes actifs avec le dispositif WIN (Welcome in Nevers !) qui prend en charge les 6 premier mois de loyer et aide par exemple la recherche d’emploi des conjoints. Il s’agit notamment d’attirer des ménages avec enfants pour remplir les écoles. Ce type de dispositifs est paradoxalement desservi par le marché, détendu et aux prix bas, les nouveaux arrivants ayant tendance à sortir rapidement du secteur locatif pour accéder à la propriété… en périphérie. Nevers, démonstrateur d’une stratégie de décroissance ?Au total, l’articulation entre la politique de l’habitat et les autres volets de la stratégie urbaine de l’agglomération de Nevers montre des signes d’une lucidité croissante à l’égard des tendances démographiques et économiques qui marquent le territoire. S’il n’est pas encore question d’affirmer frontalement un objectif de rétractation, ni de s’engager dans une démarche de PLU intercommunal, la concentration des efforts sur le centre-ville montre qu’un consensus a pu s’établir sur son caractère stratégique pour l’avenir de l’ensemble de l’agglomération. Pourrait-on imaginer que l’étape suivante ferait de Nevers un lieu d’expérimentation d’une stratégie de décroissance centrée sur la qualité d’un cadre de vie urbain reconquis et valorisé comme tel, au service de ses habitants ? Un tel démonstrateur, d’intérêt national, justifierait sans doute des moyens spécifiques. Jean-Claude Driant - Ecole d’Urbanisme de Paris et Jules Peter-Jan - Acadie [1] Créé par la loi Elan (loi n°2018-1021 du 23 novembre 2018), les opérations de revitalisation du territoire visent la requalification d’ensemble d’un centre-ville, de la rénovation du parc de logements à celle des locaux commerciaux et artisanaux. [2] Février 2023.

L'habitat à Nevers en quelques mots ...

L'habitat à Nevers en quelques mots Nevers est l’une des villes de l’échantillon où il est le plus facile de bien se loger : un prix de vente médian modéré et un accès rapide au logement social. Le mal-logement y pèse beaucoup moins que dans les villes plus chères et disposant de moins de logements sociaux : le taux de suroccupation des logements place Nevers dans le tiers des villes les moins touchées de l’échantillon. Cette détente du marché s’explique principalement par une très faible dynamique démographique puisque Nevers est l’une des seules villes de l’échantillon qui perde de la population aussi bien dans sa ville-centre que dans sa banlieue et dans sa couronne périurbaine. La facilité d’accession à la propriété périurbaine contribue sans doute à un solde migratoire très fortement négatif pour la ville-centre. Cette détente se reflète dans l’un des plus faibles niveaux de construction neuve de l’échantillon. Logiquement, la consommation foncière est également faible, sauf dans la couronne périurbaine où la maison individuelle domine et s’autorise sans doute de belles surfaces. À ces indices de détente du marché du logement de Nevers s’ajoute l’ampleur de la vacance, quelle que soit l’échelle géographique d’analyse : près de 18% dans la ville-centre, 15% en banlieue et encore 13% dans la couronne périurbaine. Au total, la question du logement ne semble pas être pour Nevers une priorité politique importante, ce qui explique le caractère assez tardif de la mise en œuvre d’un PLH, sans délégation des aides à la pierre et en l’absence d’un office public HLM à l’échelle de l’agglomération. Le sujet est, en revanche, au premier rang des préoccupations dans le cadre de la problématique plus globale portée par le programme Action Cœur de Ville.

Home

PONTARLIER

... et en données

Quelques données Informations générales : Maire : Patrick Genre (DVD) EPCI : Communauté de communes du Grand Pontarlier Siège de l’intercommunalité, présidée par Patrick Genre (DVD). PLUi-H en cours d’élaboration depuis 2016 (aucun PLH/PLUi-H précédent) PLUi : en cours d’élaboration (depuis 2016) - Plan « Action cœur de ville » : non Délégation des aides à la pierre : département en délégation de type 2. 4 principaux organismes de logements sociaux OPH (du Doubs), ESH (Néolia, ICF Novedis), SEM (IDEHA)

Pontarlier dans l'OHV Replay du web-débat du 22 février 2022

L'habitat à Pontarlier en quelques mots ...

L'habitat à Pontarlier en quelques mots Pontarlier est l’une des villes moyennes de l’échantillon dans lesquelles les prix de vente moyens dans l’ancien sont supérieurs à 2000 euros/m². Ce niveau de prix assez élevé, sans doute lié à la proximité de la frontière suisse, masque une démographie légèrement déclinante dans la ville-centre, alors que tant la banlieue que la couronne périurbaine gagnent de la population sous l’effet principal d’un solde migratoire très positif dans les autres communes de l’unité urbaine et d’un solde naturel élevé dans le périurbain. Il en résulte des rythmes de construction neuve nettement supérieurs à la moyenne dans ces deux niveaux de couronne et une dynamique d’artificialisation nettement supérieure à la moyenne dans les communes de la banlieue de l’unité urbaine. C’est l’une des villes de l’échantillon où la présence du logement social est la plus faible, quelle que soit l’échelle d’observation (14% dans la ville-centre, 12% en banlieue selon le recensement). Du fait de la taille de l’agglomération, ses communes ne sont pas soumises à la loi SRU, mais il en résulte une insuffisance de l’offre, puisque celle-ci ne permet de répondre annuellement qu’à une demande sur cinq. Ce décalage entre l’offre et la demande de logement social ne reflète toutefois pas une problématique forte de mal-logement. La communauté de communes du Grand Pontarlier s’est dotée en 2020 d’un PLU intercommunal comportant un volet habitat et valant donc PLH. C’est une façon ambitieuse de s’engager dans une politique locale de l’habitat qui s’appuie également sur l’action du département du Doubs, délégataire des aides à la pierre de longue date.

Home

Article à partir du web-débat : Changer de chez-soi : les enjeux locaux des parcours résidentiels, Jean-Claude Driant - Ecole d'Urbanisme de Paris

Les séminaires de l'OHV Changer de chez-soi, les enjeux locaux des parcours résidentiels Avec les contributions de Ludivine Chambelland, directrice du pôle stratégie du territoire de la Communauté de communes du Grand Pontarlier, Nathalie Demeslay, responsable du service habitat de Rennes-Métropole et Patrice Raineri, directeur de l’habitat et de la cohésion sociale de Saint-Etienne-Métropole. La problématique des parcours résidentiels interpelle les politiques locales dans toutes leurs dimensions classiques : celle de la production et de la gestion du parc social, celle de la dimension intercommunale des politiques mises en œuvre, celle de la fabrication de l’attractivité résidentielle des secteurs délaissés et du renouvellement urbain, celle des politiques de promotion de l’accession à la propriété et celle des relations centres-périphéries. L’observatoire de l’habitat dans les villes (OHV) met en lumière l’ampleur des écarts entre des villes où le prix de vente médian dans l’ancien est proche de 1000 ou 1100€/m² (Saint Dizier, Saint-Dié-des-Vosges, Nevers ou Saint-Etienne) et d’autres où il faut compter au moins le triple (Montpellier, Rennes ou les Sables-d’Olonne), sans même parler les sommets atteints à Lyon. Face à ce coût de l’accès à la propriété, le rôle des parcs locatifs se trouve lui-même très différencié à l’image de la capacité d’accueil des demandeurs de logements sociaux. Dans certaines villes le nombre de demandeurs est à peine supérieur à la capacité d’attribution d’une année. Dans d’autres, telles Meaux, Lyon, Montpellier, Bastia ou Libourne, l’écart dépasse un rapport de 1 à 6. La simple mise en relation de ces deux catégories d’indicateurs montre l’ampleur des disparités en matière de capacité des ménages à accéder au logement et à faire évoluer leurs conditions d’habitat au fur et à mesure des changements de leur vie. Là où il faut attendre longtemps un logement social, parfois plusieurs années, il sera tout aussi difficile d’en sortir le moment venu, générant ainsi le cercle vicieux des parcours bloqués. A l’inverse, là où les prix sont plus modérés et l’offre abondante, l’accès au logement et les mobilités résidentielles s’en trouvent facilitées en une spirale vertueuse. Les trois villes qui participent au séminaire illustrent à la fois cette complexité des processus locaux et la nécessaire diversité des réponses politiques. Une ville moyenne sous pression L’agglomération de Pontarlier constitue un exemple particulièrement intéressant de ce que peut être une ville de taille moyenne (27 500 habitants, 10 communes pour la communauté de communes), à dominante rurale, éloignée des grandes villes françaises et dont la ville-centre perd des habitants, mais où le marché immobilier s’avère particulièrement tendu. La proximité avec la frontière suisse et la présence de nombreux travailleurs frontaliers à fort pouvoir d’achat expliquent cet apparent paradoxe. Il en résulte de forts écarts de revenus entre des actifs ou retraités locaux qui éprouvent de grandes difficultés à se loger, et des frontaliers qui accèdent facilement à la propriété de belles maisons dans les communes de première couronne. La faible présence du logement social (10,1% dans la communauté de communes au recensement de 2019) accroît encore les difficultés des premiers à se loger selon leurs aspirations au sein du territoire de l’EPCI. La prise de conscience de ces difficultés est récente, mais désormais forte. La communauté de communes a lancé en 2017 une démarche de PLU intercommunal valant PLH, imposant la production de logements sociaux dans ses orientations d’aménagement et de programmation (OAP). Une opération programmée d’amélioration de l’habitat (OPAH) ambitieuse est lancée dans le centre-ville et l’ingénierie locale a été renforcée par la création, en 2021, d’un poste de responsable habitat et logement. Plus original pour une agglomération de cette taille, la ville a suscité deux opérations ambitieuses négociées avec des promoteurs locaux et comportant des proportions importantes de logements financièrement accessibles grâce à des minorations de charges foncières. Pour l’avenir, l’enjeu majeur sera la maîtrise du foncier avec l’aide de l’établissement public foncier (EPF) pour continuer à produire du logement abordable dans des secteurs déjà urbanisés ou pour acquérir et transformer le parc existant. Une métropole en quête d’attractivitéLa problématique stéphanoise est très différente. La métropole de Saint-Etienne (53 communes, 405 000 habitants) est la grande ville française où les logements anciens sont les moins chers (autour de 1 100 €/m²). Elle constitue une sorte d’archétype des métropoles en quête d’attractivité. La population croît légèrement malgré des soldes migratoires fortement négatifs. Il en résulte un marché détendu et un fort mouvement de périurbanisation. Dans l’agglomération, le niveau de construction neuve est particulièrement faible. Le parc privé est plutôt ancien, composé de copropriétés souvent fragiles et présente un taux de vacance élevé. Il soulève d’importants enjeux de réhabilitation. Les logements sociaux sont également assez anciens et souvent obsolètes. La problématique majeure de l’habitat stéphanois est donc centrée sur l’attractivité résidentielle des différents segments de l’existant. L’essentiel des besoins d’intervention publique relève ainsi du renouvellement urbain qui constitue l’élément central du troisième PLH de la métropole, approuvé en 2019. Trois grands volets caractérisent cette orientation. L’action sur le parc privé ancien repose sur deux programmes d’intérêt général (PIG) et six OPAH de renouvellement urbain (OPAH-RU dont trois dans le cadre de l’Agence nationale pour la rénovation urbaine - Anru) visant principalement les centralités de Saint-Etienne et des autres villes de fond de vallée. L’action sur le parc social passe par d’importants programmes de rénovation prévoyant plus de 2000 démolitions/reconstruction. Enfin, une attention particulière est portée aux copropriétés en difficulté avec la mise en place d’un observatoire et de procédures d’accompagnement dans le cadre de plans de sauvegarde et d’OPAH-Copropriétés. Dans tous les cas, ces actions visent à développer, via la réhabilitation et la construction neuve, une offre de logements abordables, attractifs, et aux performances énergétiques améliorées. L’exigence de réguler un marché tendu Rennes est une métropole (43 communes, 457 000 habitants en 2019) très attractive, caractérisée par un marché particulièrement tendu. Elle se situe dans le « top cinq » des métropoles les plus dynamiques sur le plan démographique, tant du point de vue de sa croissance naturelle que du fait de son solde migratoire. Les enjeux sont donc à la fois d’accueillir de nouveaux habitants et d’offrir aux Rennais de bonnes conditions de déroulement de leur parcours résidentiel. Rennes est aussi une des métropoles les plus actives et interventionnistes de longue date, qui s’appuie sur une coopération intercommunale ancienne. L’histoire récente des politiques rennaises de l’habitat a été très marquée par le constat mis en lumière au milieu des années 2000 d’un mouvement massif de périurbanisation porté par des ménages qui ne trouvaient plus à se loger correctement au sein de la métropole et se tournaient vers les franges extérieures de l’aire urbaine. Partant de ce constat, le PLH de 2005 a énoncé une politique volontariste consistant en un haut niveau de production à l’intérieur du périmètre métropolitain dont la moitié de logements aidés. L’effet de cette politique se voit clairement à partir du début des années 2010, avec un net recentrage des parcours résidentiels, permettant au PLH suivant (2015-2022) de se concentrer sur les dynamiques intra métropolitaines. L’enjeu majeur et l’objectif politique affiché devient la liberté de choix résidentiel au sein du territoire et des différents segments du marché. C’est, par exemple, le fondement de la politique du loyer unique désormais pratiquée dans le parc social. C’est aussi la justification d’un objectif de maîtrise de 60% de la production, à travers les logements aidés (40% de la production, en locatif et en accession) et les logements dits « régulés » à prix encadrés tant en accession à la propriété qu’avec du locatif intermédiaire. C’est désormais le souhait de ne plus vendre de terrains publics et de diminuer les prix du logement (en location ou en accession) de la variable foncier. Au-delà de ces spécificités locales, en partant de trois expériences contrastées, les échanges permettent de mettre en valeur trois thématiques transversales essentielles pour la poursuite des réflexions stimulées par l’OHV. Les multiples sens du logement abordableLa première renvoie à la question des outils des politiques locales que sont le logement social et les procédures d’intervention sur l’existant. Les expériences des trois agglomérations associées au débat montrent que ces moyens, définis de façon homogène à l’échelle nationale, peuvent être mobilisés dans des termes très différents selon les contextes locaux. Les attentes à l’égard du logement locatif social sont fortes partout, mais dans des termes différents. Accueil prioritaire des ménages en difficulté à Rennes, substitut d’un marché trop cher à Pontarlier, outil de renouvellement urbain à Saint-Etienne. Plus largement, la notion de logement abordable, née dans les pays anglo-saxons, prend un véritable essor dans notre pays et est bien illustrée par les trois villes. A Saint-Etienne, c’est le marché dans son ensemble qui est abordable ; à Pontarlier, face à la faible part du logement social, il est expérimenté via des formes négociées d’accession à la propriété en partenariat avec les promoteurs ; à Rennes, c’est la construction d’une gamme complète allant du locatif social au logement « régulé » qui doit constituer la majorité de la production nouvelle. Les définitions et les moyens mobilisés au nom du logement abordable diffèrent sensiblement pour s’adapter aux contextes. C’est sans doute ce qui fait son intérêt en permettant de se dégager des catégories institutionnelles dont nous sommes coutumiers et de stimuler la créativité des acteurs locaux. Des territoires qui coopèrentLa question des modalités de la décentralisation des politiques du logement et de l’habitat constitue un deuxième axe significatif des débats. Si la prégnance de l’échelle intercommunale semble acquise, on voit que, quel que soit le contexte, elle ne suffit pas. D’abord parce que les moyens de ces politiques d’agglomération restent limités, notamment en matière de négociation et de pression sur les opérateurs privés. Derrière la question des rapports avec les promoteurs se pose celle de la maîtrise locale des produits qu’ils sont en mesure de mobiliser. La question des formes de défiscalisation de l’investissement locatif et donc des zonages est l’un des points fondamentaux de ces débats, que ce soit pour la revitalisation des centres anciens (mécanisme Denormandie) ou pour la production neuve (mécanisme Pinel). Plus avant, les contextes locaux montrent l’ampleur des interdépendances de l’échelle des agglomérations avec celles des territoires qui les entourent : intercommunalités périphériques, départements, régions. À l’image des démarches inter-PLH entreprises en Bretagne, des échanges avec les départements et la région à Saint-Etienne, ou de la prise en compte de bassins de vie à Pontarlier, les politiques locales de l’habitat se conçoivent dans des logiques de coopération de plus en plus importantes. Combiner les ambitions de production avec la frugalité foncièreEnfin, les échanges entre les représentants des trois territoires ont mis en évidence une préoccupation commune qui, comme pour les autres sujets, se décline dans des termes différents : celle de la question foncière renforcée par la perspective de la montée en puissance de l’exigence de zéro artificialisation nette (ZAN). Tous, à l’image des Rennais, revendiquent de considérer le foncier comme un « bien commun » dont la dimension d’intérêt général est illustrée par les démarches de dissociation d’avec le bâti portées par les organismes de foncier solidaire (OFS). Mais tous s’inquiètent de la raréfaction des ressources que va générer la nécessaire frugalité foncière. L’enjeu de renouvellement urbain et de reconquête du parc existant et des sites déjà urbanisés ne va pas cesser de monter en puissance, même là où les besoins d’accroissement de l’offre sont les plus forts. C’est sans doute l’un des grands défis des décennies à venir. Jean-Claude Driant - Ecole d'Urbanisme de Paris

RENNES

... et en données

Quelques données Informations générales : Maire : Nathalie Appéré (PS) Préfecture du département d’Ille-et-Vilaine (35). EPCI : Rennes Métropole Siège de l’intercommunalité, présidée par Nathalie Appéré (PS). PLH approuvé en 2015 (4e PLH approuvé) PLUi : approuvé en 2020 - Plan « Action cœur de ville » : non Délégation des aides à la pierre : département et collectivité en délégation de type 2 5 principaux organismes de logements sociaux OPH (d’Ille-et-Vilaine et Archipel Habitat), ESH (Aiguillon Construction, Espacil Habitat, Les Foyers)

Rennes dans l'OHV Replay du web-débat du 22 février 2022

L'habitat rennais en quelques mots ...

L'habitat rennais en quelques mots Rennes est l’une des grandes villes les plus attractives de l’échantillon. La croissance démographique y est importante notamment sous l’effet d’un solde migratoire fortement positif dans les communes de banlieue. Les étudiants sont très présents dans la ville-centre. Il en résulte un marché du logement tendu avec un prix moyen dans l’ancien proche de 3500 €/m² dans la ville-centre. L’accession à la propriété y est difficilement accessible pour les ménages de la classe moyenne. La part des logements sociaux se situe proche de la moyenne de l’échantillon aux trois échelles d’analyse, mais la tension du marché et l’abondance de la demande génèrent un temps moyen d’attente proche de cinq ans. Les difficultés d’accès au logement dans l’agglomération contribuent à expliquer l’ampleur de la périurbanisation rennaise où vivent plus de la moitié des habitants de l’aire urbaine, accueillant de nombreuses familles avec enfants. La construction a été très dynamique dans la ville-centre et la banlieue au cours des années 2010. Toutefois, malgré un rythme global de construction plus modeste, le poids de la couronne périurbaine dans la démographie y conduit à l’un des taux d’artificialisation les plus élevés de l’échantillon. Délégataire des aides à la pierre depuis le début du dispositif, en cours d’élaboration de son cinquième PLH et dotée d’un PLUI, Rennes Métropole est l’une des intercommunalités les plus actives en matière de politique du logement, ce qui contribue sans doute à expliquer que, malgré la tension du marché, la construction reste dynamique et l’urbanisation maîtrisée dans le territoire de l’EPCI. Le mal-logement y est moins prégnant que ce que la tension globale du marché pouvait laisser craindre.

Home

Article à partir du web-débat : Changer de chez-soi : les enjeux locaux des parcours résidentiels, Jean-Claude Driant - Ecole d'Urbanisme de Paris

Les séminaires de l'OHV Changer de chez-soi, les enjeux locaux des parcours résidentiels Avec les contributions de Ludivine Chambelland, directrice du pôle stratégie du territoire de la Communauté de communes du Grand Pontarlier, Nathalie Demeslay, responsable du service habitat de Rennes-Métropole et Patrice Raineri, directeur de l’habitat et de la cohésion sociale de Saint-Etienne-Métropole. La problématique des parcours résidentiels interpelle les politiques locales dans toutes leurs dimensions classiques : celle de la production et de la gestion du parc social, celle de la dimension intercommunale des politiques mises en œuvre, celle de la fabrication de l’attractivité résidentielle des secteurs délaissés et du renouvellement urbain, celle des politiques de promotion de l’accession à la propriété et celle des relations centres-périphéries. L’observatoire de l’habitat dans les villes (OHV) met en lumière l’ampleur des écarts entre des villes où le prix de vente médian dans l’ancien est proche de 1000 ou 1100€/m² (Saint Dizier, Saint-Dié-des-Vosges, Nevers ou Saint-Etienne) et d’autres où il faut compter au moins le triple (Montpellier, Rennes ou les Sables-d’Olonne), sans même parler les sommets atteints à Lyon. Face à ce coût de l’accès à la propriété, le rôle des parcs locatifs se trouve lui-même très différencié à l’image de la capacité d’accueil des demandeurs de logements sociaux. Dans certaines villes le nombre de demandeurs est à peine supérieur à la capacité d’attribution d’une année. Dans d’autres, telles Meaux, Lyon, Montpellier, Bastia ou Libourne, l’écart dépasse un rapport de 1 à 6. La simple mise en relation de ces deux catégories d’indicateurs montre l’ampleur des disparités en matière de capacité des ménages à accéder au logement et à faire évoluer leurs conditions d’habitat au fur et à mesure des changements de leur vie. Là où il faut attendre longtemps un logement social, parfois plusieurs années, il sera tout aussi difficile d’en sortir le moment venu, générant ainsi le cercle vicieux des parcours bloqués. A l’inverse, là où les prix sont plus modérés et l’offre abondante, l’accès au logement et les mobilités résidentielles s’en trouvent facilitées en une spirale vertueuse. Les trois villes qui participent au séminaire illustrent à la fois cette complexité des processus locaux et la nécessaire diversité des réponses politiques. Une ville moyenne sous pression L’agglomération de Pontarlier constitue un exemple particulièrement intéressant de ce que peut être une ville de taille moyenne (27 500 habitants, 10 communes pour la communauté de communes), à dominante rurale, éloignée des grandes villes françaises et dont la ville-centre perd des habitants, mais où le marché immobilier s’avère particulièrement tendu. La proximité avec la frontière suisse et la présence de nombreux travailleurs frontaliers à fort pouvoir d’achat expliquent cet apparent paradoxe. Il en résulte de forts écarts de revenus entre des actifs ou retraités locaux qui éprouvent de grandes difficultés à se loger, et des frontaliers qui accèdent facilement à la propriété de belles maisons dans les communes de première couronne. La faible présence du logement social (10,1% dans la communauté de communes au recensement de 2019) accroît encore les difficultés des premiers à se loger selon leurs aspirations au sein du territoire de l’EPCI. La prise de conscience de ces difficultés est récente, mais désormais forte. La communauté de communes a lancé en 2017 une démarche de PLU intercommunal valant PLH, imposant la production de logements sociaux dans ses orientations d’aménagement et de programmation (OAP). Une opération programmée d’amélioration de l’habitat (OPAH) ambitieuse est lancée dans le centre-ville et l’ingénierie locale a été renforcée par la création, en 2021, d’un poste de responsable habitat et logement. Plus original pour une agglomération de cette taille, la ville a suscité deux opérations ambitieuses négociées avec des promoteurs locaux et comportant des proportions importantes de logements financièrement accessibles grâce à des minorations de charges foncières. Pour l’avenir, l’enjeu majeur sera la maîtrise du foncier avec l’aide de l’établissement public foncier (EPF) pour continuer à produire du logement abordable dans des secteurs déjà urbanisés ou pour acquérir et transformer le parc existant. Une métropole en quête d’attractivitéLa problématique stéphanoise est très différente. La métropole de Saint-Etienne (53 communes, 405 000 habitants) est la grande ville française où les logements anciens sont les moins chers (autour de 1 100 €/m²). Elle constitue une sorte d’archétype des métropoles en quête d’attractivité. La population croît légèrement malgré des soldes migratoires fortement négatifs. Il en résulte un marché détendu et un fort mouvement de périurbanisation. Dans l’agglomération, le niveau de construction neuve est particulièrement faible. Le parc privé est plutôt ancien, composé de copropriétés souvent fragiles et présente un taux de vacance élevé. Il soulève d’importants enjeux de réhabilitation. Les logements sociaux sont également assez anciens et souvent obsolètes. La problématique majeure de l’habitat stéphanois est donc centrée sur l’attractivité résidentielle des différents segments de l’existant. L’essentiel des besoins d’intervention publique relève ainsi du renouvellement urbain qui constitue l’élément central du troisième PLH de la métropole, approuvé en 2019. Trois grands volets caractérisent cette orientation. L’action sur le parc privé ancien repose sur deux programmes d’intérêt général (PIG) et six OPAH de renouvellement urbain (OPAH-RU dont trois dans le cadre de l’Agence nationale pour la rénovation urbaine - Anru) visant principalement les centralités de Saint-Etienne et des autres villes de fond de vallée. L’action sur le parc social passe par d’importants programmes de rénovation prévoyant plus de 2000 démolitions/reconstruction. Enfin, une attention particulière est portée aux copropriétés en difficulté avec la mise en place d’un observatoire et de procédures d’accompagnement dans le cadre de plans de sauvegarde et d’OPAH-Copropriétés. Dans tous les cas, ces actions visent à développer, via la réhabilitation et la construction neuve, une offre de logements abordables, attractifs, et aux performances énergétiques améliorées. L’exigence de réguler un marché tendu Rennes est une métropole (43 communes, 457 000 habitants en 2019) très attractive, caractérisée par un marché particulièrement tendu. Elle se situe dans le « top cinq » des métropoles les plus dynamiques sur le plan démographique, tant du point de vue de sa croissance naturelle que du fait de son solde migratoire. Les enjeux sont donc à la fois d’accueillir de nouveaux habitants et d’offrir aux Rennais de bonnes conditions de déroulement de leur parcours résidentiel. Rennes est aussi une des métropoles les plus actives et interventionnistes de longue date, qui s’appuie sur une coopération intercommunale ancienne. L’histoire récente des politiques rennaises de l’habitat a été très marquée par le constat mis en lumière au milieu des années 2000 d’un mouvement massif de périurbanisation porté par des ménages qui ne trouvaient plus à se loger correctement au sein de la métropole et se tournaient vers les franges extérieures de l’aire urbaine. Partant de ce constat, le PLH de 2005 a énoncé une politique volontariste consistant en un haut niveau de production à l’intérieur du périmètre métropolitain dont la moitié de logements aidés. L’effet de cette politique se voit clairement à partir du début des années 2010, avec un net recentrage des parcours résidentiels, permettant au PLH suivant (2015-2022) de se concentrer sur les dynamiques intra métropolitaines. L’enjeu majeur et l’objectif politique affiché devient la liberté de choix résidentiel au sein du territoire et des différents segments du marché. C’est, par exemple, le fondement de la politique du loyer unique désormais pratiquée dans le parc social. C’est aussi la justification d’un objectif de maîtrise de 60% de la production, à travers les logements aidés (40% de la production, en locatif et en accession) et les logements dits « régulés » à prix encadrés tant en accession à la propriété qu’avec du locatif intermédiaire. C’est désormais le souhait de ne plus vendre de terrains publics et de diminuer les prix du logement (en location ou en accession) de la variable foncier. Au-delà de ces spécificités locales, en partant de trois expériences contrastées, les échanges permettent de mettre en valeur trois thématiques transversales essentielles pour la poursuite des réflexions stimulées par l’OHV. Les multiples sens du logement abordableLa première renvoie à la question des outils des politiques locales que sont le logement social et les procédures d’intervention sur l’existant. Les expériences des trois agglomérations associées au débat montrent que ces moyens, définis de façon homogène à l’échelle nationale, peuvent être mobilisés dans des termes très différents selon les contextes locaux. Les attentes à l’égard du logement locatif social sont fortes partout, mais dans des termes différents. Accueil prioritaire des ménages en difficulté à Rennes, substitut d’un marché trop cher à Pontarlier, outil de renouvellement urbain à Saint-Etienne. Plus largement, la notion de logement abordable, née dans les pays anglo-saxons, prend un véritable essor dans notre pays et est bien illustrée par les trois villes. A Saint-Etienne, c’est le marché dans son ensemble qui est abordable ; à Pontarlier, face à la faible part du logement social, il est expérimenté via des formes négociées d’accession à la propriété en partenariat avec les promoteurs ; à Rennes, c’est la construction d’une gamme complète allant du locatif social au logement « régulé » qui doit constituer la majorité de la production nouvelle. Les définitions et les moyens mobilisés au nom du logement abordable diffèrent sensiblement pour s’adapter aux contextes. C’est sans doute ce qui fait son intérêt en permettant de se dégager des catégories institutionnelles dont nous sommes coutumiers et de stimuler la créativité des acteurs locaux. Des territoires qui coopèrentLa question des modalités de la décentralisation des politiques du logement et de l’habitat constitue un deuxième axe significatif des débats. Si la prégnance de l’échelle intercommunale semble acquise, on voit que, quel que soit le contexte, elle ne suffit pas. D’abord parce que les moyens de ces politiques d’agglomération restent limités, notamment en matière de négociation et de pression sur les opérateurs privés. Derrière la question des rapports avec les promoteurs se pose celle de la maîtrise locale des produits qu’ils sont en mesure de mobiliser. La question des formes de défiscalisation de l’investissement locatif et donc des zonages est l’un des points fondamentaux de ces débats, que ce soit pour la revitalisation des centres anciens (mécanisme Denormandie) ou pour la production neuve (mécanisme Pinel). Plus avant, les contextes locaux montrent l’ampleur des interdépendances de l’échelle des agglomérations avec celles des territoires qui les entourent : intercommunalités périphériques, départements, régions. À l’image des démarches inter-PLH entreprises en Bretagne, des échanges avec les départements et la région à Saint-Etienne, ou de la prise en compte de bassins de vie à Pontarlier, les politiques locales de l’habitat se conçoivent dans des logiques de coopération de plus en plus importantes. Combiner les ambitions de production avec la frugalité foncièreEnfin, les échanges entre les représentants des trois territoires ont mis en évidence une préoccupation commune qui, comme pour les autres sujets, se décline dans des termes différents : celle de la question foncière renforcée par la perspective de la montée en puissance de l’exigence de zéro artificialisation nette (ZAN). Tous, à l’image des Rennais, revendiquent de considérer le foncier comme un « bien commun » dont la dimension d’intérêt général est illustrée par les démarches de dissociation d’avec le bâti portées par les organismes de foncier solidaire (OFS). Mais tous s’inquiètent de la raréfaction des ressources que va générer la nécessaire frugalité foncière. L’enjeu de renouvellement urbain et de reconquête du parc existant et des sites déjà urbanisés ne va pas cesser de monter en puissance, même là où les besoins d’accroissement de l’offre sont les plus forts. C’est sans doute l’un des grands défis des décennies à venir. Jean-Claude Driant - Ecole d'Urbanisme de Paris

SAINT-DIE-DES-VOSGES

... et en données

Quelques données Quelques informations : Maire : David Valence (MR) EPCI : Communauté d’agglomération de Saint-Dié-des-Vosges Siège de l’intercommunalité, présidée par David Valence (MR). PLUi-H en cours d’élaboration depuis 2017 (aucun PLH-PLUi-H précédent) PLUi : en cours d’élaboration (depuis 2017) - Plan « Action cœur de ville » : oui Délégation des aides à la pierre : aucune 2 principaux organismes de logements sociaux OPH (des Vosges), ESH (SA HLM Le Toit Vosgien)

La vision de l'OHV Monographie de Saint-Dié-des-VosgesSaint-Dié : le poids des bailleurs privés, Philippe Estèbe - Acadie

Saint-Dié : le poids des bailleurs privés Un habitat en quête de politique La communauté d’agglomération, de création récente, n’a pas véritablement conçu une politique de l’habitat. Il faut reconnaître que le problème auquel elle fait face n’est pas simple : comment bâtir une politique du logement, et avec quels partenaires, dans un marché déprimé ? Le territoire de l’agglomération de Saint-Dié est situé à l’est du département des Vosges, limitrophe de l’Alsace. Il est constitué d’un système de vallées dont les rivières (le Taintroué, la Fave, le Rabodeau et le Robache), affluents de la Meuse, convergent à Saint-Dié et dans ses environs. Ces vallées industrielles ont subi de nombreuses pertes d’emploi, même si le territoire demeure industriel, particulièrement la filière du bois en cours de diversification et de modernisation, à quoi s’ajoutent quelques implantations nouvelles comme une unité de production de joaillerie. L’agglomération est le deuxième pôle du département des Vosges, à peu près équidistante d’Épinal, Nancy et Strasbourg (1 heure à 1h30). Cette agglomération moyenne est relativement isolée, sans être véritablement enclavée. L’unité urbaine (ville centre, banlieue et couronne périurbaine) accueille 48 000 habitants en 2017 ; elle s’inscrit dans une communauté d’agglomération de 77 communes, correspondant au bassin de vie de Saint-Dié, forte de 75 000 habitants. La population diminue, au rythme de -1,4% par an dans la ville centre, moins rapidement dans la banlieue et la couronne périurbaine. En cinq ans (2012-2017), l’agglomération a perdu environ 2 300 habitants. En conséquence, le marché de la production de logement est atone, de l’ordre d’une centaine de logements par an. La vacance de logement a fortement progressé dans la ville centre depuis 2012 ; en 2017, elle s’élève à 19,4%. Elle plafonne à un niveau élevé dans la périphérie (entre 19% et 22% des logements sont vides), et concerne essentiellement le parc privé. Comme souvent, les périphéries gagnent (un peu) au détriment des centres : la petite centaine de logements neufs produits chaque année, essentiellement des maisons individuelles, est construite en périphérie des petites communes. Avec pour conséquence, comme le fait remarquer, avec une certaine amertume, un responsable administratif de la communauté d’agglomération, « qu’un logement neuf crée un logement vacant », délaissé par ses habitants et non réinvesti par de nouveaux arrivants. Même si cette image n’est pas tout à fait exacte, les deux segments de marché ne communiquent pas terme à terme, elle illustre bien ce sentiment que peuvent avoir les responsables politiques et techniques de faire face à un tonneau des Danaïdes, qui se vide à mesure qu’on le remplit. La question principale n’est pas celle de la production de nouveaux logements. Elle est faible, qu’il s’agisse de logements privés ou sociaux. Les bailleurs l’ont bien compris : la dernière opération neuve de l’entreprise sociale pour l’habitat Le Toit vosgien date de 2014. L’enjeu principal est de remettre sur le marché un patrimoine privé largement vétuste et inadapté. C’est l’orientation prioritaire que se fixe la communauté d’agglomération. Dans sa configuration actuelle, cette structure de gouvernance n’a pas vraiment de politique de l’habitat et encore moins de capacité d’intervention directe. La communauté est jeune, formée en 2017 par la fusion de 6 communautés de communes. C’est donc via les programmes nationaux, de renouvellement urbain, d’action contre la désertification des centres-villes, de rénovation thermique des bâtiments… que se sont, dans la durée, mises en place diverses interventions sur l’habitat. Dans le passé, du fait d’une gouvernance émiettée et communale, les interventions sur l’habitat étaient confiées à des partenaires extérieurs : la maison de l’emploi se focalisait sur la qualification des entreprises et des salariés du bâtiment ; le parc naturel régional (PNR) se voyait confier la gestion des financements destinés à l’amélioration de l’habitat dans le cadre du programme national « Habiter mieux » de l’Anah. Depuis 2018, la communauté d’agglomération élabore un plan local d’urbanisme et d’habitat intercommunal (PLUIH), dont le projet d’aménagement et de développement durable (PADD) est en débat. Ainsi, la communauté ne dispose-t-elle pas d’un instrument propre : ni document d’orientation, ni service dédié. C’est la direction de l’attractivité qui fait office de service habitat. L’émergence d’une stratégie en matière d’habitat semble souffrir du manque d’opérateurs, de la réticence de certains propriétaires et des hésitations des élus, particulièrement dans les petites communes. En conséquence, l’action de la communauté en matière d’habitat est liée aux différents appels à projets et profite des opportunités nationales : le programme de rénovation urbaine dans les deux quartiers prioritaires de la politique de la ville (Saint-Roch et Kellermann), les programmes de rénovation thermique, le programme Action cœur de ville (ACV) à Saint-Dié et deux opérations Petite ville de demain (PVD) portant sur les principaux pôles secondaires (Raon l’Étape, Fraize et Plainfaing), chacune dotée d’un chef de projet et de chargés de mission. Ainsi la politique de l’habitat se construit-elle au gré des programmes nationaux qui se succèdent et s’empilent parfois. Au fil des opérations, deux lignes se dessinent qui correspondent bien aux problématiques locales : celle de l’adaptation des logements existants (rénovation thermique, adaptation aux besoins et pratiques d’une population vieillissante) et surtout, remobilisation des logements vacants pour recréer un marché de l’occasion et de la location, particulièrement dans la ville centre, mais aussi dans les petites communes de l’agglomération. La mobilisation des bailleurs privésAussi embryonnaire soit-elle, la politique de l’habitat a besoin d’un socle sur lequel s'appuyer pour exister et grandir. L’atonie relative et la taille du marché du logement n’attirent pas les opérateurs : Saint-Dié est hors des radars des investisseurs privés et donc des promoteurs (ou l’inverse). En revanche, le prix très bas du m² dans le parc existant, autour de 1 000 euros, permet à de nombreux particuliers, soit par choix, soit par héritage, d’être propriétaires d’un patrimoine locatif qui peut atteindre pour certains, 40 logements, répartis parfois dans plusieurs communes. Selon la communauté d’agglomération, environ un logement privé sur deux à Saint-Dié appartient à un propriétaire bailleur, le parc locatif privé représente donc une dimension structurante du marché du logement déodatien. Parmi ces propriétaires, un nombre important tend à laisser se dégrader son patrimoine, ce qui explique en partie l’importance de la vacance particulièrement dans les petites communes de l’agglomération de Saint-Dié ; d’autres ont au contraire à cœur de maintenir leur patrimoine à flot et constituent les interlocuteurs privilégiés de la politique de soutien à la rénovation et à la remise sur le marché des logements privés : ce sont les partenaires ou clients potentiels de l’opération ACV et, peu à peu, des opérations liées au programme PVD. Ce lien nécessaire avec les propriétaires bailleurs est l’une des orientations prioritaires du futur PADD. Il doit être cultivé comme un levier pour intervenir dans les centres des petites villes et des villages qui connaissent parfois des niveaux de vacance bien supérieurs à celui de la ville centre (21,9% dans la couronne périurbaine de Saint-Dié en 2017). Si ce parc est en partie vide, c’est parce qu’il est considéré comme inadapté aux demandes des ménages d’aujourd’hui : manque de grands logements dans la ville-centre, peu d’espaces extérieurs alors que les jardins sont remobilisés, surdimensionnement de l’offre de stationnement, etc. Il souffre aussi et surtout d’une inadaptation aux normes énergétiques actuelles et futures qui préoccupe les acteurs, particulièrement dans une communauté d’agglomération dont près du quart des ménages est considéré en situation de précarité énergétique. Dans ce domaine, la longue expérience accumulée à travers plusieurs dispositifs a conduit la communauté d’agglomération et ses partenaires (notamment le parc naturel régional) à concevoir un dispositif de financement des travaux qui prend en charge 80% du coût de la rénovation et qui rémunère directement les entreprises, évitant ainsi aux propriétaires d’avoir à emprunter avant de pouvoir recevoir les aides publiques. Les propriétaires bailleurs répondent semble-t-il assez volontiers aux incitations à rénover, surtout ceux qui témoignent du souci de maintien et de valorisation de leur patrimoine. D’après les témoignages recueillis, les logements locatifs rénovés trouvent preneur facilement, ce qui a conduit les maires, selon les termes d’un agent de la communauté d’agglomération, à « accepter le développement de l’offre locative alors qu’ils sont plutôt a priori favorables à la propriété ». L’autonomie relative des bailleurs sociauxLa présence de deux organismes HLM, une entreprise sociale pour l’habitat (ESH) dont la ville est actionnaire majoritaire, Le Toit vosgien, et l’office départemental des Vosges (Vosgelis), et l’héritage de l’activité industrielle expliquent l’importance relative du logement social dans le parc de logements (27% des logements dans la ville centre). Les patrimoines des deux bailleurs sont complémentaires : fortement concentré dans le quartier prioritaire de la politique de la ville pour l’office départemental, plus diffus dans le territoire de la communauté, héritage des initiatives patronales, pour Le Toit vosgien. En l’absence de politique communautaire, ces deux organismes ont développé leur propre stratégie, jouissant d’une grande autonomie par rapport aux collectivités locales. Les deux organismes répondent aux mêmes problématiques que le secteur libre : faute de demande pour des logements neufs, ils se sont spécialisés dans la rénovation des logements. Au fil du temps, chacun a développé, avec les acteurs du bâtiment, un véritable savoir-faire. Grâce aux marchés de rénovation, les entreprises du bâtiment ont acquis des techniques et des qualifications, stimulés par des cahiers des charges exigeants, particulièrement ceux du Toit Vosgien, qui a fait de l’investissement dans la qualité énergétique du logement et la diminution des charges locatives une marque de fabrique. Le Toit Vosgien est proche des entreprises du fait de son histoire —l’organisme est issu du paternalisme patronal— et s’appuie sur un environnement économique caractérisé par la présence d’un ensemble d’entreprises travaillant dans le secteur de la construction bois. L’organisme a d’abord expérimenté la construction en bois pour sa production neuve (qui se fait au compte-gouttes) puis, depuis 2016 l’a déployée dans sa politique de rénovation. L’organisme ne recourt pas à la vente en l’état futur d’achèvement qui consiste à acheter une partie de leur production à des promoteurs et assure directement la conduite des travaux. Il s’appuie sur un pool d’architectes locaux qui sert à la fois de tête chercheuse et de stimulant pour l’innovation technique. S’il construit peu et, selon son directeur, avec discernement et prudence, la rénovation de son patrimoine lui permet de réduire considérablement les charges locatives ; il trouve donc sans peine des locataires pour les logements ainsi remis aux normes et au goût du jour. L’office départemental Vosgelis confirme cette spécialisation dans la réhabilitation —qui contribue aussi à fidéliser les locataires. Avec les crédits du plan de relance et de l’Anru, Vosgelis met aux normes environ 150 logements par an. Autant Le Toit vosgien s’est spécialisé dans l’usage du bois dans la construction neuve et la réhabilitation, autant Vosgelis accorde une attention particulière à l’adaptation des logements au vieillissement de ses locataires : installation d’ascenseurs, de douches à l’italienne et de balcons (ce dernier élément étant aussi une leçon de l’expérience du confinement). De l’avis convergent de la communauté d’agglomération et des organismes bailleurs, cette stratégie presqu’entièrement tournée vers la rénovation de l’existant commence à porter ses fruits, autant dans le secteur du logement social —sur un parc de 3 000 logements, l’office départemental ne compte que 17 logements vacants— que dans une partie du parc privé au cœur de la ville centre : selon un bailleur, « il n’y a plus grand-chose à acheter et à rénover dans le centre-ville ». Même si le regain d’attractivité du cœur de ville ne rejaillit pas, pour l’instant, sur le reste du territoire où le taux de vacance reste élevé, ce satisfecit interroge, en l’absence d’évaluation. Saint-Dié serait-il en train de résorber la vacance de logements ? Si c’est avéré, comment l’expliquer ? Sans doute par ceci que, en dépit d’une démographie en berne, il existe une demande latente de logement locatif : elle est nourrie par les jeunes actifs quittant le foyer familial, de jeunes ménages en quête d’une première installation, des personnes âgées désireuses de se rapprocher des services collectifs, ménages à la recherche d’un logement plus grand et/ou de meilleure qualité mais aussi de locations de courte durée, fonctionnaires ou cadres récemment nommés à la recherche d’un logement pérenne, etc. Souvent, cette demande —surtout lorsqu’elle est endogène— ne se révèle pas faute d’offre. La remise sur le marché de logements fonctionnels, rénovés et accessibles fait tout à coup émerger de nouveaux besoins non exprimés jusqu’alors. Il existe aussi quelques foyers de demande exogène : le succès touristique de Gérardmer engendre une petite pression dans les communes limitrophes situées dans la communauté d’agglomération. Les bailleurs sociaux ont ainsi été surpris de constater la diversité des origines des demandeurs ; plus récemment, ce sont les familles ukrainiennes réfugiées qui sont venues gonfler le flot locataires. La politique de rénovation, appuyée sur deux jambes, les bailleurs privés et les bailleurs sociaux fait donc, pour les acteurs de l’habitat, la preuve que l’on peut « rallumer la ville-centre ». Un indice : le prix du m² augmente à nouveau après une baisse sensible depuis 2018. Une évaluation reste nécessaire pour vérifier ce qui n’est pour l’instant qu’un « ressenti ». Elle devrait aussi esquisser les lignes plus claires d’une stratégie communautaire en matière d’habitat. C’est tout l’enjeu du zonage qui se négocie dans le cadre du PLUiH. Les maires seront-ils assez convaincus pour accepter de limiter la construction de maisons individuelles dans la périphérie de leur bourg-centre ? Pourront-ils pour cela s’appuyer à nouveau sur un dispositif national, à savoir la politique du ZAN, zéro artificialisation nette ? Quoi qu’il en soit, l’observateur s’étonne : Saint-Dié aurait-il réussi à ranimer le marché du logement dans une ville en décroissance démographique ? Philippe Estèbe - Acadie

L'habitat à Saint-Dié-des-Vosges en quelques mots ...

L'habitat à Saint-Dié-des-Vosges en quelques mots Avec Saint-Dizier de la même région Grand-Est, Saint-Dié présente de nombreux traits communs. La population diminue assez nettement, aussi bien au centre que dans la périphérie. Le prix des logements est bien contenu, avec un prix médian de l’ordre de 1000 €/m² dans l’ancien. Les besoins en matière d’amélioration du parc ou de mobilité résidentielle sont aussi importants. Le temps d’attente pour un logement social est assez important dans ce contexte de marché immobilier, avec un temps d’attente moyen de deux ans. Le taux de précarité énergétique des ménages est élevé, avec près de 25 % des ménages concernés. Comme à Saint-Dizier également, les politiques de l’habitat sont peu partagées à l’échelon intercommunal. On note l’absence de partage de la politique foncière (pas de plan local d’urbanisme intercommunal, ni de programmation concertée dans le champ de l’habitat).

Home

SAINT-DIZIER

... et en données

Quelques données Informations générales : Maire : Quentin Brière (LR) Sous-préfecture du département de la Haute-Marne (52), dont la préfecture est Chaumont. EPCI : Communauté d’agglomération de Saint-Dizier, Der et Blaise Siège de l’intercommunalité, présidée par Quentin Brière (LR). PLH approuvé en 2012 (premier PLH approuvé) en cours de révision PLUi : en cours d’élaboration (depuis 2015) - Plan « Action cœur de ville » : oui Délégation des aides à la pierre : aucune 4 principaux organismes de logements sociaux OPH (de Haute-Marne et de Saint-Dizier), ESH (Plurial Novilia et Le Foyer Rémois)

Saint-Dizier dans l'OHV Replay du web-débat du 17 janvier 2023

Y a-t-il des investisseurs dans les villes moyennes ? 17 janvier 2023

L'habitat à Saint-Dizier en quelques mots ...

L'habitat à Saint-Dizier en quelques mots Saint-Dizier fait partie de ce que les géographes appelaient naguère la « diagonale du vide ». L’expression n’est plus employée, parce que jugée peu courtoise ou précise, et peut-être surtout parce qu’une partie de la diagonale, au sud, n’en fait plus partie. Au nord-est du territoire national, et notamment dans la région de Saint-Dizier, la baisse de la population reste une donnée déterminante de la trajectoire territoriale. Le département de la Haute-Marne comprenait 214 000 habitants en 1968, il en comprend un peu moins de 175 000 en 2018 selon les chiffres de l’INSEE. L’agglomération de Saint-Dizier est évidemment marquée par ses dynamiques départementales. Entre 2012 et 2017, la population diminue dans la ville-centre (de 1268 habitants) ainsi que dans la couronne périurbaine (de 540 habitants). Seule la banlieue enregistre une faible croissance de 33 habitants. La baisse s’explique principalement par un solde migratoire négatif. Dans ce contexte, le nombre de logements vacants augmente. Les logements sont relativement accessibles à Saint-Dizier : le prix de vente médian dans l’ancien, à un peu plus de 1000 €/m², est un des plus faibles de notre échantillon. Toutefois, cette situation de marché « détendu » ne signifie pas l’absence d’enjeux importants en matière d’accès à un logement de qualité. Près d’un demandeur de logement social sur sept signale comme motif le mal-logement. Plus de 27 % des ménages sont en situation de précarité énergétique. Dans ce contexte, l’intercommunalité dispose encore de peu d’outils partagés, outre un programme local de l’habitat datant de 2012, qui devrait être remplacé par un plan local d’urbanisme intercommunal en projet depuis 2015, accompagné de son volet habitat (PLUi-H). Mais, le contexte de faible attractivité résidentielle ne semble pas, jusqu’ici, justifier une forte intégration intercommunale.

Home

Article à partir du web-débat : Y-at-il des investisseurs dans les villes moyennes ? Xavier Desjardins - Acadie

Les séminaires de l'OHV Y-a-t-il des investisseurs dans les villes moyennes ? Avec les contributions de Pauline Amiable, responsable de la planification stratégique de la communauté d’agglomération Saint-Dizier Der et Blaise, Sébastien Blanc, directeur général des services de la communauté d’agglomération du Grand Auch, Stéphanie Magnier, chargée de mission habitat et foncier de la communauté d'agglomération de Cambrai. Des investisseurs dans les villes moyennes ? Il y en a beaucoup ! Loin de l’idée répandue d’une absence ou d’un manque de ce type d’acteurs immobiliers, les représentants d’Auch, Saint-Dizier et Cambrai ont, au contraire, insisté sur la diversité de leurs profils dans ces villes. Pour autant, ces investissements sont souvent inférieurs aux attentes locales et ils ne sont que rarement en phase avec les stratégies territoriales, notamment pour la revitalisation des centres anciens. Orienter les investisseurs ou susciter une demande nouvelle ?Sébastien Blanc, directeur général des services de la communauté d’agglomération du Grand Auch ; confesse un certain « aveu d’impuissance » et s’interroge sur l’effet réel des politiques locales. La capacité d’attirer les investisseurs est très liée à l’attractivité résidentielle. Or, celle-ci est très contrastée entre les trois villes. Elle est assez forte et en progression à Auch, située à environ une heure de route de Toulouse. En témoignent les sommes perçues via les droits de mutation à titre onéreux (DMTO) qui ont doublé en quatre ans mais qui s’expliquent par la hausse du rythme des mutations, plus que par une forte augmentation des prix. L’attractivité résidentielle est modérée à Cambrai, qui a longtemps bénéficié d’un effet de desserrement résidentiel de l’aire métropolitaine de Lille. Elle est très faible à Saint-Dizier. La ville-centre est passée de 40 000 habitants en 1980 à 23 000 habitants aujourd’hui. Face à ces effets macro-économiques contre lesquels il est difficile – à l’échelle des institutions municipales ou intercommunales, tout au moins – de réellement lutter, il existe toutefois des marges de manœuvre pour les politiques locales qui permettent d'orienter les investissements, par quartier ou par type de logements. Même à Auch où la demande est forte, le marché est déséquilibré : le centre ancien attire peu car, comme partout, les caractéristiques des logements plaisent moins. Le stationnement est délicat, les logements n’ont souvent ni balcon ni terrasse, ne correspondent plus aux attentes des habitats, ni en surface, ni en confort, etc. La croissance périurbaine a tendance à se concentrer le long des axes routiers les plus fréquentés (en l’occurrence, à Auch, en direction de Toulouse). L’art des politiques locales de l’habitat consiste justement à tenter de remettre des logements sur le marché et de donner envie à des ménages de les habiter. Partons à Saint-Dizier, Pauline Amiable présente dans cette ville de Haute-Marne une stratégie de développement local volontairement contracyclique. La communauté d’agglomération développe des projets d’envergure pour se singulariser et tenter de se rendre attractive : elle met en œuvre un projet de reconfiguration de l’espace public pour faciliter les mobilités actives, en lien avec les Jeux Olympiques de 2024, elle développe un lieu culturel en partenariat le Grand Palais de Paris, etc. Saint-Dizier voit grand malgré sa taille modeste. La ville a initié un « laboratoire de la ville de demain », pour présenter des projets urbains et architecturaux, un peu à la manière des Internationale Bauausstellung (IBA), ces événements organisés chaque année dans une ville allemande différente, pour mettre en valeur des projets architecturaux et urbains et parfois les politiques urbaines qui leur ont permis d’exister. Dans ce cadre, l’agence d’architectes-urbanistes Devillers et associés a reçu une double mission : l’élaboration d’un plan-guide de transformation urbaine et la création de partenariats entre différents investisseurs et gestionnaires d’ensembles immobiliers. On devine toute la complexité d’une telle démarche à Saint-Dizier où les acteurs locaux sont d’une part stimulés par une envie de développement portée par le maire, Quentin Brière, dynamique et très bien connecté aux milieux économiques, d’autre part bien conscients que le parc de logements doit diminuer, au risque de se vider en partie. De grandes opérations de rénovation urbaine ont été entreprises (notamment dans le quartier Vert Bois), pour aller dans ce sens. Il faut donc appuyer simultanément sur le frein et l’accélérateur, c'est-à-dire tenir compte des dynamiques de marché sans s’y soumettre ! Enfin, dans les trois villes, nos interlocuteurs nous ont rappelé que même dans un marché globalement détendu voire atone, il pouvait y avoir des tensions sur certains segments du parc, notamment les logements individuels de qualité ou les logements collectifs bien conçus. A titre d’exemple, les logements locatifs privés de qualité se louent environ 11 ou 12 euros par m² à Saint-Dizier, ce qui offre des rendements locatifs tout à fait satisfaisants, compte tenu du niveau des prix d’achat. Même dans une ville moyenne, même en décroissance, il existe « des » marchés du logement. Qui sont les investisseurs présents dans ces villes ?Deux types sont bien connus par les trois protagonistes représentés : les investisseurs publics, soit directement soit via des aides publiques, et les absents ! Ils sont faciles à identifier : la plupart des investisseurs institutionnels, assureurs, banques et autres fonds d’investissement. Parmi les acteurs de l’immobilier, les promoteurs sont également absents de ces trois villes. Les autres investisseurs privés sont moins bien connus. Pourtant, ils constituent l’essentiel de l’investissement immobilier dans ces villes et au minimum 80% des sommes investies. Quand le marché est stable et relativement porteur, les collectivités locales ne s’attardent pas trop sur leur profil et ne cherchent pas à savoir qui ils sont dès lors que le marché est alimenté. A Cambrai, Stéphanie Magnier a bien expliqué comment, pendant de nombreuses années, la demande locale, le desserrement lillois et un parc relativement peu onéreux pour le département du Nord ont globalement suffit aux édiles locaux. Depuis 2012, la fermeture de la base aérienne 103 a complètement changé la donne du marché immobilier : la ville souffre du départ d’un millier de militaires. Depuis lors, il convient de trouver des stratagèmes pour attirer de nouveaux ménages, issus de l’agglomération ou d’ailleurs. De grands projets économiques sont en cours, avec la création d’un port sur le canal Seine-Nord-Europe et le projet, à Cambrai, d’une grande base logistique dont on attend environ 1300 emplois. Les résidences militaires forment de grands ensembles immobiliers qui sont restés longtemps en friche. En 2020, un premier site a été vendu à un investisseur cambrésien pour y construire des logements moyens et hauts de gamme. Ici, le salut vient d’abord des investisseurs locaux. Qui sont ces investisseurs locaux ? Ce sont des particuliers ou des petits professionnels qui peuvent acheter, puis louer de quelques unités à une trentaine, voire une quarantaine, de logements. Ces multi-propriétaires sont des partenaires incontournables des collectivités. A Auch, la municipalité collabore souvent de manière étroite avec eux pour concevoir des restructurations d'îlots, des opérations tiroir, etc. Il convient aussi de les aider ou de les inciter à entamer des travaux de rénovation ou d’amélioration : à Saint-Dizier, les héritiers de l’industrie de la fonderie restent de grands propriétaires fonciers et immobiliers, qui n’ont pas toujours une gestion très active de leurs biens. Accompagner les investisseursRepérer et discuter avec les gros investisseurs est assez facile, ils sont visibles, à moins d’être dissimulés derrière des sociétés civiles immobilières. Mais comment aider les petits ? Tel est le sujet des démarches de revitalisation des centres-villes, notamment à l’heure d’Action Cœur de Ville, programme national en direction des villes moyennes. A Saint-Dizier, la municipalité et la communauté d’agglomération œuvrent au développement d’un réseau de petits investisseurs, en les aidant à trouver un modèle économique viable. Tout d’abord, il s’agit de se rapprocher des propriétaires tentés par la rétention foncière, c’est-à-dire attendre une valorisation plus importante avant de vendre, ou affichant des prix de vente excessifs. Ensuite, il s’agit d’aider les investisseurs dans le montage financier et juridique des projets. Le projet d’opération programmée de l’habitat de renouvellement urbain (OPAH-RU) permet par exemple cet accompagnement et de concentrer des aides, notamment de l’Agence nationale de l’habitat (Anah) et d’Action Logement. Il faut faire connaître ces dispositifs et parfois apprendre aux propriétaires à jouer avec leurs modalités. Le dispositif fiscal Denormandie qui aide à la rénovation de logements en mauvais état et ou vides est limité à deux investissements par an et par investisseur : pour la réhabilitation d’un petit immeuble, il faut jouer sur les années civiles pour acquérir et rénover quatre logements, par exemple. A proximité du projet d’enfouissement des déchets nucléaires de Bure dans la Meuse, à une quarantaine de kilomètres de Saint-Dizier, les propriétaires peuvent également bénéficier d’aides spécifiques d’EDF. Au-delà de l’aide financière, il faut accompagner les propriétaires dans la définition du projet architectural. Des aides spécifiques existent pour la création d’extérieurs comme des balcons, pour la création d’accès indépendants aux logements situés au-dessus d’un commerce, pour l’installation d’ascenseurs dans les immeubles collectifs, etc. L’appui de la collectivité locale va jusqu’à proposer des services à la rédaction des contrats de location. Des investisseurs partout, mais dépendants de l’accompagnement des collectivités localesCes trois exemples montrent qu’il n’y a pas de territoires sans investisseurs ! Ils ne sont parfois pas nombreux, poursuivent des objectifs et des stratégies quelquefois peu en phase avec celles des collectivités, mais ils sont là. Par ailleurs, partout, sur certains segments du marché locatif, il est possible d’obtenir de bons rendements locatifs, grâce à une connaissance précise et presque intime des situations locales. La deuxième conclusion est que les mécanismes purement fiscaux ou financiers sont insuffisants pour réorienter la demande. L’accompagnement des investisseurs, sur le plan architectural, financier ou encore juridique est un élément-clé pour favoriser les projets. Cet accompagnement dépend directement de la bonne volonté et des compétences des acteurs publics locaux. Une interrogation persistante porte sur les effets potentiels du zéro artificialisation nette : le resserrement des droits à s’étaler va-t-il réorienter la demande vers les centres ? Probablement selon Sébastien Blanc, par effet mécanique de déplacement de la demande. Sans véritable certitude du côté de Saint-Dizier car la rétention foncière reste importante et les effets sur les prix seront certainement très lents. Une autre question porte sur le profil des investisseurs petits et moyens. Dans chacune des villes, ils sont individuellement connus. Mais finalement, quels sont leurs profils en termes d’âge, de trajectoires individuelles, de motivation, de patrimoine, etc. ? Ce type d’acteurs immobiliers reste assez mal appréhendé alors que certains financeurs des opérations disposent de riches données les concernant (Anah et Action Logement entre autres). Les échanges de ce séminaire ont montré qu’ils sont pourtant des acteurs-clés dans les villes moyennes. Xavier Desjardins - Acadie

SAINT-ETIENNE

... et en données

Quelques données Informations générales : Maire : Gaël Perdriau (LR) EPCI : Saint-Étienne Métropole Siège de l’intercommunalité, présidée par Gaël Perdriau (PS). PLH approuvé en 2019 (3e PLH approuvé) PLUi : en cours d’élaboration (depuis 2018) - Plan « Action cœur de ville » : non Délégation des aides à la pierre : aucune 4 principaux organismes de logements sociaux OPH (de la Loire et Habitat et métropole), ESH (ICF Habitat Sud-Est Méditerranée), Action Logement (Cité Nouvelle)

Saint-Etienne dans l'OHV Replay du web-débat du 22 février 2022

L'habitat stéphanois en quelques mots ...

L'habitat stéphanois en quelques mots Saint-Étienne est la grande ville française où les logements anciens sont les moins chers. Dans ce contexte et compte tenu d’une relative abondance de logements sociaux dans la ville-centre et sa banlieue, l’accès aux HLM y est plus fluide que dans les autres métropoles. Cette relative détente du marché résidentiel se produit dans un cadre général de croissance de la population, modérée dans la ville-centre et sa banlieue et beaucoup plus forte dans sa couronne périurbaine. Dans tous les cas, cette croissance résulte de soldes naturels élevés qui compensent des soldes migratoires fortement négatifs dans l’unité urbaine. Cette faible attractivité se traduit par des dynamiques de construction neuve particulièrement faibles, quelles que soient les échelles analysées, laissant craindre un retour de tension, même si l’abondance du parc vacant peut constituer une ressource à reconquérir. Il en résulte des taux d’artificialisation inférieurs à la moyenne, même dans le périurbain. Dans un contexte marqué par un taux de pauvreté élevé et même si la part des logements suroccupés est faible, la question du mal-logement est prégnante à Saint-Étienne, comme l’indique un pourcentage élevé de demandes de logements sociaux justifiées par ces situations et un nombre important de copropriétés sous administration provisoire. Le troisième PLH de la métropole stéphanoise a été adopté en 2019 et s’accompagne d’un PLU intercommunal lancé en 2018. L’ensemble marque une préoccupation ancienne pour les politiques de l’habitat et leurs liens avec l’urbanisme. En l’absence de délégation des aides à la pierre, la métropole dispose, avec Habitat et Métropole, d’un office public de l’habitat issu en 2021 de la fusion de quatre OPH historiques.

Home

Article à partir du web-débat : Changer de chez-soi, les enjeux locaux des parcours résidentiels, Jean-Claude Driant - Ecole d'Urbanisme de Paris

Les séminaires de l'OHV Changer de chez-soi, les enjeux locaux des parcours résidentiels Avec les contributions de Ludivine Chambelland, directrice du pôle stratégie du territoire de la Communauté de communes du Grand Pontarlier, Nathalie Demeslay, responsable du service habitat de Rennes-Métropole et Patrice Raineri, directeur de l’habitat et de la cohésion sociale de Saint-Etienne-Métropole. La problématique des parcours résidentiels interpelle les politiques locales dans toutes leurs dimensions classiques : celle de la production et de la gestion du parc social, celle de la dimension intercommunale des politiques mises en œuvre, celle de la fabrication de l’attractivité résidentielle des secteurs délaissés et du renouvellement urbain, celle des politiques de promotion de l’accession à la propriété et celle des relations centres-périphéries. L’observatoire de l’habitat dans les villes (OHV) met en lumière l’ampleur des écarts entre des villes où le prix de vente médian dans l’ancien est proche de 1000 ou 1100€/m² (Saint Dizier, Saint-Dié-des-Vosges, Nevers ou Saint-Etienne) et d’autres où il faut compter au moins le triple (Montpellier, Rennes ou les Sables-d’Olonne), sans même parler les sommets atteints à Lyon. Face à ce coût de l’accès à la propriété, le rôle des parcs locatifs se trouve lui-même très différencié à l’image de la capacité d’accueil des demandeurs de logements sociaux. Dans certaines villes le nombre de demandeurs est à peine supérieur à la capacité d’attribution d’une année. Dans d’autres, telles Meaux, Lyon, Montpellier, Bastia ou Libourne, l’écart dépasse un rapport de 1 à 6. La simple mise en relation de ces deux catégories d’indicateurs montre l’ampleur des disparités en matière de capacité des ménages à accéder au logement et à faire évoluer leurs conditions d’habitat au fur et à mesure des changements de leur vie. Là où il faut attendre longtemps un logement social, parfois plusieurs années, il sera tout aussi difficile d’en sortir le moment venu, générant ainsi le cercle vicieux des parcours bloqués. A l’inverse, là où les prix sont plus modérés et l’offre abondante, l’accès au logement et les mobilités résidentielles s’en trouvent facilitées en une spirale vertueuse. Les trois villes qui participent au séminaire illustrent à la fois cette complexité des processus locaux et la nécessaire diversité des réponses politiques. Une ville moyenne sous pression L’agglomération de Pontarlier constitue un exemple particulièrement intéressant de ce que peut être une ville de taille moyenne (27 500 habitants, 10 communes pour la communauté de communes), à dominante rurale, éloignée des grandes villes françaises et dont la ville-centre perd des habitants, mais où le marché immobilier s’avère particulièrement tendu. La proximité avec la frontière suisse et la présence de nombreux travailleurs frontaliers à fort pouvoir d’achat expliquent cet apparent paradoxe. Il en résulte de forts écarts de revenus entre des actifs ou retraités locaux qui éprouvent de grandes difficultés à se loger, et des frontaliers qui accèdent facilement à la propriété de belles maisons dans les communes de première couronne. La faible présence du logement social (10,1% dans la communauté de communes au recensement de 2019) accroît encore les difficultés des premiers à se loger selon leurs aspirations au sein du territoire de l’EPCI. La prise de conscience de ces difficultés est récente, mais désormais forte. La communauté de communes a lancé en 2017 une démarche de PLU intercommunal valant PLH, imposant la production de logements sociaux dans ses orientations d’aménagement et de programmation (OAP). Une opération programmée d’amélioration de l’habitat (OPAH) ambitieuse est lancée dans le centre-ville et l’ingénierie locale a été renforcée par la création, en 2021, d’un poste de responsable habitat et logement. Plus original pour une agglomération de cette taille, la ville a suscité deux opérations ambitieuses négociées avec des promoteurs locaux et comportant des proportions importantes de logements financièrement accessibles grâce à des minorations de charges foncières. Pour l’avenir, l’enjeu majeur sera la maîtrise du foncier avec l’aide de l’établissement public foncier (EPF) pour continuer à produire du logement abordable dans des secteurs déjà urbanisés ou pour acquérir et transformer le parc existant. Une métropole en quête d’attractivitéLa problématique stéphanoise est très différente. La métropole de Saint-Etienne (53 communes, 405 000 habitants) est la grande ville française où les logements anciens sont les moins chers (autour de 1 100 €/m²). Elle constitue une sorte d’archétype des métropoles en quête d’attractivité. La population croît légèrement malgré des soldes migratoires fortement négatifs. Il en résulte un marché détendu et un fort mouvement de périurbanisation. Dans l’agglomération, le niveau de construction neuve est particulièrement faible. Le parc privé est plutôt ancien, composé de copropriétés souvent fragiles et présente un taux de vacance élevé. Il soulève d’importants enjeux de réhabilitation. Les logements sociaux sont également assez anciens et souvent obsolètes. La problématique majeure de l’habitat stéphanois est donc centrée sur l’attractivité résidentielle des différents segments de l’existant. L’essentiel des besoins d’intervention publique relève ainsi du renouvellement urbain qui constitue l’élément central du troisième PLH de la métropole, approuvé en 2019. Trois grands volets caractérisent cette orientation. L’action sur le parc privé ancien repose sur deux programmes d’intérêt général (PIG) et six OPAH de renouvellement urbain (OPAH-RU dont trois dans le cadre de l’Agence nationale pour la rénovation urbaine - Anru) visant principalement les centralités de Saint-Etienne et des autres villes de fond de vallée. L’action sur le parc social passe par d’importants programmes de rénovation prévoyant plus de 2000 démolitions/reconstruction. Enfin, une attention particulière est portée aux copropriétés en difficulté avec la mise en place d’un observatoire et de procédures d’accompagnement dans le cadre de plans de sauvegarde et d’OPAH-Copropriétés. Dans tous les cas, ces actions visent à développer, via la réhabilitation et la construction neuve, une offre de logements abordables, attractifs, et aux performances énergétiques améliorées. L’exigence de réguler un marché tendu Rennes est une métropole (43 communes, 457 000 habitants en 2019) très attractive, caractérisée par un marché particulièrement tendu. Elle se situe dans le « top cinq » des métropoles les plus dynamiques sur le plan démographique, tant du point de vue de sa croissance naturelle que du fait de son solde migratoire. Les enjeux sont donc à la fois d’accueillir de nouveaux habitants et d’offrir aux Rennais de bonnes conditions de déroulement de leur parcours résidentiel. Rennes est aussi une des métropoles les plus actives et interventionnistes de longue date, qui s’appuie sur une coopération intercommunale ancienne. L’histoire récente des politiques rennaises de l’habitat a été très marquée par le constat mis en lumière au milieu des années 2000 d’un mouvement massif de périurbanisation porté par des ménages qui ne trouvaient plus à se loger correctement au sein de la métropole et se tournaient vers les franges extérieures de l’aire urbaine. Partant de ce constat, le PLH de 2005 a énoncé une politique volontariste consistant en un haut niveau de production à l’intérieur du périmètre métropolitain dont la moitié de logements aidés. L’effet de cette politique se voit clairement à partir du début des années 2010, avec un net recentrage des parcours résidentiels, permettant au PLH suivant (2015-2022) de se concentrer sur les dynamiques intra métropolitaines. L’enjeu majeur et l’objectif politique affiché devient la liberté de choix résidentiel au sein du territoire et des différents segments du marché. C’est, par exemple, le fondement de la politique du loyer unique désormais pratiquée dans le parc social. C’est aussi la justification d’un objectif de maîtrise de 60% de la production, à travers les logements aidés (40% de la production, en locatif et en accession) et les logements dits « régulés » à prix encadrés tant en accession à la propriété qu’avec du locatif intermédiaire. C’est désormais le souhait de ne plus vendre de terrains publics et de diminuer les prix du logement (en location ou en accession) de la variable foncier. Au-delà de ces spécificités locales, en partant de trois expériences contrastées, les échanges permettent de mettre en valeur trois thématiques transversales essentielles pour la poursuite des réflexions stimulées par l’OHV. Les multiples sens du logement abordableLa première renvoie à la question des outils des politiques locales que sont le logement social et les procédures d’intervention sur l’existant. Les expériences des trois agglomérations associées au débat montrent que ces moyens, définis de façon homogène à l’échelle nationale, peuvent être mobilisés dans des termes très différents selon les contextes locaux. Les attentes à l’égard du logement locatif social sont fortes partout, mais dans des termes différents. Accueil prioritaire des ménages en difficulté à Rennes, substitut d’un marché trop cher à Pontarlier, outil de renouvellement urbain à Saint-Etienne. Plus largement, la notion de logement abordable, née dans les pays anglo-saxons, prend un véritable essor dans notre pays et est bien illustrée par les trois villes. A Saint-Etienne, c’est le marché dans son ensemble qui est abordable ; à Pontarlier, face à la faible part du logement social, il est expérimenté via des formes négociées d’accession à la propriété en partenariat avec les promoteurs ; à Rennes, c’est la construction d’une gamme complète allant du locatif social au logement « régulé » qui doit constituer la majorité de la production nouvelle. Les définitions et les moyens mobilisés au nom du logement abordable diffèrent sensiblement pour s’adapter aux contextes. C’est sans doute ce qui fait son intérêt en permettant de se dégager des catégories institutionnelles dont nous sommes coutumiers et de stimuler la créativité des acteurs locaux. Des territoires qui coopèrentLa question des modalités de la décentralisation des politiques du logement et de l’habitat constitue un deuxième axe significatif des débats. Si la prégnance de l’échelle intercommunale semble acquise, on voit que, quel que soit le contexte, elle ne suffit pas. D’abord parce que les moyens de ces politiques d’agglomération restent limités, notamment en matière de négociation et de pression sur les opérateurs privés. Derrière la question des rapports avec les promoteurs se pose celle de la maîtrise locale des produits qu’ils sont en mesure de mobiliser. La question des formes de défiscalisation de l’investissement locatif et donc des zonages est l’un des points fondamentaux de ces débats, que ce soit pour la revitalisation des centres anciens (mécanisme Denormandie) ou pour la production neuve (mécanisme Pinel). Plus avant, les contextes locaux montrent l’ampleur des interdépendances de l’échelle des agglomérations avec celles des territoires qui les entourent : intercommunalités périphériques, départements, régions. À l’image des démarches inter-PLH entreprises en Bretagne, des échanges avec les départements et la région à Saint-Etienne, ou de la prise en compte de bassins de vie à Pontarlier, les politiques locales de l’habitat se conçoivent dans des logiques de coopération de plus en plus importantes. Combiner les ambitions de production avec la frugalité foncièreEnfin, les échanges entre les représentants des trois territoires ont mis en évidence une préoccupation commune qui, comme pour les autres sujets, se décline dans des termes différents : celle de la question foncière renforcée par la perspective de la montée en puissance de l’exigence de zéro artificialisation nette (ZAN). Tous, à l’image des Rennais, revendiquent de considérer le foncier comme un « bien commun » dont la dimension d’intérêt général est illustrée par les démarches de dissociation d’avec le bâti portées par les organismes de foncier solidaire (OFS). Mais tous s’inquiètent de la raréfaction des ressources que va générer la nécessaire frugalité foncière. L’enjeu de renouvellement urbain et de reconquête du parc existant et des sites déjà urbanisés ne va pas cesser de monter en puissance, même là où les besoins d’accroissement de l’offre sont les plus forts. C’est sans doute l’un des grands défis des décennies à venir. Jean-Claude Driant